Le ton du ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, est maintenant «givré au lieu d'être rugueux», mais cette nuance ne change rien au fond: les villes devront trouver d'autres solutions que de pelleter leurs problèmes aux contribuables, a-t-il laissé comprendre.

Les maires des villes de Laval et Longueuil, rappelons-le, ont annoncé des hausses respectives de taxes de 3,2% et 3,9%, en raison, disent-ils, des compressions imposées par Québec. En somme, pas question pour elles de réduire leurs dépenses ou de piger dans leurs surplus; la facture est refilée directement aux contribuables. Ces hausses de taxes sont trois fois supérieures à l'inflation prévue en 2015 (1,3%).

Le ministre Moreau avertit qu'il retiendra les transferts aux deux villes si elles persistent avec cette solution simpliste. Sachant que les employés municipaux sont surpayés (39% d'écart avec les employés du gouvernement du Québec), il apparaît évident que les villes seraient en mesure de trouver des fonds ailleurs que dans les seules poches des contribuables.

Une suggestion: pourquoi ne pas couper la poire en trois: piger un tiers dans leurs surplus, un tiers dans des compressions et un tiers dans les hausses de taxes?

La classe de Bolduc

J'avais cru comprendre que l'éducation serait épargnée par les compressions, du moins le service aux élèves. Or, les offres du ministre de l'Éducation, Yves Bolduc, ne vont pas dans ce sens.

Certes, l'augmentation du nombre d'élèves par classe ne risque pas d'avoir d'impact significatif dans des écoles d'enfants doués, comme celles à vocation internationale. Mais qui peut prétendre qu'elle ne changera rien dans des écoles «régulières» de la région de Montréal, par exemple. Surtout, comment justifier qu'on ne veuille plus tenir compte des élèves ayant des difficultés d'apprentissage dans la composition des classes?

Depuis 15 ans, faut-il le rappeler, les écoles «régulières» ont été vidées de leurs meilleurs éléments, rendant la tâche plus difficile aux enseignants. Les chiffres sont limpides: la proportion d'élèves qui fréquentent le privé est passée de 15% à quelque 20% depuis la fin des années 90. Et en ajoutant les élèves du public qui fréquentent des programmes d'enrichissement (international, sport-études, défis, etc.), on peut estimer que le tiers des élèves déserte maintenant les écoles normales.

Si la qualité des classes régulières publiques se dégrade à nouveau, un nombre encore plus grand de parents risque de se tourner vers le privé. Et ce faisant, la tâche des profs deviendra plus ardue avec ceux qui restent.

Que le gouvernement veuille geler les salaires des enseignants est une chose. Qu'il fasse fi du contexte difficile des classes «régulières» en est une autre. En santé, le gouvernement veut reconnaître les cas lourds dans le travail des médecins. Pourquoi ne ferait-il pas de même en éducation?

La lettre de Barrette

Mardi dernier, le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, a fait parvenir une lettre à tous les médecins de famille du Québec. La lettre ne réglera pas les dissensions entre le ministre et les médecins, mais elle a le mérite de clarifier des aspects méconnus du projet de loi 20 pour l'homme de la rue.

D'abord, le suivi d'un nombre minimal de patients exigé ne s'ajoutera pas à la tâche des médecins sans que soient prises en compte leurs activités obligatoires dans les hôpitaux. Ainsi, un médecin qui travaille 12 heures dans un hôpital devra par ailleurs suivre 1000 patients en cabinet, sans quoi une pénalité sera imposée. Par contre, le médecin qui suit 1500 patients n'aura pas besoin de faire d'heures en établissement.

Autre fait méconnu: certains cas (toxicomanie, maladie mentale, etc.) vaudront plus d'un patient dans le calcul du suivi minimal obligatoire. Autrement dit, les cas les plus lourds ne resteront pas dans la salle d'attente. Même genre de pondération pour les patients en fin de vie, les suivis à domicile ou les accouchements.

Dans sa lettre, le Dr Barrette prétend qu'il veut faire travailler les médecins de famille à temps plein, 5 jours par semaine et 42 semaines par année. Les 10 semaines restantes serviraient à la formation, aux congés, aux vacances, etc.

Louis Godin, président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ), soutient que l'approche mathématique, complexe et punitive du ministre alourdira significativement la tâche des médecins de famille. Par exemple, il craint qu'on ne reconnaisse pas réellement toutes les heures passées à l'hôpital.

Rappelons que, selon des chiffres tirés de la Régie de l'assurance maladie du Québec (RAMQ), les médecins de famille facturent à l'État 19 jours de moins aujourd'hui qu'à la fin des années 90, en moyenne.

ENAP: des étudiants réagissent

Une récente chronique sur l'École nationale d'administration publique (ENAP) abordait la question des nombreux étudiants étrangers admis à cette université et les défis linguistiques et académiques que cela pouvait représenter.

En réaction, 14 étudiants internationaux m'ont transmis un texte, dont voici un résumé. «Les récents articles sur l'ENAP ne doivent pas faire des étudiants internationaux, notamment africains, des boucs émissaires. Ils doivent plutôt être une occasion de rassembler les forces vives de l'institution [l'administration, les enseignants, les étudiants québécois et étrangers] pour solutionner les lacunes évoquées et améliorer la formation des étudiants. Notre école a une plus-value grâce à son ouverture sur le monde, elle doit se donner les moyens de mettre en valeur cet atout!»