Au début du mois de septembre, la première et seule chose que le producteur Louis Morissette a imposée à son équipe d'humoristes du Bye Bye 2013 est celle-ci: on ne fait pas Céline Dion, on ne fait pas Julie Snyder et on ne fait pas Le banquier cette année. On va ailleurs, a-t-il insisté. C'est bon pour tout le monde?

Le soir de la diffusion du Banquier de Céline de TVA, deux mois plus tard, Louis Morissette a croulé sous les messages de sa troupe le suppliant presque de changer d'idée. «J'ai répondu: OK, je pense qu'on n'a plus le choix de le faire. Go!», raconte, sourire en coin, Louis Morissette, en rajustant sa casquette des Red Sox de Boston.

En plus de la résurrection de Céline et Julie dans le Bye Bye, une parodie de la populaire téléréalité La voix a été tournée. Pas moyen non plus d'échapper à des sketches sur la Charte des valeurs québécoises, sur les maires Coderre et Labeaume ainsi que sur la corruption. Un pastiche des pubs de La Presse+, celles dans les cubes colorés, figure aussi au menu.

Cette fois-ci, la séquence d'ouverture, d'un ton et d'un style différents des éditions passées, ne mettra pas en scène des superhéros, mais prendra plutôt la forme d'un film à suspense. «Les décors sont à se crisser par les fenêtres. La facture visuelle, c'est très important. Il faut que ça soit beau», rappelle Louis Morissette.

Mais que restera-t-il de tout ça dans nos téléviseurs le soir du 31 décembre? Bon an, mal an, le Bye Bye passe systématiquement le test du «focus group». Accompagné des auteurs François Avard, Jean-François Léger, Pascal Barriault et Benoît Pelletier, Louis Morissette présente à 250 personnes une version longue de la plupart des numéros qui ont été conçus dans la plus grande confidentialité.

Cette opération s'est déroulée dimanche dernier. Louis Morissette a noté avec précision tous les endroits où les cobayes se tapaient joyeusement sur les cuisses et ceux où le panel riait beaucoup moins. «C'est très fiable comme méthode pour couper ou ajuster des segments», constate Louis Morissette, qui fignole actuellement son sixième Bye Bye à la SRC.

En fait, les derniers correctifs de la populaire revue télé seront apportés dans la nuit du 30 au 31 décembre, vers 3h du matin. «On prend ensuite un verre après et on va se coucher. Le 31, je suis très nerveux, même si je vis beaucoup mieux avec la critique», remarque Louis Morissette.

Avec la multiplication des spectacles tels 2013 Revue et corrigée, des émissions humoristiques à la Pierre Brassard et des capsules web du style Jeudi 16h, la confection d'un Bye Bye se complexifie énormément. «C'est peut-être l'année la plus riche des deux ou trois dernières années. Mais avec les festivals du gag sur Facebook ou Twitter, c'est difficile de créer des trucs originaux. Combien y a-t-il eu de pastiches de Wrecking Ball de Miley Cyrus? Le gag est brûlé», juge Louis Morissette.

Rajoutez au processus créatif déjà difficile la frilosité des avocats: «On se fait tellement couper de choses, c'est enrageant», dit Louis Morissette.

Au début du mois de septembre, l'équipe originale du Bye Bye 2013 se composait de François Morency, André Sauvé, Martin Petit, les Denis Drolet, Claudine Mercier, Jean-Michel Anctil, Jean-François Mercier et Laurent Paquin.

«Chacun écrivait de son côté et ne mélangeait pas ses idées avec celles des autres. Ensuite, il y a eu beaucoup de problèmes de disponibilité du côté des humoristes. Certains n'étaient pas à l'aise de rire de certaines personnes, d'autres n'aimaient pas les textes. Leurs gérants s'en mêlaient et c'est devenu très compliqué à gérer», se souvient Louis Morissette.

À la fin du mois d'octobre, Louis Morissette a proposé à la patronne de la télévision de Radio-Canada, Louise Lantagne, de greffer la troupe des dernières années au premier noyau, question d'unifier ce projet à plusieurs têtes. Résultat? Il y aura beaucoup d'humoristes au pixel carré dans ce Bye Bye 2013. Sans compter les invités-surprises.

«Mais Joël Legendre, Michel Courtemanche, Hélène Bourgeois-Leclerc, Véro et moi serons plus là en soutien et pour reprendre des choses qu'on a déjà faites», glisse Louis Morissette.

Par exemple, Michel Courtemanche fera évidemment Régis Labeaume, et Hélène Bourgeois-Leclerc se transformera de nouveau en Pauline Marois. Leurs anciennes prothèses les attendaient dans l'atelier des costumes de la SRC.

Sur ce sujet délicat, Louis Morissette insiste: personne dans la première équipe d'humoristes n'a eu l'ego froissé et personne ne s'est senti écarté par l'arrivée en renfort des cinq vétérans du Bye Bye. «Ça a fait tomber la pression. Il y a un sentiment de gang qui s'est formé. Avant, personne n'était prêt à prendre le lead. Personne n'était prêt à assumer une potentielle mauvaise critique», note Louis Morissette.

Louis Morissette jure encore que ce Bye Bye 2013 sera son dernier avant un méchant bout de temps. L'automne prochain, il n'aura pas le temps de s'en occuper, car il démarrera la tournée de spectacles pour Les Morissette avec sa conjointe Véronique Cloutier.

«Le Bye Bye, c'est l'affaire la moins payante de mon année. Au début, je le faisais pour le thrill. Maintenant, j'ai le bras pris dans l'engrenage et j'essaie juste de m'en sortir», conclut Louis Morissette.