Je n'ai rien contre les bonis. Je trouve d'ailleurs ridicule que des gens s'insurgent sans discernement contre les primes, puisqu'elles font souvent partie intrinsèque de la rémunération promise aux cadres lors de leur embauche.

Je n'ai rien contre les bonis, mais attention, il faut que ces bonis soient pleinement mérités. Par définition, un boni est un supplément accordé à celui qui dépasse les normes attendues. Pas de dépassement, pas de boni, on est d'accord ?

Or, visiblement, on a oublié ce principe chez Investissement Québec, le bras financier du gouvernement. Bon an, mal an, les employés touchent des bonis sans égard à la performance réelle de l'organisation.

Jeudi, mon collègue André Dubuc rapportait que 85 % des 500 employés ont touché une prime au cours de l'exercice 2015-2016, soit une somme globale de 3,2 millions. Les 10 vice-présidents se sont partagé 663 000 $ de primes, soit une moyenne de 66 275 $ pour chaque VP. Les bonis peuvent représenter 25 % de leur rémunération.

Ces sommes sont-elles liées intimement à une performance clairement définie ? Eh bien non ! À quelques dollars près, cette somme de 3,2 millions est versée chaque année, bien que l'organisation ne parvienne pas à obtenir un rendement supérieur à son coût des fonds, soit 4 %.

Je veux bien comprendre que la rémunération doit être concurrentielle avec celle du secteur privé, où le chèque de paye dans le secteur financier est souvent imposant, parfois indécent. Sauf que le secteur privé est beaucoup plus exigeant. Oubliez la bureaucratie et les semaines de 35 heures : on veut des résultats, coûte que coûte.

Je veux bien comprendre qu'une société d'État n'a pas les mêmes objectifs de rendement que dans le privé, que le profit ne fait pas foi de tout. Mais dans ce cas, il faut fixer des cibles de rendement adéquates pour verser des primes, dont les sommes seront forcément variables année après année. S'il est impossible de fixer des cibles compte tenu de la nature du travail, il faut éliminer les bonis et ajuster la rémunération en conséquence.

Or, dans son dernier rapport, le Vérificateur général (VG) dénonce justement les cibles utilisées pour les primes chez Investissement Québec, les jugeant trop faciles à atteindre. Un exemple : le respect du budget des frais d'administration. Chaque année, les frais d'administration inscrits au budget en début d'année sont toujours supérieurs à ceux de l'année précédente, d'environ 6 %. Conséquence : les cadres atteignent toujours aisément la cible.

Pire : selon le VG, la cible de certains indicateurs n'a pas toujours besoin d'être atteinte. « Le programme de rémunération prévoit qu'un boni sera versé si le résultat net est d'au moins 50 % de ce qui avait été inscrit au budget », dénonce le VG.

Je suis bien d'accord avec François Bonnardel, de la Coalition avenir Québec (CAQ) : vivement un ménage !

AU SUJET DES IMMIGRANTS...

Au Québec, deux chercheurs ont analysé la question de l'immigration sous toutes les coutures : Brahim Boudarbat et Gilles Grenier. Leur rapport commun de 181 pages publié en mars 2015 a fait autorité, à droite comme à gauche.

En gros, ils constatent que l'apport économique des immigrants n'est pas aussi positif qu'on le croit et qu'il ne réglera pas nos problèmes de vieillissement. Selon eux, « il se peut que l'immigration constitue un fardeau pour les contribuables, du moins à court terme ».

Les problèmes résident notamment dans les difficultés d'intégration. Par exemple, à Montréal, le taux de chômage des immigrants récents était de 18 % en 2015 contre 7 % pour les natifs d'ici. L'écart est bien plus grand qu'en Ontario.

Ils notent par contre qu'une baisse du volume d'immigrants réduirait notre poids au Canada et donc, nos transferts fédéraux, entre autres.

Fort de ce constat, leur rapport suggère de ne pas augmenter le niveau annuel d'immigrants, mais de le maintenir à 50 000, à la condition de modifier nos politiques de sélection et d'accueil.

Or jeudi, dans les pages Débats de La Presse, ces deux sommités ont donné un appui sans équivoque au plan de la ministre de l'Immigration, Kathleen Weil. Leur texte est cosigné avec l'économiste Pierre Fortin.

Les trois économistes jugent que le plan de Mme Weil est le bon. D'abord, il faut essentiellement plafonner l'immigration tant que la sélection et l'intégration n'auront pas été améliorées. Un des éléments clés est lié aux besoins des entreprises.

« Mme Weil propose une légère augmentation du nombre d'immigrants, mais surtout, elle vise une meilleure adéquation des compétences aux besoins des employeurs, une admission plus facile pour les étudiants étrangers et les travailleurs temporaires, une campagne anti-discrimination, un investissement accru en francisation, une recherche active de jeunes candidats, une ouverture accrue des régions à l'immigration, un soutien à l'entrepreneuriat immigrant, et un encouragement des femmes immigrantes à l'emploi », écrivent-ils.

Selon eux, le besoin des employeurs devra respecter l'exigence du français comme critère de sélection et ils estiment que les candidats qui connaissent aussi l'anglais devraient être favorisés.

Les trois chercheurs jugent toutefois que pour parvenir aux objectifs ambitieux d'accueil, le Québec doit augmenter les ressources accordées au ministère de l'Immigration, plus bas qu'il y a 10 ans.

Les immigrants, faut-il savoir, sont davantage diplômés que les Québécois d'accueil. S'ils trouvent plus rapidement un travail adéquat, ils risquent de mieux s'intégrer et d'offrir de meilleures perspectives à leurs enfants. N'est-ce pas ce que nous voulons ?