Rassurez-vous tout de suite. La comédie Les pêcheurs de Martin Petit à Radio-Canada n'a rien à voir avec la défunte Soirée de clowns de V, même si leurs prémisses se ressemblent: des humoristes qui reçoivent à souper ou à pêcher d'autres copains humoristes.

Après avoir visionné deux épisodes des Pêcheurs, dont le premier qui passera le mercredi 11 septembre à 21h, un constat s'impose: l'intérêt que nous porterons à cette nouvelle sitcom variera beaucoup en fonction des thèmes abordés et des humoristes invités. Oui, c'est inégal, autant dans le jeu que dans l'écriture. Mais l'auteur, concepteur et comédien Martin Petit tient quelque chose de prometteur au bout de sa ligne.

Le premier épisode met en vedette Alex Perron et Jean-François Mercier, que Martin Petit convie à son chalet des Cantons-de-l'Est pour, quoi d'autre, un week-end de pêche. Pour être bien honnête, ça démarre très lentement et certains gags tournent en rond. En peine d'amour, Alex Perron file un mauvais coton, Martin Petit tente de lui faire cracher le morceau et Jean-François Mercier entretient une relation virtuelle avec une mannequin de 21 ans - une petite perruche - du magazine Summum. Très convenu, tout cela.

Puis, aux deux tiers de l'émission, un moment d'intense émotion jaillit sur le quai: Jean-François Mercier se lance dans une longue tirade à propos des gens qui laissent (Alex) et ceux qui sont laissés (lui-même) dans une relation amoureuse. C'est poignant et cela change complètement le ton, jusque-là badin, de l'émission.

C'est ce que je préfère dans Les pêcheurs: quand l'humour devient grinçant et qu'il s'écarte du punch facile et prévisible. On le sait tous que ces gens ont un sens de la répartie bien aiguisé, alors on aime les voir dans des situations qui les extirpent de leur zone habituelle de confort.

Comme dans le sketch créé et répété plusieurs fois au Festival Juste pour rire, la partie de pêche orchestrée par Martin Petit ne sert que de prétexte à toutes sortes de confidences en plein air. Aucun de ces Cyril Chauquet du dimanche ne sortira de perchaude ou de brochet du lac, on s'entend. Dans l'épisode de Guy A. Lepage et François Morency, c'est de la mort qu'il est question. François Morency manie très bien ce genre d'humour noir et corrosif. C'est lui qui a hérité des meilleures répliques de toute la demi-heure, tandis que Guy A. Lepage joue de manière très linéaire une version timide de son personnage d'animateur de Tout le monde en parle.

Martin Petit aurait pu se pondre un rôle plus consistant. Trop souvent, il ne sert que de tampon ou de tremplin entre ses invités. J'aurais aimé le voir plus mordant, plus présent. En même temps, j'aurais sans doute été le premier à le traiter de mégalomane s'il s'était réservé toutes les meilleures blagues. C'est peut-être lui qui a raison, finalement.

Un souhait pour les 11 prochains épisodes? Que Martin Petit, un gars brillant, s'amuse encore plus avec les traits de caractère des humoristes: montrent-ils une version amplifiée d'eux-mêmes, ou sont-ils vraiment comme ça dans la vraie vie?

Visuellement, la réalisation de Jean-François Asselin (François en série, Nos étés) est très réussie avec son look vintage et sa trame sonore un brin country.

Au fil de la saison, plusieurs visages connus de la colonie humoristique jetteront leur ligne à l'eau avec Martin Petit dont Cathy Gauthier, Jean-Michel Anctil, Marie-Lise Pilote, Michel Courtemanche, André Sauvé, Guillaume Wagner, Mike Ward, François Massicotte et Mario Tessier. En fait, ce serait beaucoup plus court de nommer les comiques du Québec qui n'y participeront pas.

C'est étrange, mais les moments que j'ai le plus aimés dans Les pêcheurs sont ceux qui étaient plus dramatiques que drolatiques. Comme le souper amical qui ferme le premier épisode ou les feux d'artifice qui illuminent le ciel dans l'épisode de François Morency et Guy A. Lepage. On s'y sent quasiment comme dans La vie la vie. Voilà une zone où il serait bon de jeter l'ancre plus longtemps.

Je lévite

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