Avec trois matchs à jouer en saison régulière et à une semaine du début des séries, le Canadien est de retour à la case départ. Hier, sur la galerie de presse du Complexe sportif Bell, à Brossard, on se serait cru le 19 janvier, au premier jour du camp d'entraînement.

Il manquait les cinq rangées de partisans massés le long des baies vitrées. C'est vrai. Il manquait aussi l'effervescence de la fin du lock-out et du début de la saison écourtée qui s'en venait.

Mais sur la glace, c'était pareil.

Comme il l'avait fait lors de son tout premier entraînement, Michel Therrien expliquait ses stratégies, avant de regarder ses joueurs les mettre en application, puis de les corriger et de les sommer à recommencer.

Voici comment vous devez faire les couvertures en zone défensive. Voici comment vous devez vous appuyer dans les coins de patinoire pour gagner des batailles. Voici comment vous devez venir en aide aux défenseurs et protéger le devant du filet. Voici comment vous devez bloquer des tirs ou, à tout le moins, compliquer le travail des adversaires en vous sacrifiant devant eux. Voici ce qu'on attend de vous dans cette situation-ci, dans cette situation-là...

Un vrai retour à la base.

Étant donné la façon dont ses joueurs ont perdu samedi contre Washington et la façon dont son équipe se comporte depuis deux semaines, Michel Therrien n'avait pas le choix de sortir le tableau et les cônes. Et je ne parle pas ici de ses joueurs lents et inefficaces des derniers matchs...

Rappel à l'ordre

Est-ce inquiétant de voir le Canadien revenir à la base comme ça si tard dans la saison?

Un peu, oui.

Cela démontre en effet que les joueurs ont oublié ce qu'ils faisaient de bien pour gagner dans un passé pourtant pas si lointain.

Sauf que les ennuis du Canadien dépassent les X, les O et les traits noirs sur le tableau. Ils dépassent la compréhension ou l'incompréhension des systèmes et des plans de match. Le vrai problème du Canadien est que les joueurs de cette équipe se sont mis à se croire meilleurs qu'ils ne le sont en vérité.

Exception faite de P.K. Subban, dans une classe à part en ce qui a trait au talent, de Carey Price, qui occupe lui aussi une place de choix dans cette catégorie même s'il est très loin d'en faire la preuve depuis deux semaines, et d'Alex Galchenyuk, qui nous éblouira tous et toutes dans les années à venir bien plus encore qu'il ne le fait déjà, le reste de cette équipe doit travailler à fond la caisse pour rivaliser et s'offrir des chances raisonnables de victoire.

Josh Gorges, qui en arrache comme tous ses coéquipiers par les temps qui courent, a très bien résumé mon évaluation du Canadien en disant, après le revers de samedi, que le Tricolore avait besoin de 100% des efforts de 95% des joueurs en uniforme pour espérer l'emporter.

Pas besoin d'être candidat au Nobel de mathématiques pour comprendre pourquoi le Canadien a perdu samedi. Pourquoi il perd plus qu'il ne gagne depuis deux semaines. Et pourquoi il sortira rapidement des séries si les joueurs gardent la même formule perdante des dernières parties.

Formation chambardée

En plus de revenir aux bases du hockey, Michel Therrien a fait ce que tout entraîneur doit faire quand son équipe stagne comme le Canadien stagne depuis deux semaines: chambarder ses trios.

Gallagher revient avec Desharnais et Pacioretty. Il serait temps que Desharnais et Pacioretty se «déniaisent», au lieu de laisser le jeune faire tout le travail. Ce duo est extrêmement décevant depuis un mois. Pacioretty ne patine plus, il ne fonce plus au filet. Desharnais n'affiche plus la hargne qui lui a permis de se faire une place de choix dans le vestiaire du Canadien.

Rene Bourque, aussi absent que lorsque son nom figurait dans la liste des joueurs blessés, retrouvera Plekanec et Gionta. Habituellement fiables et travaillants, le capitaine et le meilleur centre du Canadien ne sont plus l'ombre d'eux-mêmes. Ils devront déployer beaucoup plus d'énergie s'ils veulent relancer Bourque, et non seulement le traîner comme un boulet.

Michael Ryder sera muté à la droite de Lars Eller et d'Alex Galchenyuk. On sait à quoi s'attendre avec les deux jeunes. Avec Ryder aussi. S'il ne marque pas, il ne fait pas grand-chose de bon. Par ailleurs, où sont passés tous ceux qui réclamaient à grands cris que Marc Bergevin lui offre un riche contrat à long terme?

Parce que Brandon Prust peine à patiner en raison d'un des nombreux bobos qui le minent, Mike Blunden occupait le flanc droit du quatrième trio avec Moen et Halpern. Prust partageait le travail avec Gabriel Dumont et Colby Armstrong au sein du trio de réserve.

Quoi? Moen est encore de la formation?

Moen n'est pas bon cette année. Il est même mauvais. Et je partage l'avis de ceux et celles qui dénoncent le fait qu'en acceptant des demi-mesures de la part de son vétéran, Therrien affiche une politique du deux poids, deux mesures, qui ne respecte pas la philosophie du «pas d'excuse» adoptée le premier jour de la saison. Remarquez que cela pourrait changer dès demain au New Jersey. On verra.

Ce n'est toutefois pas seulement en envoyant Moen sécher sur la galerie de presse pour le remplacer par Colby Armstrong ou même par le valeureux Gabriel Dumont que le Canadien sortira de sa torpeur.

Pour se remettre à gagner, le Canadien a besoin de l'éveil de tous ses attaquants, à commencer par ceux des trois premiers trios et des mercenaires envoyés en avantage numérique.

Il aura également besoin de tous ses défenseurs et de son gardien.

Dans un geste visant à relancer un vétéran épuisé, Michel Therrien a confié Andrei Markov à P.K. Subban. L'élève saura-t-il relancer le maître? Gorges et Diaz, comme Bouillon et Weber, viendront en appui.

Et le gardien?

Avec trois matchs à faire en saison régulière et à une semaine des séries, il n'est plus possible de jongler avec le gardien comme on jongle avec les attaquants, les défenseurs, les stratégies. Michel Therrien n'a plus le choix: il doit y aller avec Carey Price jusqu'au bout. Peu importe la longueur du bout...