Préparez-vous à frémir et à remonter la couette pour cacher vos yeux. Les grandes téléséries qui se fabriquent présentement, autant en France qu'en Suède, grouillent de terrifiants meurtriers, de flics pourris et de cadavres atrocement mutilés.

C'était frappant hier en cette troisième journée du MIPCOM de Cannes, une immense épicerie où les diffuseurs sélectionnent les produits étrangers qui garniront leurs prochaines grilles de programmation. En effet, la nouvelle cuvée d'émissions dramatiques tire sur les mêmes ficelles ensanglantées que The Killing ou The Following. Voici un rapide tour d'horizon des fictions qui clignotent sur les écrans radars à l'international.

En Norvège, Eyewitness s'apparente à ces captivants polars scandinaves signés Henning Mankell ou Jo Nesbo. Ce thriller nordique à l'esthétisme léché suit deux ados gais qui s'aiment secrètement et qui, lors d'un rendez-vous clandestin, assistent à des exécutions sauvages liées au trafic de drogue. Le hic? La mère de l'un des deux ados bosse pour la police locale. Si l'ado révèle à sa maman ce qu'il a vu et avec qui il se trouvait lors des meurtres, il devra lui parler de son homosexualité, ce qu'il refuse de faire. La situation s'empoisonne quand le meurtrier en question hérite d'un poste important au sein du corps policier.

Dans 100 Code, une coproduction entre la Suède et l'Allemagne, un détective new-yorkais (Dominic Monaghan) atterrit à Stockholm pour assister un enquêteur local (Michael Nyqvist de Millénium) dans la résolution de meurtres de jeunes femmes blondes aux yeux bleus, que leur assassin a abandonnées systématiquement dans un champ de fleurs blanches.

Bien hâte de voir la télésérie policière Les témoins (The Witnesses), que relaiera France 2 ce printemps. Un détraqué a déterré les corps d'un homme, d'une femme et d'un adolescent et les a installés dans la maison modèle d'un nouveau quartier résidentiel, comme s'il souhaitait reconstituer une «vraie» famille. La photo d'un ancien officier haut placé de la police (Thierry Lhermitte) a également été déposée stratégiquement près des cadavres. Quelqu'un cherche visiblement à fouiller dans le passé de ce policier maintenant retraité. Mais pourquoi?

S'inscrivant dans la mouvance de The Leftovers et des Revenants, The Refugees (production de BBC pour l'Espagne) part d'une idée étonnante: trois milliards d'humains venus du futur reviennent dans le présent à la recherche d'endroits pour vivre. Les laisseriez-vous entrer dans votre maison, en ne sachant pas trop pourquoi ils débarquent sur terre?

La télésérie britannique Glue a été présentée hier comme un croisement entre Broadchurch et Skins. L'histoire? Celle d'un ado de 14 ans, membre d'une bande de copains aimant la drogue et le sexe, qui est retrouvé mort sous les roues d'un tracteur dans un magnifique village de la campagne anglaise. L'enquête sur l'assassinat du jeune homme fera remonter à la surface des secrets pas très jojos.

Autre série policière, mais qui a l'air franchement plus amusante que les précédentes: Grantchester, où un prêtre charismatique se lance dans la résolution de crimes. Cette émission, campée dans les années 50, a démarré la semaine dernière sur la chaîne britannique ITV, qui relaie aussi Downton Abbey et Broadchurch.

Amis téléphiles, j'aimerais bien vous indiquer où et quand toutes ces productions européennes joueront chez nous. Pour l'instant, ces infos ne sont pas disponibles. Il faudra d'abord voir si des chaînes d'ici les achèteront.

Le paranormal cool

En termes de qualité, la télévision a surpassé le cinéma dans les dernières années. Même dans des genres traditionnellement réservés au grand écran comme l'horreur (allô American Horror Story!) et la science-fiction (bonjour Les revenants!).

«C'est maintenant techniquement possible de produire une émission de type paranormal qui est aussi bonne et aussi belle qu'un film», a noté le producteur de la série britannique Doctor Who, Steven Moffat, dans une conférence très intéressante consacrée à la popularité grandissante de la science-fiction au petit écran.

Il y a 15 ans, les mots geek et «fluent en klingon» n'allumaient pas du tout les grands réseaux de télé. Aujourd'hui, c'est complètement le contraire. Presque toutes les chaînes en offrent. «Bien sûr, il y a eu Twilight Zone, Star Trek et les X-Files, qui demeuraient des produits de niche. La science-fiction est maintenant grand public», constate Glen Morgan, qui produit la - très moyenne - série Intruders sur BBC America à propos d'une société secrète en quête d'immortalité.

M. Night Shyamalan, qui a engrangé des millions avec ses films (Le sixième sens, L'indestructible) avant d'enfiler les navets indigestes, a trouvé le refuge parfait à la télé pour son amour de la science-fiction. Sa première télésérie, Wayward Pines, prévue sur Fox au printemps 2015, ressemble à s'y méprendre à Twin Peaks de David Lynch. Ce dernier a d'ailleurs annoncé qu'il ressusciterait sous peu Twin Peaks, qui risque certainement d'être meilleur que la copie régurgitée par M. Shyamalan, que je trouve toujours prétentieux et faussement songé en entrevue.

«La science-fiction nous permet de parler de nos angoisses», a souligné M. Night Shyamalan. Pour Steven Moffat de Doctor Who, beaucoup plus allumé et humble que son confrère Shyamalan, «les monstres existent parce qu'ils représentent les peurs réelles des téléspectateurs. Un monstre tout seul, sans contexte, ça n'effraie personne. Cachez-le sous un lit ou dans un placard et là, c'est tout à fait autre chose», remarque Steven Moffat avec justesse.