La vie était belle hier matin. Il faisait beau, il faisait doux, c'était vendredi.

Le dédale administratif qui m'empêche de confirmer une nouvelle sur laquelle je travaille depuis trop longtemps m'exaspérait. Mais bon! C'était vendredi, il faisait beau, il faisait doux, alors pourquoi diable se fâcher.

Surtout que j'avais un fun noir sur Twitter avec la sollicitation de gazouillis visant à trouver le nom que devrait porter le club-école du Canadien si jamais la Place Bell est construite à Laval et que l'équipe y déménage.

Des suggestions suaves sont tombées du ciel: au milieu des «Corrompus», des «Coffrets», des «Magouilleurs», du «Cash», de «la Clique» ou des «Incorruptibles» qu'a suggérés un adepte de la preuve par l'absurde, deux amis gazouilleurs ont soumis avec beaucoup d'à-propos «l'UPAC», un acronyme qui restera longtemps collé à Laval et à sa réputation.

J'aurais volontiers voté pour «l'UPAC» n'eût été ma suggestion personnelle.

Parce que son club-école évoluera peut-être un jour sur la rive nord de la rivière des Prairies et parce que Québecor veut ramener la LNH à Québec, dans le colisée Vidéotron, je proposerais au Canadien d'appeler son club-école les Nordiques, histoire de faire un pied de nez à son grand rival.

Ne m'en voulez pas. C'était vendredi. Il faisait beau, il faisait doux. Il faisait bon s'amuser autour d'une équipe de hockey qui n'existe pas encore au lieu de perdre son temps avec le conflit qui paralyse la LNH et les 30 équipes qui n'existent plus depuis 91 jours déjà. Donc trois mois.

Pas encore!

Puis, d'un coup, plus rien n'était drôle.

C'était toujours vendredi, il faisait toujours beau, il faisait toujours doux. Mais soudainement la vie n'était plus belle. Plus belle du tout.

Un malade armé jusqu'aux dents venait d'ouvrir le feu aux États-Unis, faisant plusieurs victimes, avant de retourner l'arme contre lui.

Encore? Oui, encore.

Ces tueries se répètent à un rythme tellement effarant que j'attendais les détails d'une oreille presque distraite en travaillant sur autre chose.

Ce serait quoi cette fois?

Encore un mari imbécile et jaloux; un employé perturbé ayant ouvert le feu sur des collègues de travail qui lui faisaient la vie dure depuis trop longtemps; un ado au cerveau brûlé par la drogue ou les jeux vidéo ayant déclaré la guerre à des confrères de classe qui riaient de son acné, de son embonpoint ou de ses mauvaises notes.

Non! Ce malade venait de faire irruption dans une école primaire. Une petite école d'une petite ville tranquille du Connecticut. Une école qui ne comptait que des classes de la maternelle à la 4e année. Des classes où se trouvaient des enfants âgés de 5 à 10 ans.

Dès ce moment, le sport ne comptait plus.

Mes excuses à André Tourigny, que j'ai joint à Calgary hier matin. Je voulais lui rendre hommage à l'aube de son deuxième Championnat mondial junior à titre d'entraîneur adjoint. Je voulais rendre hommage à son partenaire Mario Duhamel ainsi qu'aux cinq Québécois qui se sont taillé une place au sein d'Équipe Canada junior.

Ça viendra. Lundi peut-être. Sinon au cours de la semaine prochaine. Mais ce matin, le moment me semblait mal choisi.

Honni soit le lock-out

Le lock-out qui paralyse la LNH est aussi passé deuxième. Lointain deuxième.

Il faisait bon voir les commentaires liés à la poursuite judiciaire en déni d'intérêt déposée par l'Association des joueurs afin de mettre de la pression sur Gary Bettman et la LNH être dénoncés par des partisans.

Remarquez que le même traitement a été réservé à la contre-attaque de la LNH qui s'adresse elle aussi aux tribunaux pour mettre en échec la poursuite intentée par les joueurs.

Sur les médias sociaux, on parlait bien plus des victimes, de la nécessité de contrôler les armes, du point de presse très émotif du président américain Barak Obama, qui a refoulé des larmes et sa rage en condamnant cette folie meurtrière et en promettant une action gouvernementale, que de hockey. Que du lock-out.

Il faudra combien d'autres tueries du genre pour qu'on décide sérieusement de remettre en question le libre accès aux armes? À toutes les armes. À une arme comme l'une de celles utilisées dans cette petite école de Newtown qui tire 60 balles chaque fois que celui qui la manipule appuie sur la gâchette.

On ne parle pas ici d'une arme pour aller à la chasse à la perdrix, voire au petit ou au gros gibier. On parle d'armement de guerre.

Il me semble que ce ne serait pas trop demander de carrément interdire la vente ou la circulation de ces armes.

Devant les tribunaux

Parce qu'ils sont incapables de faire un vainqueur, que ce soit face à face ou par l'entremise de médiateurs, la LNH et ses joueurs qui sont en lock-out se battront maintenant devant les tribunaux.

Que veulent dire ces poursuites intentées hier?

Les joueurs voteront d'ici à vendredi prochain pour donner leur aval à la demande de leur syndicat de se saborder. Si les deux tiers des joueurs votent en faveur de cette procédure, l'Association des joueurs pourra brandir cette menace qu'elle pourrait mettre en application jusqu'au 2 janvier.

À quoi cela servirait-il? À mettre de la pression sur la LNH.

Car si l'Association devait ensuite aller de l'avant avec la «décertification», cette procédure entraînerait des délais importants et des coûts plus grands encore. Un processus qui entraînerait sans l'ombre d'un doute l'annulation de la saison.

Si la Ligue tient à sauver ce qui reste de la saison, elle pliera pour régler le conflit au lieu de se retrouver devant les tribunaux. C'est le pari que l'Association fait. Un pari qui a servi la cause des joueurs de la NBA et de la NFL alors que la seule menace d'une telle procédure a fait débloquer leurs dernières négociations.

Si la Ligue est prête à perdre l'année, on fermera les livres une fois pour toutes.

Avant d'arriver là, la Ligue répliquera.

Elle l'a d'ailleurs fait dès hier. Sur deux fronts. Elle s'est adressée à la Cour fédérale pour valider le lock-out décrété le 15 septembre dernier. Elle s'est aussi adressée au bureau national des relations de travail pour invalider la procédure que pourraient lancer les joueurs.

Où tout ça nous mènera-t-il? Je ne sais pas. Je sais toutefois que si tout ça se retrouve devant les tribunaux, il se gaspillera encore beaucoup de temps et d'argent. Comme si la Ligue et l'Association des joueurs n'avaient pas déjà assez gaspillé de temps et d'argent.

Mais bon! Ce matin, je m'en sacre complètement.