Une étude de l'Institut du Québec démontrait la semaine dernière que la métropole montréalaise jouait vraiment un rôle de locomotive pour l'ensemble du Québec, mais aussi que cette locomotive est poussive, qu'elle toussote, qu'elle sous-performe quand on la compare aux autres grandes villes canadiennes pour la croissance économique, les revenus, l'innovation ou la diplomation universitaire.

Cette étude va dans le même sens qu'une autre grande étude publiée au début de l'année à l'initiative de BMO Groupe financier et du Boston Consulting Group, qui comparait Montréal à sept métropoles qui ont réalisé avec succès leur relance. Elle montrait que Montréal, même en jouissant pourtant d'atouts considérables, souffrait de nombreux retards par rapport à ces villes comparables.

Cette dernière étude a été le point de départ d'une initiative ambitieuse, « je vois mtl », qui connaîtra un moment fort aujourd'hui, à la Place des Arts, quand un millier de participants discuteront de 175 projets pour redonner un élan à la métropole. Le mouvement, initié par L. Jacques Ménard, le patron de la BMO au Québec, dépasse toutefois largement le monde des affaires et les objectifs strictement économiques. Les projets déjà en branle, soumis à un mécanisme de suivi serré, vont de la revalorisation de l'ancien planétarium à la création d'un centre d'innovation et de partenariat, en passant par un tournoi de soccer de rue pour jeunes itinérants.

C'est une contribution majeure au mieux-être de Montréal. Mais elle connaît une limite, en quelque sorte un problème d'oeuf et de poule. À bien des égards, la sous-performance de Montréal ne tient pas à des carences propres à la métropole, mais à des problèmes qui affligent l'ensemble du Québec, par exemple la trop faible diplomation universitaire, la culture entrepreneuriale déficiente, les contraintes institutionnelles, sans compter la relation difficile entre la région montréalaise et le reste de la province.

Mais il faut bien commencer quelque part. Et surtout ne pas attendre que ces problèmes panquébécois se règlent ailleurs. Si Montréal est une locomotive, c'est aussi à Montréal d'initier les changements qui profiteront à l'ensemble du Québec.

Cette démarche, il faut le rappeler, s'est amorcée au moment où Montréal traversait une crise existentielle, ébranlée par les révélations sur la corruption, déchirée par le débat sur la charte des valeurs, abandonnée par un leadership municipal déficient. « je vois mtl » comblait un vide. Le climat est toutefois beaucoup plus serein maintenant, parce que les pires moments sont derrière nous. L'arrivée de Denis Coderre à la mairie a marqué un renouveau significatif de l'administration municipale. Et le vent a aussi tourné à Québec avec un gouvernement qui reconnaît l'importance et la spécificité des deux grandes villes du Québec.

Mais l'initiative garde toute sa pertinence. D'abord parce qu'elle contribuera à redéfinir ce qu'est le leadership municipal. La quête d'un nouveau Jean Drapeau, d'un sauveur autocrate qui tiendrait la ville à bout de bras, reflétait une forme de passivité. Montréal peut enfin compter sur un maire fort. Il sera cependant encore plus fort s'il se développe d'autres pôles de leadership, si l'administration municipale est nourrie en idées et en projets qui proviennent du milieu montréalais plutôt que de l'hôtel de ville, si l'ensemble de ceux qui veulent bâtir Montréal réussissent à dégager une vision commune et à parler d'une seule voix.

Déjà, « je vois mtl » contribue à créer un élan d'enthousiasme et de fierté dont Montréal a tant besoin. L'énergie qui se dégage de ce processus est salutaire pour la métropole. Cela permet aussi à la métropole de s'exprimer d'une voix forte, de s'affirmer comme locomotive et de créer ainsi les rapports de forces qui lui permettront d'obtenir les outils et la reconnaissance dont elle a besoin pour aller plus loin. Pour qu'ailleurs, on puisse dire : « j'entends mtl ».