Désolé de crever votre beau soufflé, mais la cinquième saison de la téléréalité Les chefs!: La revanche ne permettra pas à une première femme de porter la prestigieuse toque d'or, lundi soir, sur les ondes de Radio-Canada.

Si la tendance culinaire se maintient, Nostradumas prévoit en effet une victoire du candidat cordon-bleu Hakim Chajar, 32 ans, lors de cette grande finale où les trois derniers concurrents devront mitonner un souper presque parfait inspiré du grand chef français Paul Bocuse.

Sur papier, Hakim Chajar, maintenant chef au Laurea de l'avenue Laurier, coiffe déjà ses deux adversaires Isabelle Deschamps-Plante, 31 ans, et Jonathan Rassi, 26 ans. Hakim a terminé en première place dans cinq des neuf épisodes diffusés jusqu'à présent et n'a été soumis au duel qu'une seule fois (il y a battu Ashley à l'épreuve du saumon poché).

Son parcours dans l'atelier est jalonné d'étoiles et les trois juges permanents le saupoudrent d'éloges sucrés depuis sa première apparition. S'il n'avait pas été aussi désagréable dans sa façon de diriger une brigade, Hakim aurait facilement gagné la troisième édition des Chefs!, qu'il avait dominée d'un bout à l'autre à l'été 2012. Son attitude militaire l'a brûlé en finale, et c'est le discret Dominic Jacques qui est reparti avec le tablier du vainqueur.

Depuis le début du mois de juillet, Hakim paraît beaucoup plus calme et en contrôle derrière son poste de travail. On l'a vu en arracher dans l'épisode consacré au brunch gastronomique, mais il s'est brillamment repris avant que l'horloge aux gros chiffres rouges n'affiche des zéros partout.

Avec ses deux premières positions en poche, Isabelle Deschamps-Plante, qui n'a jamais été envoyée au duel cet été, semble être la plus importante menace au triomphe d'Hakim. Isabelle travaille comme sous-chef au 47e Parallèle, à Québec, près du Grand Théâtre. Minutieuse et créative, elle avait perdu contre Jérôme Rouault en finale il y a exactement un an.

Jonathan Rassi, la force tranquille du trio de finalistes, a connu un creux de vague à mi-parcours et a rebondi dans les trois dernières émissions. Ça m'étonnerait tout de même qu'il éclipse Hakim et Isabelle lundi soir. Pasquale Vari, Jean-Luc Boulay et Normand Laprise ont plus souvent parlé de la belle présentation visuelle des plats de Jonathan que de leur goût ou des habiletés techniques du cuistot. Jonathan est sous-chef chez Park, un restaurant de sushis haut de gamme dans Westmount.

Pour briser le «boys club» que représente Les chefs! depuis sa mise sur le feu en 2010, la production a invité cette saison des «cheffes» comme Helena Loureiro, du Portus Calle, et Emma Cardarelli, du Nora Gray. La brigade de 2014 était également formée à parts égales d'hommes et de femmes. Reste qu'on ne fait pas gagner une femme uniquement parce qu'il s'agit d'une femme. Ça serait ridicule et injuste.

Si Hakim sert le meilleur repas lundi soir, il ne faudra donc pas y voir un complot masculiniste, même si ç'aurait été fort sympathique qu'une femme grimpe sur la plus haute marche de ce podium gastronomique. Et si jamais la SRC ramène Les chefs! pour une sixième année, ce serait bien de greffer une «cheffe» à la table permanente des juges, question d'apporter un point de vue différent de celui des MM. Vari, Laprise, Boulay et Vézina.

D'ailleurs, pensez-vous qu'une sixième fournée des Chefs! remportait autant de succès aux audimètres? On dirait que cette édition étoilée a mis le couvercle sur le chaudron pour de bon. Si Radio-Canada renouvelle sa téléréalité, il faudra revoir complètement la recette afin que ça ne goûte pas trop les restants de la veille.

Après le premier épisode des Chefs!, j'ai publiquement affiché mes couleurs en appuyant Hakim, Isabelle et Ashley. En prévision de lundi soir, mon coeur me dit d'encourager Isabelle, mais ma tête me dit d'y aller avec Hakim. Pour citer une auteure célèbre, soit Marie Denise Pelletier, «entre la tête et le coeur, un duel sans merci, entre la tête et le coeur, l'éternel conflit». Ces sages paroles demeurent très vraies 20 ans plus tard.