Prévisible, dites-vous? Sans doute. Cette cinquième mouture de Star Académie a démarré dimanche soir à TVA dans une orgie de lumière, un tintamarre de décibels et une surenchère d'émotions.

Tassez-vous, mesdames et messieurs, la machine a redécollé et, tel un brise-glace, rien ne lui barrera le chemin. C'était intense. C'était gros. C'était tonitruant. C'était extra gratiné. C'était pratiquement trop. Comme si la grenouille avait décidé de se gonfler encore plus pour épater le boeuf, pour finir -quand même- par exploser à trop vouloir impressionner.

Ah oui, la question du français, un sujet toujours brûlant au Québec, a également refait surface. Car, pour sauver leur peau, presque toutes les filles et les gars en danger ont opté pour des pièces en anglais comme Home de Michael Bublé ou You Win My Love de Shania Twain. «Ça nous dérange un petit peu», a admis le directeur de l'Académie, René Angélil. Ils auraient plus de chances s'ils chantaient en français, a-t-il ajouté. Bien dit. Si Biz avait été là, il aurait frôlé l'apoplexie. Mais non, il ne communie pas à cette grand-messe musicale.

Note pour les futurs candidats: la seule interprète qui a poussé la note en français, Mélissa Bédard, a été repêchée par les gens à la maison.

Cette soirée pétaradante de plus de trois heures a aussi baigné dans les larmes, du début à la fin. D'ailleurs, le mascara d'Andréanne A. Malette, 23 ans, de Granby, n'a pas résisté au déluge, lui striant la joue droite d'un long trait noir.

Dans presque tous les portraits des candidates, l'accent a fortement été mis sur les moments dramatiques, tristes ou très émouvants ayant marqué leur vie. Comme si nous regardions un téléroman-savon et qu'il fallait absolument faire pleurer les téléspectateurs. Joannie Benoit, 23 ans, de Tracadie-Sheila au Nouveau-Brunswick, a souffert d'un cancer du fémur et a subi l'amputation d'une jambe, comme Terry Fox. Sarah May Vézeau, 19 ans, de Repentigny, a été adoptée en Chine. La meilleure amie de Carolane Cloutier d'East-Broughton est morte dans un accident de scooter, sa grand-mère se trouvait dimanche à l'hôpital. Et Mélissa Bédard, 21 ans, de Québec, élève sa fille toute seule.

Chez les gars, Mickaël Lavernay, 26 ans, a longtemps été obèse et victime d'intimidation à l'Ile de la Réunion. Il a perdu 60 livres, déménagé à Montréal et entrepris sa carrière artistique sous le nom de Mike Lee. Était-ce nécessaire d'en jeter autant le premier soir? Un peu de retenue, s'il-vous-plaît. Julie Snyder a même dit à Olivier Dion de Sherbrooke, élu par le public, qu'il pleurait comme une fille. Remarque déplacée, sans doute causée par la nervosité du direct.

Heureusement, les autres candidats dont Jean-Marc Couture, 21 ans, de Val-D'Amour et son collègue du Nouveau-Brunswick, Jason Guerrette, un sosie de Jonah Hill originaire de Sainte-Anne-de-Madawaska, ont allégé l'atmosphère. Articulé et attachant, Bryan Audet, 21 ans, de Saint-Élie-de-Caxton a prouvé que son village a produit d'autres talents que Fred Pellerin. Et après un refus en 2009, le tatoué Simon Morin, 22 ans, de L'Assomption, pourra enfin rocker dans le château de Frelighsburg.

Sinon, Andrée-Anne Leclerc, de Saint-Jean-Chrysostome, dégage la même énergie explosive que Brigitte Boisjoli. Élevée à l'église, elle a traversé une adolescence rock'n roll et nourrit maintenant une passion pour le poker.

Sophie Pelletier, 25 ans, de Rivière-Ouelle, a confié avoir perdu les pédales «dans la grande ville», handicapant sa santé mentale et physique. Elle a repris du poil de la bête. Sophie serait-elle la Marjo du groupe?

Carole-Anne Gagnon-Lafond, 20 ans, s'est elle-même qualifiée de Gregory Charles de sa famille. En espérant qu'elle vive bien avec cette étiquette qui met beaucoup de pression.

L'hommage à Gilles Vigneault, amorcé par Céline Dion à Las Vegas et complété par son mari en direct des studios Mel's de Saint-Hubert, n'a pas déçu. Ç'aurait été gênant de massacrer des chansons de ce grand poète québécois. Ginette Reno, Jean-Pierre Ferland et Paul Piché (mal habillé, par contre) ont bien tenu le gouvernail.

Dans cet éclairage bleuté, il aurait fallu être aveugle pour ne pas remarquer les nombreux messages quasi souverainistes -pas fédéralistes en tout cas- qui enveloppaient le passage de M. Vigneault. Le tout, rythmé par Gens du pays et enseveli sous les drapeaux fleurdelisés. Même Julie Snyder s'est permis des commentaires secs sur les anglophones de Montréal incapables de s'exprimer en français.

Contrairement à la présentation des professeurs, beaucoup trop longue, le gala, lui, a démarré sur les chapeaux de roue avec les 20 gagnants des auditions de l'automne, qui ont entonné avec aplomb le nouvel hymne staracadémicien Toi + moi du chanteur français Grégoire. Une pièce inconnue ici, mais qui le deviendra dans les prochains jours. Excellent choix, pas du tout prévisible: «Allez, venez, c'est notre jour de chance» !

Excellent flash en fin de parcours: Guy A. Lepage et Dany Turcotte de Tout le monde en parle, le concurrent direct de Star Académie à TVA, ont inauguré le spa du manoir de Frelighsburg. L'animatrice n'a pas formulé sa meilleure blague en gloussant qu'il faudrait nettoyer le dit spa après la saucette des deux radio-canadiens. Était-ce nécessaire?

Côté technique, rien n'a été négligé. Star Académie, c'est la production la plus ambitieuse, la plus coûteuse et la plus flamboyante de la télévision québécoise. Des écrans LED, il y en avait dans chacun des recoins de l'immense scène.

Après ces 3h10 de sons et lumières, j'avoue avoir frôlé l'étourdissement. Mais, bon, c'est ça Star Académie. Toujours plus gros, toujours plus loin, toujours plus fort.

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