Si la reprise de la construction résidentielle aux États-Unis a légèrement tardé à s'articuler de façon aussi probante que certains l'avaient anticipé, elle semble maintenant donner les signes de vigueur qu'espérait l'industrie forestière québécoise. La plupart de nos scieries profitent déjà de la plus forte activité observée dans le secteur de la construction résidentielle américaine.

Dans la foulée de la publication récente de nombreux indicateurs économiques aux États-Unis qui ont traduit une amélioration notable de l'activité générale chez nos voisins du Sud, il y en a un dont l'incidence est tout aussi directe que capitale pour la santé de dizaines de nos entreprises des régions ressources.

On a appris, il y a deux semaines, que les ventes de maisons neuves aux États-Unis avaient enregistré un bond de près de 20% en mai dernier, pour atteindre la marque annualisée des 500 000 unités.

Il s'agit de la meilleure performance commerciale réalisée par les constructeurs de maisons neuves américains depuis 2006, soit depuis l'apogée de la bulle immobilière aux États-Unis, qui a brutalement explosé en 2007 lorsqu'a été mis au jour le scandale des hypothèques à risque et du papier commercial adossé à ces actifs toxiques.

L'année 2006 a été celle où ont culminé la bulle immobilière et l'activité de la construction résidentielle, alors qu'il s'est construit pas moins de 2 millions de nouvelles unités d'habitation aux États-Unis.

En 2006, les centaines de scieries québécoises tournaient à plein régime pour alimenter cette frénétique course de mises en chantier et elles ont livré une marque historique de 7,5 milliards de pieds mesure de planche (pmp) de bois d'oeuvre.

La folle demande générée par la bulle immobilière américaine avait aussi propulsé la valeur du bois d'oeuvre québécois à un niveau jamais atteint de 600$US le mille pmp, alors que le dollar canadien s'échangeait à 75 cents américains.

En 2011, au sortir de la récession, les livraisons de bois d'oeuvre québécois aux États-Unis avaient chuté de plus de moitié par rapport à 2006 pour totaliser 3,1 milliards de pmp. Le prix du mille pieds mesure de planche a chuté de 600$US à 195$US durant la même période.

Cette catastrophe s'est traduite par la fermeture de dizaines de scieries et la perte de dizaines de milliers d'emplois en région.

Une industrie qui respire à nouveau

La reprise de l'industrie de la construction résidentielle américaine s'est finalement amorcée en 2012 lorsqu'on est passé d'un creux de 500 000 nouvelles mises en chantier à 784 000 nouvelles constructions.

Le mouvement s'est poursuivi l'an dernier avec 930 000 nouvelles unités d'habitation et présentement, l'industrie prévoit terminer l'année 2014 avec 1,2 million de nouvelles maisons aux États-Unis.

Selon le service d'études économiques de la Banque Royale, le nombre de nouvelles mises en chantier devrait atteindre la marque de 1,4 million en 2015.

Certains analystes estimaient l'an dernier que l'industrie de la construction résidentielle américaine était sur le point d'amorcer ce qu'on appelle un «supercycle», c'est-à-dire une séquence de plusieurs années avec de fortes nouvelles mises en chantier.

«C'est à partir de 1,4 million de nouvelles unités qu'on parle d'un «supercycle» », observe André Tremblay, président du Conseil québécois de l'industrie forestière.

Il va sans dire, le président du CQIF affiche un soulagement certain de constater que la reprise américaine se traduit par la multiplication des «2 par 4» au Québec.

«Nos volumes d'exportations de bois d'oeuvre vers les États-Unis devraient atteindre en 2014 les 5 milliards de pmp, par rapport au creux de 3,1 milliards de pmp en 2011. C'est nettement mieux», souligne-t-il.

En matière de valeur, les exportations québécoises de bois d'oeuvre aux États-Unis sont passées de 1,5 milliard en 2012 à 2 milliards en 2013 et devraient atteindre 2,5 milliards cette année.

Les prix aussi se raffermissent. Le 1000 pmp, qui se vendait 375$US en 2012, trouvait preneur à 400$US en 2013, et s'échange aujourd'hui à 420$US.

La progression des prix que l'on observe depuis trois ans ne permet toutefois pas d'anticiper qu'ils reviennent un jour au niveau record des 600 US$ le 1000 pmp qu'ils ont touché en 2006, avec un dollar canadien qui s'échangeait à 75 cents US.

Encore aujourd'hui, l'effet de change est important pour l'industrie forestière québécoise alors que tout mouvement - à la hausse comme à la baisse - de 1 cent de notre dollar a un impact de 60 millions sur l'industrie.