Il y a différentes façons d'interpréter le nouveau portrait de Statistique Canada sur le 1% des gens les plus riches au Canada, paru la semaine dernière. En voici trois.

D'abord, contrairement à la croyance répandue, ce groupe de Canadiens n'a pas vu sa richesse relative augmenter ces dernières années, mais diminuer. En effet, selon Statistique Canada, le groupe de 1% accaparait 10,3% des revenus avant impôt en 2012 (année la plus récente disponible) contre 10,6% en 2006.

Le phénomène d'écart grandissant entre les riches et les pauvres est surtout américain. Aux États-Unis, la proportion des 1% les plus riches absorbait une part deux fois plus grande des revenus qu'au Canada, soit 19,3% du total des revenus en 2012, et cette part est en hausse (18% en 2006).

Bref, le phénomène est en baisse au Canada ces dernières années et en hausse aux États-Unis. Précisons tout de même qu'il y a 20 ans, la proportion des revenus qu'accaparaient les 1% les plus riches était plus faible qu'aujourd'hui. Elle était alors de 8,0% au Canada et d'environ 13% aux États-Unis.

Une autre façon d'interpréter les nouvelles données de Statistique Canada est de faire le constat que non seulement l'écart entre les riches et les pauvres est moindre au Québec, mais aussi qu'il a connu une plus importante diminution qu'ailleurs ces dernières années.

En effet, la part des revenus qu'accaparaient les 1% les plus riches au Québec était de 9,1% en 2012 contre 10,3% dans l'ensemble du Canada. Cette part de 9,1% est en baisse par rapport à 2006, alors de 9,6%.

La troisième interprétation - celle qui me préoccupe surtout -, c'est de constater que le Québec compte une moins grande proportion de riches qu'ailleurs au Canada.

Normalement, le Québec devrait compter une proportion de riches qui soit semblable au poids relatif de sa population dans le Canada, soit 23%. Or, la proportion des 1% du Canada qui déclarait vivre au Québec était plutôt de 16,6% en 2012. Non seulement cette proportion est-elle moindre, mais encore elle est en baisse, puisqu'elle était de 17,2% en 2000.

Certains pourraient dire que ce n'est pas le Québec qui perd des riches, mais l'Ouest qui en gagne, avec le pétrole. Tout de même, le moins grand nombre de riches au Québec a des impacts sur le financement de nos programmes sociaux, notamment les garderies.

Oh, j'oubliais: pour faire partir de ce club, il fallait gagner 180 500$ au Québec en 2012, 215 700$ au Canada, 300 000$ en Alberta et 371 689$US aux États-Unis.

La richesse de nos universités

Un nouveau rapport sur les revenus et dépenses des universités au Québec vient d'être publié par le ministère de l'Enseignement supérieur. Il confirme que nos universités ne sont pas autant à plaindre qu'on le dit. Encore une fois, les chiffres et la méthodologie seront contestés, et je n'y reviens pas.

Ce qui ne sera pas contesté, cependant, c'est l'effort relatif nettement plus important qu'ailleurs consacré aux universités au Québec.

Ici, les dépenses globales des universités par étudiant équivalent à 66% de notre produit intérieur brut (PIB) par habitant. Cette proportion est de 61% au Nouveau-Brunswick, de 55% en Ontario et de 48% en Alberta. Autrement dit, pour avoir des universités à peu près comparables aux autres, les Québécois doivent sacrifier une plus grande part de leur richesse globale qu'ailleurs.

La principale raison de cet écart s'explique par la pauvreté relative des Québécois. Notre économie est moins dynamique qu'ailleurs au Canada. Pour consacrer autant d'argent aux universités, il faut donc faire un effort relatif plus important, bref verser une proportion plus grande de nos impôts et autres cotisations qu'ailleurs.

Et comme les universités sont en concurrence avec les garderies et le système de santé, la situation se corse. Pour s'en sortir, c'est inévitable, les universités doivent encore trouver des moyens d'être plus efficaces. Cours sur le web, syndicats plus flexibles, salaires modulés, tâche de certains profs augmentée, etc.

Halte routière: le sabotage d'un PPP?

On aurait voulu faire dérailler un partenariat public-privé (PPP) qu'on ne s'y serait pas pris autrement. Je parle de l'histoire de mon collègue André Dubuc sur les haltes routières.

Le projet de sept haltes fonctionnait bien, les automobilistes étaient très satisfaits, mais les exigences pointilleuses du ministère des Transports (MTQ) ont mis l'entreprise Aires de service Québec sous la protection de la loi sur les faillites. Résultat: le gouvernement doit maintenant assumer une dette de 30 millions, et les haltes routières sont sous séquestre.

La raison du fiasco? Le MTQ a retenu un paiement de 2 millions qu'il devait à l'entreprise, car cette dernière ne lui a pas fourni les plans et devis de construction. Ce paiement était crucial pour la survie de l'entreprise, qui a donc dû cesser ses activités plutôt que de gérer les haltes pendant 31 ans à ses frais. Le promoteur poursuit aujourd'hui le gouvernement pour plus de 50 millions.

Le Vérificateur général a fait enquête. Et il déplore que le MTQ n'ait pas tenu compte de l'impact de ses exigences sur la solvabilité des haltes routières et sur lui-même.

Et pendant qu'on attend une solution de rechange, le Québec verse 30 000$ par mois au séquestre pour trouver une solution. Quel gâchis!