Je suis peut-être trop optimiste, trop idéaliste ou simplement bien trop naïf, mais je crois vraiment qu'il est encore possible de sauver ce qui reste de la saison 2012-2013 dans la LNH.

Il commence à se faire tard pour le volet 2012. J'en conviens. Mais je m'accroche toujours aux chances d'organiser une saison de 56 rencontres qui débuterait tôt en janvier.

Pourquoi m'accrocher ainsi? Sais pas!

Surtout que le narcissisme et l'appât démesuré du gain des joueurs, des propriétaires, de Donald Fehr et de Gary Bettman devraient me pousser à joindre le mouvement de décrochage qui prend de l'ampleur autour de la planète hockey.

Car, au-delà des partisans optimistes, idéalistes ou naïfs, réclamant le retour de leurs clubs favoris sur la glace, plusieurs cyniques ou réalistes sont maintenant prêts à faire un trait sur la saison. À fermer les livres. À se revoir l'an prochain, ou dans deux ans, si c'est ce qu'il faut pour obtenir la sainte paix sur le plan des relations de travail, pour longtemps.

«Qu'ils jouent au fou entre eux, mais qu'ils cessent de jouer au fou avec nous», sèment ces cyniques à tout vent sur les médias sociaux.

Neige à l'écran

Ces cyniques comptent sur des alliés silencieux.

Qui sont-ils? Les diffuseurs liés par contrat à la LNH.

Vous êtes surpris? Vous ne devriez pas.

Contrairement à ce que plusieurs croient, RDS, TSN, Sportsnet et les autres diffuseurs présents sur le câble sont loin de crier famine en l'absence de hockey de la LNH.

Vrai qu'ils ont des centaines d'heures de diffusion à combler en raison du conflit. Vrai qu'ils doivent replonger dans leur banque de souvenirs et de nostalgie. Vrai qu'ils perdent des revenus importants associés aux cartes de tarifs des messages publicitaires diffusés dans le cadre du hockey. Du vrai hockey.

Mais ces rediffusions ne coûtent rien, ou presque, à produire. Inversement, un match du Canadien au Centre Bell coûte la peau des fesses en frais de production. Des frais qui sont plus imposants encore lorsque le Tricolore est sur la route.

Les matchs du Canadien à RDS, les matchs d'un peu partout dans la LNH à TSN et Sportsnet rapportent énormément en visibilité, en cotes d'écoute. Mais en argent sonnant, ils couvrent leurs frais.

Ce qui est payant pour les réseaux câblés, c'est la part qu'ils reçoivent sur les paiements mensuels des abonnés. Des parts qu'ils encaissent même s'il n'y a pas de hockey, parce que personne ne s'est désabonné en dépit du lock-out qui paralyse la LNH.

Cette réalité est différente pour la CBC, qui est tributaire de la publicité diffusée à Hockey Night in Canada - et des subventions gouvernementales - pour faire contrepoids à ses coûts de production.

Annulation très payante

Ça ne veut pas dire que RDS, TSN, Sportsnet ou la CBC sont morts de rire en l'absence de hockey. Ça non!

Mais en ce 8 décembre, ces diffuseurs préféreraient que la saison 2012-2013 soit complètement annulée plutôt que d'avoir à relancer la machine en janvier.

Pourquoi?

Parce qu'il sera difficile de profiter du retour du hockey, si retour il y a, pour convaincre des commanditaires de payer le gros prix pour s'associer au Canadien, aux Leafs, aux Sénateurs et aux 27 autres clubs de la LNH. Plusieurs de ces commanditaires et annonceurs potentiels sont échaudés et/ou ont déjà engagé leurs dollars publicitaires sur d'autres fronts pour l'hiver et le printemps.

Mais il y a plus.

Disons que RDS verse 25 millions pour les droits de diffusions du Canadien et de la LNH. Disons que TSN paie 50 millionsà la LNH, que Sportsnet débourse autour du même montant et que la CBC verse environ 100 millions pour Hockey Night in Canada.

Si le hockey reprend le 1er janvier, ces diffuseurs verseront à la Ligue une somme proportionnelle au nombre de matchs qu'ils diffuseront au cours de la saison écourtée.

Si la saison est annulée, ces diffuseurs verront l'année perdue ajoutée à la fin de leur contrat.

En quoi ce report est-il intéressant?

D'abord, parce qu'il assurera ces diffuseurs d'une saison normale au cours de laquelle ils pourront maximiser leurs revenus publicitaires et les commandites. Mais surtout, parce que cette année supplémentaire représentera une grande économie.

Les contrats des diffuseurs viendront à échéance à la fin de la saison 2013-2014. On prévoit déjà une compétition féroce, presque sauvage, entre les diffuseurs pour protéger ou acquérir des droits de diffusion de la LNH.

RDS sait très bien que TVA Sports - surtout si les Nordiques ne sont pas revenus à Québec d'ici là - débarquera en force pour obtenir sa part des matchs du Canadien. Il semble acquis qu'il sera ardu, voire impossible, de conserver les droits exclusifs du Tricolore lors du prochain contrat.

Au lieu de devoir payer davantage en 2014-2015 pour un contrat moins favorable que celui détenu en ce moment, les diffuseurs feront banco dans deux ans. Ils profiteront d'une année supplémentaire aux conditions actuelles. Une sacrée bonne affaire, même au niveau des cotes d'écoute, puisque cette annulation/prolongation retardera d'autant l'entrée en scène de concurrents potentiels.

RDS aurait préféré bien sûr présenter le match Sabres-Canadien, qui devait être disputé au Centre Bell ce soir, plutôt que d'offrir une programmation alternative à ses clients.

Mais tant qu'à revenir dans l'action pour une minisaison en janvier, RDS préférerait se passer de hockey tout l'hiver afin de retarder l'entrée en force de TVA sur la scène de la LNH - le réseau de Pierre Karl Péladeau détient déjà des droits sur des matchs des Sénateurs d'Ottawa - ou le retour possible, mais peu probable, de la SRC.