Bon, soyons honnête, il n'y a pas de scoop fracassant ici: après 37 ans à La Presse, Réjean Tremblay saute chez le concurrent, vire du rouge au bleu, change d'empire médiatique ou passe à l'Ouest comme son Sergei Koulikov dans Lance et compte 2, appelez ça comme vous le voulez.

En conférence de presse hier matin, le PDG de TVA, Pierre Dion, a claironné la bonne nouvelle et souhaité la bienvenue au journaliste vedette de 66 ans dans la grande famille Quebecor. Le chroniqueur sportif et auteur de téléséries (Scoop, Lance et compte, Casino) a paraphé un lucratif contrat multiplateforme avec Quebecor Média, pour qui il cisèlera et coproduira des séries dramatiques, en plus de collaborer ponctuellement à TVA Sports, TVA et LCN comme commentateur sportif.

Dans cette transaction, Réjean Tremblay a aussi bouclé une entente de trois ans pour signer des chroniques, trois ou quatre par semaine, à partir de mars 2012, dans Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec. Et pourquoi mars? Une clause de non-concurrence le lie à La Presse jusqu'à cette date. Voilà.

«Dans Le Journal de Montréal, je vais rester Réjean Tremblay. Je vais écrire ce que je pense. Je ne vais pas faire la révolution. Je m'en vais y tenir une bonne chronique», glisse-t-il entre deux interventions en direct dans les bulletins d'information de LCN.

Réjean Tremblay reconnaît que les «négociations ont été serrées», notamment pour casser son contrat avec la direction du quotidien que vous lisez présentement. «Ce n'est pas un divorce, car je n'ai jamais été malheureux à La Presse. Le grand patron Éric Trottier, je l'ai vu arriver à La Presse. Je les ai tous vus arriver à part peut-être Pierre Foglia, qui est une vieille affaire», rigole Réjean Tremblay.

Regrouper tous ses projets d'écriture chez Quebecor Média simplifiera la tâche au Bleuet. «Quebecor a un lien avec le Québec. C'est certain que c'est une entreprise qui a ses défauts, comme Gesca, mais le projet Éléphant, même si ce n'est pas rentable, Quebecor l'a fait. Pour Star Académie, Julie Snyder s'est arrangée pour que ça soit un gros plus pour la chanson d'expression française et le plus souvent, québécoise. Et ce que Quebecor fait avec le Colisée de Québec, on voit qu'ils ont le Québec à coeur», confie Réjean Tremblay.

Parlons-en de ce Colisée, un dossier crucial dans le rapatriement d'une équipe de la LNH dans la Vieille Capitale. «Le cas du Colisée de Québec, moi j'y étais favorable depuis 1994. Je n'ai pas changé d'idée parce que plusieurs de mes collègues à La Presse étaient contre. La Presse m'a toujours laissé écrire ce que je voulais», rappelle Réjean Tremblay.

Ses convictions souverainistes n'ont jamais été un obstacle pour sa carrière journalistique, rue Saint-Jacques. «La veille du référendum de 1995, j'ai écrit mon article avec Claude Masson (l'ancien vice-président et éditeur adjoint de La Presse) à côté de moi. Ça ne m'a pas empêché de dire ce que je voulais», se souvient-il.

Évidemment, le Groupe TVA mise énormément sur la présence de Réjean Tremblay pour le lancement de sa chaîne numérique TVA Sports, prévu à la rentrée. Dans ce secteur, le concurrent RDS, diffuseur exclusif des parties du Canadien de Montréal, en mène large. Et ce n'est pas avec des matches de L'Impact que TVA Sports ébranlera la domination de RDS. La présence de Réjean convaincra-t-elle les fefans de s'abonner à TVA Sports? On verra bien.

Côté télévision, le tournage de Lance et compte 8: La déchirure est terminé. Ne reste à TVA qu'à loger la série dans sa grille d'hiver 2012. Séries + a finalement choisi de ne pas acheter sa Princesse Yennenga (sur l'excision des femmes au Burkina Faso) et TVA réfléchit à l'avenir de cette minisérie. «France Lauzière (la responsable de la programmation) n'est pas encore convaincue que le public québécois est prêt pour cette série-là. Elle est tout écrite. Si personne ne veut faire Princesse Yennenga en long métrage ou en télésérie, ce sera mon premier vrai roman. C'est mon côté rose. Je veux absolument que cette histoire de femmes soit connue», dit Réjean Tremblay.

Quant au projet Les jeunes loups, une sorte de Scoop version 2011 développée par Radio-Canada et La Presse Télé, il a été transféré à TVA. Et La Presse Télé a été écarté du dossier, bien sûr. Imaginez la tête qu'aurait fait Pierre Karl Péladeau en voyant La Presse Télé au générique d'une série diffusée par TVA.

TVA a maintenant un premier droit de refus sur toutes les séries télé du populaire chroniqueur. À mots couverts, Réjean Tremblay raconte que ses relations avec la SRC étaient plutôt orageuses. «Je n'arrivais pas à me connecter, je ne comprenais pas les exigences de Radio-Canada, je ne comprenais pas où ils voulaient aller. À TVA, France Lauzière et Sylvie Gaudreault (anciennement aux dramatiques) m'ont beaucoup aidé comme auteur. J'ai trouvé des gens avec qui je suis profondément à l'aise de travailler», note-t-il.