Chaque fois qu'un animateur radio raconte les détails de son congédiement, moi, ça me sidère, ça me scie les jambes. Non, pas besoin de t'assoir. T'es dehors. T'as cinq minutes pour vider ton bureau. Ah oui, n'oublie pas de remettre ta carte d'accès en sortant.

Voici une autre de ces histoires de renvoi. Celui d'Annie Lessard, 43 ans, dont la jolie voix égaie les ondes de Rock-Détente depuis 19 ans. Jeudi dernier, un courriel suspect a clignoté dans sa boîte de réception. Annie, passe me voir avant d'entrer en ondes. Faut qu'on se parle. Uh-oh. Entendez-vous la sirène d'alarme qui hurle derrière?

 

Cette journée-là, après 19 ans de loyaux services, Annie Lessard n'a même pas pu saluer une dernière fois ses auditeurs d'Annie le soir, Rock-Détente ne lui accordant pas cette ultime «faveur» du condamné. T'es dehors, ma belle. Décision «d'affaires». Du balai!

«Mon courriel avait déjà été désactivé et ma carte d'accès, démagnétisée, se souvient Annie Lessard. Pourtant, mon émission avait gagné des parts de marché. Et mes patrons m'ont toujours dit qu'ils aimaient mon travail.»

Annie Lessard, embauchée par Rock-Détente en octobre 1990, insiste: «Je ne veux pas jouer les victimes. En 20 ans, j'ai vu plusieurs de mes collègues partir de la même façon. En acceptant de travailler en radio, tu acceptes tout ce qui vient avec. Je l'ai choisi ce métier-là. C'est comme ça. Tout se déroule en quatre minutes. C'est toujours arbitraire. Et ce n'est jamais très élégant.»

En effet. Plus barbare comme méthode, tu installes une guillotine dans la cafétéria pour l'exécution publique de tes employés. Clac! «Nous effectuons un changement de programmation en soirée et ce mandat ne correspond pas à la personnalité d'Annie. C'est clair que c'est rapide comme décision. Et ç'aurait été humainement déplacé de lui demander d'aller en ondes tout de suite après avoir encaissé une nouvelle comme ça», nuance la directrice des programmes de Rock-Détente, Johanne Cloutier.

Selon nos infos, le groupe propriétaire du 107,3 FM, Astral Média, trouverait que ses gros canons - les Jean-Michel Anctil, Marina Orsini, Lise Dion, Chantal Lacroix et André Robitaille - lui coûtent très cher pour ce qu'ils rapportent en recettes publicitaires.

«Pour la portée, nous sommes la deuxième station à Montréal. Alors oui, nous mettons nos sous dans les personnalités d'antenne et le marketing», ajoute Johanne Cloutier.

Difficile de survivre dans le cruel monde de la radio commerciale montréalaise, paradis des chaises musicales et du siège éjectable. Nous traversons présentement la période cruciale où les directeurs de stations renouvellent (ou pas) les contrats de leurs vedettes du microphone.

Déjà, beaucoup de brasse-camarade dans la plage du retour à la maison. Après s'être greffé à l'émission matinale C't'encore drôle, après avoir copiloté avec Isabelle Racicot sur l'heure du lunch, Éric Salvail emménage avec le duo humoristique Dominic et Martin, toujours sur les ondes d'Énergie.

Éric Salvail remplacera André Ducharme, qui a lui-même succédé à Pierre Pagé, le grand timonier de C't'encore drôle, qui a animé, pendant six mois, l'émission du matin ET celle de fin d'après-midi. Un horaire de travail brisé, comme celui des camionneurs.

Toujours au retour à la maison, ça brasse aussi chez le compétiteur CKOI, qui perd ses Justiciers masqués (Sébastien Trudel et Marc-Antoine Audette) le 19 juin. Leur coanimatrice aux Cerveaux de l'info, Julie Boulanger, quitte aussi la station qui diffuse «plus de hits, plus de fun», son contrat n'ayant pas été renouvelé.

«Pour le retour à la maison, CKMF était devant nous. Avec notre nouvelle émission d'humour et d'humeur, nous croyons pouvoir devancer notre compétition», signale le vice-président de Corus Québec, Mario Cecchini. À Montréal, Corus exploite CKOI, le 98,5 FM, CKAC 730, Q92 et Info 690.

Selon les chiffres fournis par CKOI, Les cerveaux de l'info rejoignait un auditeur de 28 ans, en moyenne. «Nous voulons vieillir l'auditoire, pour rejoindre celui de CKOI, qui tourne autour de 35 ans», note Mario Cecchini.

Le midi, créneau où Véronique Cloutier domine sur Rythme-FM, Nadia Bilodeau d'Énergie - une des rares animatrices de radio de métier - reprend le flambeau d'Isabelle Racicot, qui ferme son micro pour se consacrer à ses projets télé. Personne chez Énergie n'a rappelé au moment d'écrire ces lignes hier.

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