Je sais que ça vous fait mal. Je sais aussi qu'il est difficile, voire impossible, pour un fan du Canadien de reconnaître ne serait-ce que le début du commencement d'une qualité chez les Bruins de Boston.

Mais au risque de souffrir, admettez, fans déçus du Tricolore, que les Bruins sont sensationnels depuis le début de la grande finale.

Qu'ils le sont en fait depuis les derniers instants de la troisième période du septième match de la série qui les opposait aux Maple Leafs de Toronto en première ronde. Derniers instants qui leur ont permis de combler un recul de deux buts pour finalement passer aux choses sérieuses après qu'ils eurent arraché la victoire en prolongation.

Le mot «sensationnel» vous donne la nausée et vous couvre d'urticaire?

Peut-on s'entendre alors sur le fait qu'ils sont très bons?

Même pas!

Cette haine teintée de jalousie ne vous mènera nulle part.

Elle vous prive même d'apprécier à sa juste valeur le travail d'un club magistralement dirigé par Claude Julien qui, après avoir été incapable de tirer le meilleur de sa formation au cours de la saison écourtée, obtient maintenant de ses joueurs le genre de performances nécessaires pour se rendre à la Coupe Stanley.

Difficile d'expliquer pareille transformation. Une défaite en première ronde aurait sans l'ombre d'un doute mené au congédiement de Julien. Et le voici ce matin à deux victoires de la Coupe Stanley une deuxième fois en trois ans.

Tout un renversement de situation.

Un renversement similaire - il deviendra identique si les Bruins ne gaspillent pas leur avance de 2-1 en grande finale - à celui de 2011 lorsque, après être passés à un poteau près d'être éliminés par le Canadien en première ronde, les Bruins et Julien, qui aurait sans l'ombre d'un doute été congédié dès le lendemain, ont finalement battu les Canucks de Vancouver en sept matchs pour soulever le précieux trophée.

Hawks mystifiés

Il serait aussi précipité qu'imprudent de croire que les Blackhawks de Chicago imiteront les Penguins de Pittsburgh. Qu'après avoir remporté la première rencontre de la finale, Jonathan Toews et les Hawks perdront quatre matchs de suite aux mains des «Big Bad Bruins» comme l'ont fait Crosby, Malkin et les autres Penguins.

Mais si les Bruins jouent comme ils l'ont fait lundi, mystifiant bien davantage les Hawks que ne laisse croire la marque finale de 2-0, c'est bien ce qui pourrait arriver.

Des cercles de mises en jeu où Patrice Bergeron (86%) et ses coéquipiers (71% d'efficacité globale) ont été impériaux le long des bandes, dans les batailles rangées devant le filet, sur les transitions, la qualité des passes, la quantité de tirs et de tirs bloqués (17 contre 7), les Bruins ont dominé les Hawks dans toutes les facettes du jeu.

Seul avantage pour Chicago, et c'est une bien mince consolation, le gardien Corey Crawford a été plus brillant dans la défaite que Tuukka Rask dans la victoire. Mais Rask n'a pas eu à être brillant, faisant le premier arrêt et laissant à ses coéquipiers le soin de s'occuper du reste.

C'était beau à voir. Si vous êtes partisan des Bruins, bien sûr. Mais ce l'était aussi pour l'amateur de hockey qui n'est pas aveuglé par une haine viscérale à l'endroit des Oursons.

Mais attention!

Les Hawks se sont retrouvés dans un merdier semblable en deuxième ronde des séries. Il ne faudrait pas l'oublier. Après avoir infligé un cuisant revers aux Red Wings, Chicago a vu Detroit gagner les trois matchs suivants.

Faisant face à l'élimination, les Hawks ont été fouettés. À une victoire de passer en finale de l'Ouest, les Wings ont figé.

Unis dans la victoire comme dans la défaite, regroupés au sein d'une meute menée par différents leaders au lieu d'être minée par des luttes de pouvoir, les Bruins ne figeront pas s'ils gagnent ce soir.

D'où l'importance pour les Hawks de vite niveler les chances afin de garder une main sur la Coupe au lieu de la voir lentement, mais sûrement, leur glisser entre les doigts.

Mirage ou réalité?

Le fait que les Bruins semblent souvent perdre leurs moyens lorsqu'ils croisent le Tricolore pourrait expliquer l'impression fortement ancrée dans la tête des fans du Canadien que les deux équipes sont de forces égales. Que le Tricolore a même une longueur d'avance sur ses rivaux de division.

Mirage ou réalité?

À regarder les Bruins aller depuis la frayeur qui les a secoués en première ronde, il faudrait souffrir de partisanerie aveugle pour vraiment croire que le Canadien a les effectifs pour rivaliser à armes égales avec les Bruins.

Du moins pour l'instant.

Et c'est sans doute ce qui fait le plus mal.

Mais consolez-vous: même les puissants Penguins n'ont pu résister aux plus puissants Bruins. Et voilà que ça semble être au tour des Blackhawks d'y goûter.