Vêtus de pantalons aux couleurs de l'Union Jack, coiffés de bérets verts, scandant des encouragements avec un accent impossible à confondre avec ceux de la Caroline-du-Sud, de New York ou de Boston, Rob Bell et ses trois compatriotes venus d'outre-mer retenaient presque autant l'attention que les golfeurs des équipes américaine et européenne, hier matin à Medinah.

Salués ici, applaudis là-bas, photographiés chaque fois qu'ils s'arrêtaient pour encourager leurs «boys» - qui les ont d'ailleurs remerciés en soulevant leur casquette au passage -, les quatre touristes savent qu'ils pourraient être moins bien accueillis vendredi, lorsque la guerre qu'est devenue la Coupe Ryder sera déclenchée.

Une guerre sans fusil, bien sûr. Une guerre sportive et amicale, comme l'ont répété plusieurs fois encore hier les capitaines Davis Love III et José Maria Olazabal. Mais une guerre quand même.

Et comme les États-Unis l'ont perdue plus souvent qu'ils ne l'ont gagnée au cours des sept dernières années et que les amateurs de sport de Chicago sont reconnus pour leur patriotisme, attisé par les forts vents venus du lac Michigan, plusieurs observateurs craignent des débordements au cours de la fin de semaine. Des débordements semblables à ceux qui ont marqué la victoire américaine en 1991 à Kiawah Island, en Caroline-du-Sud. Une victoire sur fond de patriotisme démesuré, dans le cadre d'une Coupe Ryder passée à l'histoire comme un débarquement militaire sur les rives de la Caroline. Le documentaire relatant cette conquête américaine est d'ailleurs coiffé du titreWar by the Shore.

«Je planifie ce voyage depuis le mois de janvier. J'ai donc eu le temps de me préparer à ce qui nous attend. Les partisans européens seront minoritaires. C'est évident. Mais je crois que les organisateurs ont tiré des leçons du passé. On se fera sans doute apostropher un peu et de façon plus cavalière qu'aujourd'hui. Ça rendra la victoire encore plus plaisante à célébrer dimanche soir», a expliqué Rob Bell, qui habite dans la très tranquille banlieue de Wimbledon et travaille comme pigiste à la télé anglaise à Londres.

Des «encouragements»

Rob Bell, ses compagnons de voyage et les autres braves qui oseront afficher leurs vraies couleurs en fin de semaine ne seront pas les seuls à devoir composer avec les «encouragements» des Américains. Les joueurs de l'équipe européenne goûteront à la même médecine.

Il était d'ailleurs ironique, hier, de voir Graham McDowell, Rory McIlroy et les autres membres de Team Europe acclamés par les partisans américains, qui réclamaient photos et autographes pendant qu'ils marchaient entre les verts et les tertres de départ des trous suivants. Car dès vendredi, Rory, G-Mac et leurs coéquipiers seront des ennemis.

«C'est spécial d'être ovationné après avoir raté un coup roulé. Ça arrive en Coupe Ryder et nous devrons l'accepter cette semaine. Je crois toutefois que les risques de débordements sont minces, parce que l'hostilité qui a marqué certaines compétitions est chose du passé. Du moins, je l'espère», a indiqué Graham McDowell.

Avantage politique

Dans le camp américain, Tiger Woods et Jim Furyk souhaitent profiter de l'avantage lié au fait de jouer à la maison. Un avantage politique bien plus que géographique, puisque les terrains n'ont plus de secrets pour personne sur la planète golf.

«Ils bénéficient du même avantage lorsqu'on va jouer là-bas, c'est notre tour», a indiqué Woods.

«Les Européens peuvent être bruyants et patriotiques eux aussi. Ceux qui feront le voyage le démontreront. Mais si les 35 000 Américains attendus chaque jour se mettent à crier USA! USA! USA!, ils devraient prendre le contrôle de la situation», a ajouté Furyk.

Si j'avais à parier un huard ou deux sur le comportement des partisans américains en fin de semaine, je le qualifierais tout de suite de belliqueux.

Le déroulement des compétitions dictera le reste. Si les États-Unis s'envolent rapidement en tête ou, pire, s'ils s'enlisent, ça risque de dégénérer. Souhaitons toutefois que la guerre demeure vraiment amicale et sportive. Car exception faite de quelques policiers montant la garde ici et là, le gros de la sécurité, comme c'est toujours le cas au golf, est assumé par de simples cordes tendues le long des 18 allées du parcours...

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Mikita: «Ils sont en train dese mettre les partisans à dos»

Figure légendaire des Blackhawks de Chicago, Stan Mikita était l'une des célébrités sur les allées du club Medinah, hier. M. Mikita, qui a récolté 1467 points en 22 saisons avec les Hawks, craint que le conflit qui paralyse la LNH mine à jamais le goût des amateurs pour le hockey.

«Je ne sais pas qui, des joueurs ou de la ligue, a raison ou tort. Mais ils sont en train de se mettre les partisans à dos. L'intérêt pour le hockey n'est déjà pas fort aux États-Unis, je n'arrive pas à comprendre qu'ils puissent le menacer davantage avec un autre conflit. Ça n'a pas de bon sens.»

Outre Stan Mikita, le nageur Michael Phelps, Scottie Pippen, ancien des Bulls (NBA), le chanteur Justin Timberlake et le comédien Bill Murray entouraient d'autres anciennes vedettes de la PGA.