Valérie Blais en costume d'écureuil attaquée par des enfants enragés à Saint-Michel-des-Saints, Éric Bernier qui lance un CD directement dans l'oeil de Pierre Lapointe ou Macha Limonchik qui entame une chorégraphie chantée dans le village gai de Montréal, les moments délicieux de Tout sur moi, j'en collectionne des tonnes depuis que cette comédie pétillante nous étonne à Radio-Canada.

En cinq saisons, 65 épisodes et 1876 pages de texte, cet attachant trio d'amis m'a fait rire aux larmes plus d'une fois. O.K., je sais, j'ai fréquemment écrit sur cette formidable émission depuis septembre 2006, mais que voulez-vous, quand les photos des trois acteurs s'empilent sur le joli générique d'ouverture, c'est plus fort que moi, je souris.

Comment ne pas rigoler en repensant au «corrige, Monique, corrige!» lancé par Éric Bernier à Monique Miller dans une scène de voiture mémorable? Comment oublier le spectaculaire cri de guerre «Yeux! Recule! Maintenant!» répété avec conviction par Valérie Blais? Et comment ne pas s'esclaffer devant la ribambelle d'amours tordues et franchement weird de Macha Limonchik?

Mercredi soir, ce sera la fin définitive de Tout sur moi, la fin de tout ce qui a fait son charme, soit les humiliations publiques, l'autodérision féroce et les scènes burlesques toujours concoctées par Stéphane Bourguignon avec beaucoup d'intelligence, de finesse et de sensibilité.

Il ne faut pas rater cet épisode ultime, bricolé en empruntant les codes de la série Perdus. Tout y est: le crash d'avion, la plage déserte, la musique inquiétante, les débris qui pleuvent du ciel, même les effets spéciaux dignes de Hollywood. Il s'agit sans doute du meilleur de Tout sur moi de l'automne.

Comment le trio atterrit-il dans cette île déserte, qui pourrait autant être Anticosti que l'île d'Orléans? Mystère. Tout ça à cause de «l'estie de pilote à marde», dixit Valérie, qu'Éric a rencontré à l'avant-dernier épisode de cette saison.

Amis téléphiles, ce départ de Tout sur moi marque la fin d'une époque en comédie télévisuelle au Québec. Oui, Les Parent, c'est mignon et sympathique, mais ça demeure fort conventionnel dans la forme et le propos. Tout sur moi, c'était souvent très flyé, sa structure était pétée et son traitement, complètement éclaté, ce qui a donné des épisodes de «coma cauchemardesque» à la David Lynch, il y a deux semaines et demie. Vous vous souvenez de cette fois où l'oreille d'Éric Bernier saignait et où Macha Limonchik subissait une chirurgie plastique pour ressembler à Macha Grenon?

Selon le réalisateur Stéphane Lapointe, les fans ont adoré ou carrément détesté cet hommage à Lynch. Et tant mieux si les réactions ont été polarisées. Le Québec produit déjà assez de télé beige, terne et soporifique qu'on peut se permettre quelques saucettes dans l'expérimental de temps à autre.

Personnellement, j'aime la télé à la Tout sur moi qui ose, la télé qui assume sa montréalité, la télé qui saupoudre des références à Woody Allen ou à Rencontres du troisième type de Steven Spielberg entre deux gags un peu grivois. La télé doit brasser et explorer des zones risquées, quitte à revenir sur ses pas si elle s'est aventurée trop loin.

Parmi les meilleurs moments de Tout sur moi, il y a aussi les apparitions d'Émilie Bibeau la psychopathe, la fois où Valérie Blais a sacré une volée à Guy A. Lepage, l'épisode sur le retour de La vie la vie, les démêlés de Macha avec la vendeuse snob d'Outremont ainsi que les voix de doublage de chihuahua d'Éric.

En cette période d'adieux, Macha, Éric, Valérie, l'auteur Stéphane Bourguignon et le réalisateur Stéphane Lapointe peuvent se vanter d'avoir créé un petit phénomène de société grâce à leurs folies gênantes. Maintenant, quand on déboule les escaliers avec un latté dans les mains et qu'on se relève rapidement, le pantalon détrempé, en faisant comme si rien d'anormal ne s'était passé (fait vécu par moi-même la semaine dernière), on se dit à soi-même: citron que ça aurait fait une bonne scène de Tout sur moi!

Je lévite

Avec la musique de Noël. Enfin, le 1er décembre est passé et on peut sans gêne ni honte réécouter en boucle nos classiques de Noël -un peu quétaines- comme Le sentier de neige des Classels, Les enfants oubliés de Patrick Norman ou Fa La La de Bundock. Vive la nostalgie.

Je l'évite

Les esprits chagrins qui s'acharnent sur la Guignolée des médias. Est-ce mieux de donner une fois par année ou de ne rien donner du tout? Et tous ces gens qui inondent Twitter et les blogues de commentaires fleuves antiguignolée, ne seraient-ils pas mieux de consacrer leur temps à servir des repas dans une soupe populaire plutôt que de rouspéter bien assis devant leur ordinateur? On jase là.