À éplucher Twitter et Facebook depuis une semaine, on jurerait que tout le Québec s'est offert un abonnement à Netflix comme cadeau de Saint-Valentin.

«Whoa, la deuxième saison de House of Cards est ENFIN arrivée. Ne me dérangez pas ce week-end, on se reparle lundi. #marathontélé #cernes», pouvait-on lire, dans la journée du 14 février, sur à peu près tous les réseaux sociaux de la planète. Parfait. On ne vous dérangera pas. Mais ce serait bien si l'inverse était aussi vrai: arrêtez de nous casser les oreilles avec votre «nouvelle supra meilleure télésérie de tout l'univers». Simple échange de bons procédés.

Si c'était une «vulgaire» chaîne traditionnelle comme ABC ou NBC qui diffusait exactement le même produit, pensez-vous que le buzz autour de House of Cards serait aussi étourdissant? Bien sûr que non.

Regarder House of Cards sur Netflix, c'est le nouveau le truc cool à jeter dans une conversation virtuelle ou réelle. Comme se concocter des smoothies au chou frisé ou ne boire que du café de la troisième vague. Un Tim Hortons juste «bien noir, ma noire» ? Plutôt mourir de honte. Un mini café à six dollars moussé par un barista tatoué qui ne jure que par sa grosse machine italienne valant la moitié de votre hypothèque? Oui, monsieur.

Dire qu'on ne consomme sa télé que par Netflix, c'est se distancier de la plèbe qui, elle - quelle horreur! -, paie encore un abonnement à Bell ou Vidéotron. C'est ce qui m'agace dans ce nouveau snobisme.

Vous avez sans doute remarqué que House of Cards est aussi la série préférée de nombreux élitistes qui, en temps normal, regardent très peu - ou pas - de télévision. Mais cette série américaine là, un instant, ils l'ont dévorée en trois jours. Si, si. Et ils s'assurent que tout leur entourage sait bien qu'ils ont a-do-ré ce bijou de cynisme.

Ça me fait beaucoup penser au syndrome du joggeur sur Facebook. Non seulement il s'entraîne de façon spartiate, mais il s'assure aussi que tout le monde voit bien qu'il vient de terminer une course de 10,4 km sur Endomondo ou RunKeeper.

Comprenez-moi bien. Le modèle de Netflix (à 8$ par mois) est génial et économique pour assouvir sa boulimie de téléséries. Par contre, House of Cards, malgré le torrent de commentaires élogieux, n'a pas encore dépassé le calibre d'oeuvres comme Les Soprano, The Wire ou même Le trône de fer. Cela dit, il y a beaucoup de bons éléments dans ce thriller politique gris déprimant, à commencer par les deux interprètes principaux, Kevin Spacey et Robin Wright, tout simplement brillants et enivrants.

Avec un punch qui vous fera hurler «Oh, mon Dieu, je capote!», le premier épisode de la deuxième saison de House of Cards frappe fort. Le politicien Francis Underwood (Spacey) et son épouse Claire (Wright) détruisent tout sur leur passage pour s'approprier le carburant qui les maintient tous deux en vie: le pouvoir. C'est encore plus tordu, sanglant et sombre qu'avant. Et il fait toujours aussi noir dans la magnifique maison des Underwood. Quelqu'un aurait-il oublié d'allumer une lampe dans ces décors délavés?

Au deuxième épisode, ça commence à devenir inquiétant. Frank Underwood n'a pratiquement plus aucun ennemi capable de freiner son ascension à la Maison-Blanche. Dommage que les journalistes de Slugline et du Washington Herald stoppent leur enquête sur la mort inexpliquée du membre du Congrès Peter Russo, car, sans opposition, Frank devient prévisible et ennuyeux.

Le machiavélisme glacial du couple Underwood est clairement établi depuis l'an dernier. Honnêtement, ça devient un brin ridicule de faire dire à Claire, qui en découd avec son ex-employée enceinte: «Je suis prête à laisser cet enfant mourir à l'intérieur de toi si c'est ce qu'il faut.» Cette réplique, plaquée maladroitement, sonne faux.

On grince aussi des dents en entendant la chef de cabinet du président des États-Unis se plaindre: «Tu n'obtiendras pas ma sympathie, je n'ai pas de temps pour ça.» On a compris. Passons.

Le battage ahurissant autour de House of Cards 2, qui rugit depuis huit jours déjà, crée des attentes monstres. En s'attaquant à cette télésérie, on espère ni plus ni moins être jeté par terre, ce qui n'est pas nécessairement le cas. Vous ne perdrez pas votre temps avec Frank et Claire. Vous constaterez cependant qu'il manque quelques cartes dans leur jeu pour qu'il soit vraiment imbattable.

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