Selon l'ONU, 2015 est l'année de la lumière et des sols (consolons-nous, 2016 sera l'année internationale des légumineuses). Selon l'astrologie chinoise, 2015 s'amorce sous le signe du cheval de bois. Et selon Montréal, 2015 est l'année des transports en commun.

La STM se joint d'ailleurs au maire Coderre pour vous offrir ses meilleurs voeux... ainsi qu'une importante hausse de tarifs.

La vingtième. En 20 ans.

Et bonne année à vous!

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Le prix de la carte mensuelle est de 82$ depuis quelques jours, une hausse de 3,1% par rapport à l'an dernier. Une hausse, soulignons-le, plus importante que l'inflation, comme c'est l'habitude à la société de transport.

Pour apprécier ce cadeau de bonne année à sa juste valeur, je me suis plongé dans les archives: en 20 ans, le prix de la CAM est passé de 43,50$ à 82$. Presque le double!

Bon, vous direz que je suis nostalgique en remontant jusqu'en 1995. Et vous avez raison. Je m'ennuie de l'époque où, à 9 ans, je payais 25 cents chaque matin pour prendre le bus de la CTCUM...

Mais je vous entends: deux décennies, c'est trop long. Écourtons donc la comparaison. En 15 ans, le prix de la CAM a grimpé de 74%. En 10 ans, elle a connu un bond de 34%. Et en cinq ans, l'augmentation a atteint 17%, soit beaucoup plus que l'inflation.

Vous en connaissez beaucoup, vous, des tarifs qui réussissent à dépasser l'inflation presque chaque année? Vous connaissez d'autres tarifs qui ont augmenté chaque année depuis 20 ans?

Pas moi.

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Je vous entends réagir. Tout augmente, pas de raison que les tarifs de la STM ne suivent pas.

Soit. Les droits d'immatriculation augmentent. La taxe sur l'essence augmente. Et les tarifs de toutes les sociétés de transport de la région augmentent aussi.

Mais s'il avait fallu qu'on hausse les coûts liés à la voiture chaque fois qu'on augmentait les tarifs de la Société de transport, les Montréalais ne pourraient même pas se payer une minoune aujourd'hui...

En 20 ans, la taxe sur l'essence n'a crû que de 26%. Même chose pour les droits d'immatriculation dans l'île de Montréal (beaucoup moins en banlieue et ailleurs au Québec). Quant aux tarifs de la STM, ils ont bondi de... 89%.

Certes, les autres sociétés de transport, comme l'AMT et la Société de transport de Laval, augmentent leurs tarifs, cette année. Mais les usagers ont droit, en échange, à une amélioration des services.

À la STM, allez comprendre, c'est l'inverse. Elle exige plus, mais elle offre moins. Elle hausse les tarifs, mais on peine de plus en plus à trouver une place sur la ligne orange le matin.

Depuis l'entrée en fonction du tandem Schnobb-Coderre, souligne Projet Montréal, les tarifs ont augmenté de 5,5%, mais le service, lui, a diminué de 2,8%.

Qu'on indexe les tarifs annuellement, passe encore. Mais les augmenter autant est injustifiable.

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Pour faire passer la pilule, la STM rappelle que les tarifs sont moins élevés à Montréal que dans les autres villes canadiennes de taille similaire.

Curieux comme on a la comparaison à géométrie variable, au Québec. Pour justifier les hausses de tarifs, on se réfère à l'Ontario et aux autres provinces. «Plus cher là-bas, donc ça devrait être plus cher ici.»

Mais quand vient le temps de parler de développement, d'offre et de qualité de service, soudainement, on a la comparaison moins facile. «Vous savez, ils sont plus riches que nous, normal qu'ils aient un meilleur service.»

Eh bien non, ce n'est pas normal, d'autant moins qu'ici, à Montréal, l'affluence dans le réseau est parmi les plus élevées du continent. Et non, ce n'est pas normal non plus qu'on augmente les tarifs alors qu'on diminue les services.

Pas quand on en fait une priorité de l'année, en tout cas.

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APARTÉ - La STM a mis à la porte son directeur général, Carl Desrosiers, avant les Fêtes. C'est une décision, elle aussi, injustifiable.

Selon le président, Philippe Schnobb, cette fin de contrat était nécessaire pour apporter «un regard neuf» à la Société. Le même Philippe Schnobb qui disait vouloir s'appuyer sur le «directeur général et toute l'équipe de direction» il y a quelques mois.

Mais est-ce vraiment d'«un regard neuf» que la STM a besoin?

La Société a fait des pas de géant en matière de productivité. Elle réussit à faire des miracles avec des équipements d'une autre époque. Elle compose avec un nombre toujours plus élevé de passagers... et un appui de plus en plus tiède des gouvernements, ce qui se traduit par une pénalité au rendement.

Donc, non, ce dont la STM a besoin, ce n'est pas un regard neuf. C'est de l'argent.