Les analystes de la télé américaine ont tous échappé leur télécommande en même temps (et ramassé les piles AA par la suite). Quoi? NCIS trône présentement en tête du palmarès des émissions les plus regardées, toutes chaînes confondues? Non, impossible.

Pourtant, oui. À sa septième saison à l'antenne, la série de CBS - et ses 21,4 millions de téléspectateurs - a devancé des poids lourds du petit écran comme Dancing with the Stars, CSI, The Mentalist, Grey's Anatomy, House et Desperate Housewives. Même le football du dimanche soir à NBC n'a pas résisté à NCIS, un acronyme de Naval Criminal Investigative Service. Pour une série conventionnelle et classique qui n'intéresse aucun chroniqueur télé et qui ne bénéficie donc d'aucun buzz médiatique comparable à celui de Glee, Mad Men ou 30 Rock, c'est tout un tour de force.

 

Car NCIS, que la chaîne Historia diffuse en rafale chez nous, ne réinvente absolument rien: des agents spéciaux enquêtent sur des crimes flottant autour de la marine américaine (insérer ici un léger son de bâillement). Pas de grosses vedettes (Mark Harmon, quelqu'un?), pas d'artifices ni de procédés flamboyants, mais des épisodes bouclés en 60 minutes avec un début, un milieu et une fin. Bref, c'est le genre de truc auquel un téléspectateur se raccroche sans difficulté, rate quelques épisodes, puis revient sans se sentir perdu ou embrouillé dans l'intrigue.

Encore plus étonnant: le dérivé de NCIS, NCIS: Los Angeles, qui met en vedette Chris O'Donnell et LL Cool J, est la nouveauté la plus regardée de l'automne avec ses 17,4 millions de fidèles. Et dans le dernier classement publié par Entertainment Weekly, NCIS: Los Angeles figure au troisième rang des émissions les plus populaires derrière... NCIS. Sans vouloir compliquer le tableau, sachez que la série NCIS est elle-même un produit dérivé de Jag. Fin de la parenthèse.

Selon le magazine Advertising Age, Wal-Mart, Home Depot et le médicament Lipitor de Pfizer raffolent de NCIS, qui possède une qualité très prisée par les annonceurs, soit celle de garantir de vastes audiences semaine après semaine. Tout cela, en dépit de la récession, de l'exode vers les canaux spécialisés, de l'utilisation grandissante des enregistreurs numériques, des ventes de DVD qui explosent, etc.

Cette tendance lourde, les grands réseaux comme CBS, NBC ou ABC l'ont bien cernée en jetant au panier des trucs plus flyés comme Pushing Daisies et en déclinant quasiment à l'infini des marques familières comme CSI, Law&Order et Criminal Minds. Ces téléspectateurs plus conservateurs, constamment bousculés par l'arrivée d'un nouveau gadget télé ou d'une 614e chaîne satellite, adorent repérer des personnages connus dans leur écran. Ils aiment se réfugier dans des environnements télévisuels qu'ils connaissent bien, sorte de point d'ancrage rassurant dans un monde qui tourne à une vitesse folle.

Chez nous, Lance et compte: le grand duel, dont les cotes d'écoute ne cessent de gonfler depuis sa mise en ondes, incarne parfaitement ce phénomène de télé-réconfort. Et il n'y a rien de péjoratif là-dedans. Au contraire.

Nous connaissons les Suzie, Marc, Pierre, Gilles et Lulu depuis plus de 20 ans. Nous les adorons et en ouvrant notre téléviseur, tous les lundis à 21h, nous prenons de leurs nouvelles, comme s'il s'agissait de vieilles connaissances. Et pas besoin d'une longue mise en contexte, car leur histoire fait un peu partie de la nôtre.

Qu'est-ce que ça dit sur notre comportement de téléspectateur? Très simple. Oui, on peut raffoler de la cuisine audacieuse, savoureuse et complexe d'une série comme Aveux. Mais parfois, dans notre régime télévisuel, une bonne lasagne maison ou une brûlante soupe à l'oignon, ça remplit parfaitement notre bedon.

Je lévite

Avec Man on the Moon de Kid Cudi. Si vous aimez K-OS et le hip-hop mélodique et avant-gardiste, vous adorerez ce Kid Cudi, jeune protégé de Kanye West.

Je l'évite

Les pubs de Brand Power. Qui réalise ces affreuses réclames télé, sur fond de musique de téléjournal des années 80? Le stagiaire d'Entre chien et loup? Ou un candidat rejeté de VJ recherché?