Sérieusement, qu'est-ce que nos grands réseaux de télé attendent pour offrir leurs émissions ailleurs qu'au petit écran ou sur leur site web? Parfois, on a la désagréable impression que les producteurs et diffuseurs québécois poireautent bêtement sur la plage tandis que leurs collègues américains expérimentent avec la vague numérique depuis longtemps. Très longtemps.

Fouinez dans le iTunes Store. On n'y retrouve aucune série télé d'ici. Et zéro titre en français. Le Québec, qui bricole pourtant de la fiction haut de gamme, y brille par absence. C'est désolant.

Par contre, si vous avez loupé Mad Men, Gossip Girl ou Glee, vous pouvez les télécharger de la boutique d'Apple le lendemain de leur diffusion. Je ne sais pas pour vous, mais je paierais volontiers un huard (ou deux) pour un épisode d'Aveux, question d'éviter toutes les aliénantes pubs de McCrêpes qui entourent les segments de la série sur le site web de Radio-Canada. Hélas, c'est impossible.

Il faut se contenter de la télé de rattrapage, le bon vieux «catch up», où nos séries chouchous sont saucissonnées en tranches de dix minutes et présentées dans une fenêtre minuscule. Tout ça fonctionne bien, évidemment, si la haute vitesse propulse votre ordinateur. Sinon, c'est.. ça... qui... vous... attend. Agréable, non?

Télé-Québec, V et la SRC proposent à leurs téléspectateurs ce service gratuit de dépannage télévisuel, très pratique, il faut l'admettre. Mais pas TVA. Pouvez-vous croire que le réseau le plus regardé de la province, et dont le propriétaire Quebecor possède aussi le câblodistributeur Vidéotron, traîne la patte de façon aussi gênante? Vraiment, c'est incompréhensible en presque 2010, une période charnière où l'érosion des audiences affaiblit toutes les antennes et où la fidélisation des téléspectateurs est capitale.

Vous ratez Yamaska, Occupation double ou Destinées, vous êtes cuits, mes amis. Pas moyen de se rattraper en fouillant sur le tva.canoe.ca, qui n'héberge que des extraits des épisodes à venir. Reste Illico, pour les clients de Vidéotron seulement.

Alors que ces dossiers urgents stagnent chez nous, ça bouge rapidement aux États-Unis, Dieu merci. Yahoo! permet maintenant aux utilisateurs du TiVo - un génial enregistreur numérique personnel - de programmer leur bidule à distance. Quelques heures à peine après leur diffusion, le plus grand câblodistributeur des États-Unis, Comcast, liquidera à 99 cents des épisodes de séries du réseau CBS comme How I Met Your Mother et CSI. Beau croc-en-jambe à Apple, qui contrôle une bonne partie de ce marché avec son populaire iTunes Store.

NBC a également bouclé une entente similaire, selon BusinessWeek, qui parle d'une véritable «révolution médiatique» où l'ordi entre en collision avec le bon vieux téléviseur. Car l'avenir, c'est la consommation à la carte, à notre rythme. Les grandes chaînes américaines ont finalement cédé en acceptant d'écouler leurs «beaux programmes» à la pièce. Mais est-ce un modèle économique viable? Personne ne le sait encore.

Chose certaine, rapporte BusinessWeek, la vente de chapitres de Desperate Housewives sur le iTunes Store à 1,99$ a été profitable pour ABC. En anticipant une baisse de 20% de l'audience du feuilleton en heure de grande écoute, et une chute similaire des revenus publicitaires, ABC engrangerait 1,8 million de plus par épisode grâce aux achats effectués en ligne.

Bien sûr, cet attrayant pouvoir de rentabilité n'appartient qu'aux émissions canons comme Desperate Housewives, The Mentalist ou NCIS. Malheureusement, ces grands succès ne représentent que la minorité de toute l'offre télévisuelle.

N'empêche. Il est minuit moins une pour l'industrie du petit écran. Plus les réseaux québécois se morfondent les bras croisés, plus ils encouragent le piratage. Pire encore: ils favorisent l'abandon de produits fabriqués au Québec au profit de séries américaines, dix fois plus accessibles en pianotant sur un clavier. Et ça, c'est pas mal plus fâchant que de ne pas pouvoir rattraper un épisode du Banquier.

Je lévite

Avec la troisième saison de Dexter en DVD. Voilà une série qui vieillit bien. Et jamais un meurtrier en série, campé avec beaucoup de finesse par Michael C. Hall, David dans Six pieds sous terre, ne nous aura paru aussi sympathique. Trouvez l'erreur.

Je l'évite

Paranormal Activity. Il ne faut pas se leurrer. Un film d'épouvante tourné avec un budget dérisoire de 11 000$, ça a) paraît extrêmement mal sur un immense écran et b) ça reste un film mineur à l'intrigue mince comme une planche de ouija. Rien à voir avec The Blair Witch Project.