Les garçons sont plus cruches que les filles. C'est l'impression que j'avais en me présentant à la remise des diplômes de l'École d'éducation internationale de Laval, mercredi dernier. Il s'agit de l'école secondaire que mes deux plus vieux garçons ont fréquentée.

Mon sentiment honteux était nourri par les résultats de la cérémonie d'il y a deux ans, pour mon aîné. Les filles avaient raflé l'essentiel des mentions et des plaques des différentes catégories, que ce soit en art, en physique ou en chimie, sans compter la médaille du gouverneur général (meilleure moyenne générale, toutes catégories confondues).

Les gars s'en sont mieux tirés cette année. Tout de même, en excluant l'éducation physique, les filles ont raflé 6 récompenses sur 10 portant sur les résultats scolaires. Je ne veux pas être sexiste, mais il appert que les filles sont meilleures, merde.

D'ailleurs, les filles obtiennent de meilleures notes jusqu'à leur entrée à l'université, où leur cote R est plus élevée. Le portrait est complet si l'on ajoute le taux de décrochage au Québec: à 19 ans, la proportion des jeunes hommes qui n'ont pas de diplôme secondaire est de 21,6%, contre 12,4% pour les jeunes femmes.

On est loin de la blague d'Yvon Deschamps: «Les femmes, faut pas leur expliquer trop longtemps parce qu'elles viennent toutes mêlées!»

Pourquoi en parler? Parce que le succès des filles est une bonne nouvelle pour le marché du travail et l'économie du Québec. Le bassin des jeunes femmes en emploi a explosé au cours des dernières années, au Québec plus que partout ailleurs.

En décembre, le taux d'emploi des femmes de 25 à 44 ans était de 81% au Québec, contre 78% ailleurs au Canada. Celui des hommes était de 84% (86% au Canada). Il s'agit, pour les Québécoises, d'un bond phénoménal de 10 points en 10 ans.

Les jeunes femmes sont plus nombreuses à travailler ici que dans tous les pays du G7. En France, ce taux avoisine les 75%. Il tombe à 72% aux États-Unis et à 61% en Italie. Seuls les pays scandinaves nous devancent, avec des taux d'emploi de plus de 82%1.

Bref, les filles sont plus nombreuses qu'ailleurs à peupler le marché du travail et comme elles réussissent mieux à l'école, tout indique que leur venue est fort bénéfique pour notre économie.

Bien sûr, les bons résultats scolaires ne garantissent pas un meilleur rendement au travail. L'autorité, la résistance au stress, la capacité d'innovation, la débrouillardise, bref un ensemble d'autres qualités sont déterminantes au travail et dans la vie en général.

Rock Chouinard, professeur en éducation à l'Université de Montréal, ne veut surtout pas dire que les filles sont plus intelligentes. Selon lui, les meilleurs résultats témoignent probablement du temps consacré aux études, de la motivation, de l'engagement. «Il est possible que l'école soit moins apte à susciter l'engagement des garçons», explique-t-il.

Il y a tout de même une discipline, à part l'éducation physique, où les garçons se démarquent: les mathématiques. Cette année, 10 garçons ont reçu une distinction lors de la cérémonie, contre 5 filles. La meilleure note du cours de mathématique avancé a été obtenue par un garçon. Il y a deux ans, c'était aussi la seule catégorie dominée par les gars.

Tout compte fait, j'imagine que les qualités des filles finiront par leur donner d'aussi bons salaires que ceux des gars, en supposant que la pause «maman» dans leur carrière ne nuise pas à leur ascension.

Une autre révélation m'est apparue durant la cérémonie: le nom de famille des diplômés. Je savais que la composition des élèves avait changé avec l'immigration, mais tout de même. Voici grosso modo les premiers noms de famille des diplômes remis par le personnel Théorêt-Fortin-Langlois et autres Valiquette de l'école: Adafer, Amani, Aquino, Arcand, Arfa, Assal, Aubin... Barbu, Barrette, Ben Moussa...

Le Québec - le Canada aussi - a connu un fabuleux changement en une génération, tant par la montée des femmes que par la présence grandissante de gens de toutes origines. Un des présentateurs parlait de la richesse de pouvoir compter sur des enfants issus de partout sur la planète: Roumains, Algériens, Turques, Israéliens, Grecs, Libanais, etc.

Le plus heureux, c'est que la plupart d'entre eux s'expriment maintenant dans un français bien québécois, avec des références culturelles bien québécoises. La très vaste majorité de cette élite montante de l'école internationale fréquente d'ailleurs un cégep francophone, avons-nous pu constater.

J'en profite pour faire le point sur mon propre nom de famille, que je dois épeler chaque fois que je me nomme. Vailles s'écrit et se prononce comme «trouvailles» au pluriel, mais sans trou. Mon père Vailles, né dans le sud de la France, a rencontré ici au début des années 60 une Lessard, de Beauce-Nord. Voilà! Go les filles et tant pis pour les complexes!

(1) Les chiffres des autres pays viennent d'une étude de l'économiste Luc Godbout publiée en 2008.