Dans la foulée du départ de Luc Ferrandez, j'ai posé la question sur Facebook : qui voyez-vous à la tête de Projet Montréal pour affronter Denis Coderre l'an prochain ?

Le nombre et la diversité des réponses m'ont étonné.

Deux Alexandre revenaient souvent (Taillefer et Boulerice). Il y avait des élus provinciaux (Françoise David, Jean-François Lisée), de jeunes intellectuels (Gabriel Nadeau-Dubois, Aurélie Lanctôt), des candidatures de divers horizons (Lise Bissonnette, Louise Roy). Et un certain Infoman, aussi.

Une bonne panoplie de candidats, donc, qui montre qu'il y a un certain espoir pour Projet Montréal, même s'il se prépare à affronter un politicien redoutable, bien calé dans son fauteuil de maire, qui jouit d'une immense notoriété.

Disons-le, si l'opposition espère rivaliser avec Denis Coderre en 2017, si elle veut incarner « le changement », elle doit ouvrir toutes grandes ses portes. Elle doit aller chercher du sang neuf. Elle doit nommer un chef qui bouscule l'ordre politique municipal, comme l'avait fait Jean-Paul L'Allier en se joignant au Rassemblement populaire de Québec à la fin des années 80.

En un mot, Projet Montréal a besoin d'une candidature de l'extérieur.

C'est ce que je pense, mais c'est aussi ce que pensent bien des gens au sein de Projet Montréal, pour tout vous dire.

Oui, il y a de bons candidats à l'interne pour diriger le parti. Oui, Guillaume Lavoie, François Croteau, Émilie Thuillier et quelques autres pourraient bien mener le parti aux prochaines élections.

Mais le problème, c'est que Projet a un problème d'image, trop anti-autos, trop quartiers centraux, trop dogmatique, ce qu'a d'ailleurs reconnu Luc Ferrandez en quittant la direction.

Non seulement a-t-il tendu la perche aux candidats de l'extérieur en citant Laure Waridel et Karel Mayrand, il a aussi assuré que sa formation traînait une image « radicale », chose difficile à renverser pour un candidat qui représente le parti depuis des années.

« Je veux laisser la place à quelqu'un qui va avoir le champ libre, qui n'aura pas de boulet de réputation à porter et qui ne risque pas de faire peur aux Montréalais. »

Bien dit. Mais dans ce cas, pourquoi la course à la direction ferme-t-elle la porte... aux candidats de l'extérieur ?

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Les détails de la course à la direction de Projet Montréal ont intéressé peu de monde jusqu'ici. Après tout, la politique partisane municipale passionne moins que la provinciale. Et surtout, les prochaines élections n'ont lieu qu'en novembre 2017.

C'est loin.

Et pourtant, en lisant la motion adoptée il y a quelques jours lors du congrès de Projet Montréal, on croirait que le choix d'un nouveau chef est une urgence nationale. Comme si les électeurs étaient pendus aux lèvres de l'opposition pendant toute l'année qui précède le scrutin !

Le congrès a en effet recommandé au comité de direction du parti de tenir une course cet automne... pour un couronnement un an avant les élections du 5 novembre 2017 !

Or vous en connaissez beaucoup, vous, des gens qui sont prêts à quitter leur emploi pour devenir chef de l'opposition à Montréal, sans siège au conseil municipal, sans aucune garantie sur l'avenir... sans même un salaire, sinon minime, pendant 12 longs mois ?

Pas moi.

C'est à se demander si Projet Montréal n'a pas déjà jeté l'éponge pour les prochaines élections, se résignant à convoiter quelques mairies locales plutôt que LA mairie.

On ne parle quand même pas de la présidentielle américaine, ici ! On parle d'élections municipales, qui auront lieu pendant les festivités du 375e anniversaire. Des élections, en plus, qui s'annoncent difficiles contre un maire qui n'aura accompli qu'un mandat.

Le moins que Projet Montréal puisse faire, c'est se donner le temps de trouver un candidat de poids. Un candidat qui pourrait bien décider de se lancer en 2017 pour rebondir en 2021, à condition de ne pas se brûler un an avant l'échéance électorale.

En précipitant la course à la direction, Projet Montréal prend le risque de précipiter sa propre défaite.