Trois saisons et demie plus tard, Marc Labrèche présente ce soir (21 h) sa dernière émission originale de 3600 secondes d'extase à Radio-Canada. Il restera un collage des meilleurs moments de la saison à diffuser le jeudi 31 mars, mais après, adieu les caricatures de Céline et René, Julie Couillard, Denise Bombardier, Fabienne Larouche ou Monique Jérôme-Forget. C'est la fin. Définitive et irréversible.

Comme téléspectateur, bien sûr, c'est une bien triste nouvelle. Nos jeudis soir ne renfermeront plus de «Potin Plateau», de «Secret du métier» ou de Souris News. Fini les parodies délirantes, qui égratignaient autant Les lionnes, RDI Santé, Pour le plaisir, Penthouse 5-0, 19-2 et Trauma à Radio-Canada, que Le banquier, La promesse ou Occupation double à TVA que Dubois en réalité, Un souper presque parfait, De zéro à 1000 $ ou Atomes crochus sur V. Et bye-bye les magnifiques pubs de Jouviande, de Pur Noisetier ou du Dr Robidoux, ainsi que les personnages de Titine Potvin et Melville Boulard.

Contrairement à ce que l'on pourrait imaginer, Labrèche ne passait pas des heures à étudier les tics et les manies des gens qu'il pastichait. Souvent, il visionnait les DVD sur sa chaise de maquillage, quelques minutes avant de tourner le segment. «Ça se passait en mode survie. Des fois, 10 minutes avant l'enregistrement, je ne savais pas trop comment faire mon personnage. C'était très dernière minute», se souvient-il.

Pourtant, on jurerait que Labrèche se collait en permanence devant son téléviseur tellement il mettait le doigt sur des détails précis qui trahissaient leurs auteurs. Comme la gestuelle exagérée d'Éric Salvail, les intonations dans la voix de Patrice L'Ecuyer ou la façon de bouger de Julie Snyder en escarpins.

Marc Labrèche ne considère pas qu'il fait des imitations. «C'était beaucoup plus de l'observation, à la vitesse où se déroulaient les choses. C'était comme un polaroid de quelqu'un, qui grossissait tous ses tics», détaille Marc Labrèche.

Parmi toutes les vedettes qu'il a personnifiées depuis janvier 2008, aucune ne s'est plainte directement à lui d'avoir été injustement passée dans le tordeur. «Si ça blessait des gens, on ne nous le disait pas, ça ne se rendait pas jusqu'à nous. Je sais que Josélito Michaud avait peur que l'on rie des gens qui vivaient un deuil et qu'Érick Rémy n'aimait pas trop ça au début, mais c'est tout», confie Marc Labrèche.

Et jamais Radio-Canada ne lui a interdit de rire de l'une de ses têtes d'affiche. «On a toujours été très libres. On n'a pas du tout été censurés, même si des fois, ç'a grincé des dents», se souvient Marc Labrèche. Tous les mardis soir, quelqu'un du contentieux de la SRC visionnait l'épisode du jeudi, question de contrôler les dérapages. Il n'y en a jamais eu.

Après avoir créché pendant un an et demi dans le sous-sol d'un immeuble de la rue Sainte-Famille, dans le Mile-End, Marc Labrèche enregistrait cette saison ses 3600 secondes d'extase au café du Monument-National, boulevard Saint-Laurent, à Montréal.

Café qui s'est appelé le café Quebecor jusqu'à tout récemment, avant que l'entreprise de Pierre Karl Péladeau ne retire sa commandite. Mais comme le logo de Quebecor apparaissait toujours près du pupitre de Marc Labrèche, «nous l'avions habilement dissimulé par un épais rideau», remarque-t-il.

Le comédien Marc Labrèche ne s'en cache pas: il a eu un plaisir fou à bricoler ces 3600 secondes toutes les semaines. «C'était jouissif pour nous à faire. Mais l'émission avait atteint ses limites dans sa forme actuelle, même si je ne suis pas tanné de faire de la parodie et des sketches», indique-t-il, en rappelant qu'il n'avait jamais regretté d'avoir abandonné un projet.

Parmi les personnages qu'il a adorés, il cite Christian Bégin (et son vino) et Julie Couillard. Récemment, il a découvert Denis Lévesque et aurait bien aimé le refaire en ondes.

Avec ses 377 000 téléspectateurs en moyenne depuis janvier, 3600 secondes d'extase n'a jamais vraiment cassé la baraque. Moi, je la regardais souvent en pièces détachées, sketch par sketch, grâce à des liens publiés sur Twitter ou directement dans le site de Radio-Canada.

Qui prendra la relève de la parodie, une fois Marc Labrèche parti? Bonne question. C'est un créneau très mal occupé qui, pourtant, regorge de potentiel. Des volontaires?

Mince consolation: les meilleurs moments de 3600 secondes du 31 mars renfermeront des segments inédits. Pour l'occasion, Pierre Brassard, Paul Houde et André Sauvé s'assoiront avec Marc Labrèche, qui saluera «sa public» une dernière fois. Et ensuite? «Je m'ouvre à moi-même», lance Marc Labrèche en rigolant.

Maintenant, comme dirait Dona la culturiste, est-ce que vous allez vous ennuyer les amis? Ouuuiii!

Photo: Radio-Canada

Marc Labrèche anime 3600 secondes d'extase.