Jean-Claude Lord, 70 ans, ne s'en cache pas. Le film documentaire Lise Payette: un peu plus haut, un peu plus loin, qu'il a coréalisé pour TVA et Télé-Québec, se veut «une sorte de testament, un legs». C'est donc une biographie autorisée et condensée. Un gros hommage, finalement.

«Je n'avais absolument pas envie que le film contienne des éléments critiques. Le but, c'était de donner la parole à Lise Payette et qu'elle raconte sa vie. Il ne s'agit pas de faire de la propagande, mais il faut absolument que ce film soit vu dans les écoles», a confié Jean-Claude Lord après le visionnement public de sa dernière oeuvre, qui a été projetée hier devant quelques personnalités publiques y témoignant, dont le député Léo Bureau-Blouin, Martine Desjardins, le producteur Jean Bissonnette, la présentatrice de TVA Sophie Thibault ainsi que Flavie Payette-Renouf, petite-fille de Lise Payette et coréalisatrice du film avec Jean-Claude Lord.

Si Jean-Claude Lord milite autant pour que le documentaire coproduit par Julie Snyder passe dans les établissements d'enseignement, c'est que les plus jeunes ne connaissent à peu près rien de la carrière bien remplie de cette grande dame.

D'ailleurs, une des premières scènes du film nous jette crûment cette vérité au visage. Dans une classe de sociologie du Collège de Bois-de-Boulogne, aucun élève ne réussit à répondre à la question: connaissez-vous Lise Payette? C'est celle qui est allée dans l'espace, se risque un d'entre eux, la confondant avec Julie Payette. Ça, c'est franchement gênant.

Pour revoir, en ordre chronologique, les évènements qui ont marqué la vie de Lise Payette, il faut syntoniser Télé-Québec le dimanche 12 janvier à 20h. TVA diffusera une version légèrement raccourcie de cette même émission de 83 minutes en mai, en vertu d'un partenariat de codiffusion signé entre les deux chaînes.

Femme trompée

Ceux d'entre vous qui connaissent très bien le parcours de l'ex-ministre péquiste sous René Lévesque - elle a presque tout écrit dans Des femmes d'honneur - n'y apprendront pas de faits inusités ou croustillants.

Jean-Claude Lord et Flavie Payette-Renouf démarrent leur récit très classique (trop, peut-être) en 1931, dans le quartier Saint-Henri, où est née Lise Ouimet. Et ils remontent le fil: mariage avec André Payette, naissance de ses trois enfants et déménagement à Paris en 1959.

Dans la Ville lumière, Lise Payette découvre que son mari la trompe et sombre dans une grave dépression. Elle songe même à s'enlever la vie. Son médecin lui impose alors une cure de sommeil de 14 jours, ce qui lui permettra de voir plus clair.

Lise Payette tombe enceinte une quatrième fois, mais décide d'aller se faire avorter en Suisse. Côté professionnel, sa carrière décolle et elle multiplie les interviews avec des stars comme Gilbert Bécaud ou Melina Mercouri.

La Oprah du Québec

La journaliste rentre à Montréal en 1965 et divorce trois ans plus tard. Elle rencontrera ensuite l'amour de sa vie, l'homme d'affaires Laurent Bourguignon, avec qui elle passera une trentaine d'années. Ce dernier est mort d'un cancer foudroyant en 2002. «Ça fait toujours aussi mal», confie Lise Payette à la caméra.

Viennent ensuite le talk-show Appelez-moi Lise et le gala du plus bel homme du Canada, qui en feront l'Oprah Winfrey du Québec, selon Stéphane Laporte.

C'est Lise Payette qui organise les fameuses fêtes de la Saint-Jean sur le mont Royal en 1975. Elle saute en politique avec le Parti québécois l'année suivante. Un long segment est ensuite consacré au scandale des Yvettes, la plus grosse bourde jamais commise par Lise Payette. Un très mauvais souvenir, dira-t-elle.

Série de fiction

L'impact de l'oeuvre télévisuelle de Mme Payette (La bonne aventure, Des dames de coeur, Marilyn, Les machos) est effleuré trop rapidement. Il aurait été bon de creuser ce sillon un peu plus profond.

Et seule sa fille Sylvie Payette témoigne dans le film. Les deux autres enfants de Lise Payette, Daniel et Dominique, n'y apparaissent pas. Étrange.

Parfois, c'est Flavie Payette, 25 ans, qui interviewe sa mamie. Souvent, c'est la journaliste Sophie Thibault qui le fait. À la toute fin, Lise Payette elle-même mène les entrevues avec les trois leaders étudiants du printemps 2012, Gabriel Nadeau-Dubois, Léo Bureau-Blouin et Martine Desjardins. Ce qui donne une forme très étrange au documentaire.

Gravement malade, Lise Payette, qui a fêté ses 82 ans cet été, a failli ne jamais participer au projet. Son médecin lui donnait alors «deux jours» à vivre. Et elle était prête à partir. Elle s'est accrochée à la vie pour sa petite-fille Flavie et a pris beaucoup de mieux depuis.

Jean-Claude Lord ne désespère pas de convaincre Lise Payette de tourner, un jour, une série de fiction inspirée de sa vie. Ça pourrait s'appeler Une dame de coeur et d'honneur.