Fini la vente de concepts d'émissions à l'étranger: la boîte montréalaise Distraction Formats, fondée et dirigée par Michel Rodrigue, a discrètement fermé ses portes fin juin, emportée par une faillite qui a été chiffrée à 2,1 millions.

Avec ses antennes à Londres, Varsovie et Los Angeles, Distraction Formats a fait voyager la télé québécoise partout sur la planète depuis octobre 1997. C'est Michel Rodrigue, 57 ans, qui a négocié les droits d'adaptation d'Un gars, une fille dans plus de 30 pays. C'est aussi lui qui a importé le concept de Tout le monde en parle au Québec.

«Ce n'est pas un événement heureux qui est facile à digérer et à absorber», confie Michel Rodrigue, joint hier à Los Angeles où il habite depuis septembre avec sa femme Pauline Bohm, une cadre du conglomérat NBC-Universal.

Au moment de la prise de contrôle par le syndic, le 19 juin 2009, les actifs de Distraction Formats se limitaient à 5000 $, soit la valeur des meubles du bureau montréalais, rue Sherbrooke Ouest. Il restait 7200 $ dans les comptes bancaires de la société, alors que les dettes grimpaient à 2 076 000 $. Aucun créancier, dont les deux plus importants Avanti Ciné Vidéo et Thierry Ardisson, n'a donc pu récupérer ses sous.

Selon les documents judiciaires, Distraction Formats devait 484 291 $ à Ardisson & Lumières, la compagnie de l'animateur et producteur français, pour le paiement des licences d'adaptation de Tout le monde en parle au Québec. La créance d'Avanti a été évaluée à 209 714 $, essentiellement pour des droits d'exploitation d'Un gars, une fille dans le monde. «Cet argent-là est perdu», constate Luc Wiseman, grand patron d'Avanti, qui produit aussi La petite vie et Roxy.

Le cas de Tout le monde en parle a été plus délicat, selon nos sources. Au beau milieu de l'été, Radio-Canada a reçu un coup de fil de l'équipe d'Ardisson leur annonçant que les droits de Tout le monde en parle «n'étaient plus sécurisés» avec la disparition de Distraction Formats, ce qui mettait en péril la version québécoise.

Radio-Canada affirme ne pas avoir épongé la dette de près 500 000 $ de Distraction envers Thierry Ardisson. «Il y a eu un flottement. Nous avons dû renégocier directement avec Ardisson & Lumières et nous avons acheté les droits pour la saison 2009-2010», soutient la porte-parole de Radio-Canada, Nathalie Moreau. Aucune somme n'a cependant été précisée. La nouvelle entente entre la société d'État et Ardisson a été bouclée fin juillet.

Parmi les autres créanciers de Distraction, on retrouve les Productions Kenya de Chantal Lacroix (19 922 $), le réseau MTV (39 965 $), CBC Canada (67 884 $), Zone 3 (8889 $) et Locomotion (17 549 $).

Au début de l'été 2009, Michel Rodrigue espérait encaisser 1,6 million d'euros - soit environ 2,3 millions - que lui devaient trois boîtes spécialisées en audiovisuel (une polonaise, une ukrainienne et une américaine). «Mais ces trois compagnies avec qui nous faisions affaire ont toutes fait faillite. Nous étions fragiles», se désole l'homme d'affaires. Comme un jeu de dominos, les dettes non payées à Distraction l'ont poussée dans le trou financier.

Michel Rodrigue pratique un métier peu connu: courtier en format de télévision. En gros, il vend à des producteurs ou à des réseaux les recettes servant à fabriquer des quiz, des émissions de variétés ou des téléréalités. Ces formules guident et dirigent de façon très précise le casting des participants, les façons de tourner, la confection des budgets ou l'écriture des scénarios.

Un exemple concret du boulot de courtier en formats? Dans les années 90, Michel Rodrigue a mis la patte sur la bible française de confection de La fureur, l'a refilée à Guy Cloutier, qui l'a ensuite remaniée à la sauce québécoise avec beaucoup de succès. Voilà comment ça fonctionne.

En 2001, la Caisse de dépôt et placement du Québec détenait 27 % des actions de Distraction Formats, mais a retiré son investissement de près de 2 millions trois ans plus tard. Michel Rodrigue a lui-même racheté la participation de la Caisse. Dans ses meilleures années, Distraction brassait un chiffre d'affaires annuel d'environ 8 millions et employait une vingtaine de personnes. Le catalogue de formats de Distraction renfermait près de 80 titres au moment de la faillite. Le syndic qui a piloté le dossier n'a pas rappelé La Presse hier.

(Avec la collaboration de Francis Vailles)

Domination de Célébration 2010

Avec ses 1 675 000 téléspectateurs, l'émission-gala Célébration 2010, animée par Mitsou sur les ondes de TVA, a remporté la palme de l'émission la plus populaire dimanche soir. Tout de suite après, le concours Mannequins d'un jour - toujours à TVA, bien sûr - a intéressé 1 205 000 personnes. Chez Radio-Canada, Découverte a été l'émission dominicale numéro un avec ses 765 adeptes. Et Dieu créa Laflaque a récolté une audience de 601 000, tandis que l'édition spéciale de Tous pour un sur les 100 ans du Devoir a été suivie par 428 000 mordus.

 

Photo: Armand Trottier, archives La Presse

C'est Michel Rodrigue, 57 ans, qui a négocié les droits d'adaptation d'Un gars, une fille dans plus de 30 pays. C'est aussi lui qui a importé le concept de Tout le monde en parle au Québec.