Vendredi matin, les données de Statistique Canada montraient qu'il ne s'est créé que 3000 emplois au Québec entre mai et juin. Une hausse est certainement préférable à une baisse, mais elle est si modeste qu'elle ne suffit pas à mettre fin à l'affaissement qui afflige le marché du travail québécois.

Le Québec compte en effet 40 000 emplois de moins qu'en janvier et 14 000 de moins qu'en juin 2013. En fait, le niveau d'emploi de juin, 4 018 000, est le même que celui d'octobre 2012. Cela signifie qu'il n'y a eu aucun progrès sur le marché du travail en 20 mois.

Ces statistiques abstraites se confirment sur le terrain par les mauvaises nouvelles qui se succèdent. Des fermetures, comme Electrolux, ou des abandons d'activités, comme la décision de Cascades de ne plus produire de papier Kraft à East Angus. Des nouvelles qui s'accompagnent invariablement de pertes d'emplois.

Un tableau révélateur dans les documents du budget Leitao illustrait bien le problème québécois. Il montrait que s'il s'est créé 289 700 emplois entre 2007 et 2013, 141 600 l'ont été dans le secteur public et 71 700 dans la construction, en bonne partie grâce aux travaux d'infrastructure financés par l'État. Et le reste de l'économie, celle du secteur privé? À peine 76 400 emplois nouveaux, une croissance famélique de quatre dixièmes d'un pour cent en six ans. Cela décrit une stagnation du secteur privé nourrie entre autres par un processus de désindustrialisation.

Voilà pourquoi on a besoin de bonnes nouvelles. Le premier ministre Couillard annonçait cette semaine le coup d'envoi du colossal projet Renard, une mine de diamants au nord de Chibougamau, pour laquelle le promoteur, Stornoway Diamond Corporation, vient de terminer le montage financier d'un milliard. L'impact économique sera significatif, avec 475 emplois directs et 600 emplois indirects. C'est en gardant en mémoire les chiffres que je citais plus haut qu'il faut apprécier ce projet minier et comprendre à quel point le Québec a besoin du Plan Nord.

Les mines n'ont pas bonne presse au Québec, surtout vues du Plateau. Ce n'est certainement pas une activité neutre et proprette. Bien des gens aimeraient qu'on s'en passe. Mais ils souvent nourris par des images d'exploitation, de spoliation et de destruction de l'environnement qui ne correspondent plus à la réalité. Il faut aller à Malartic, voir la mine d'or à ciel ouvert, pour voir comment l'industrie s'est civilisée.

Il ne s'agit pas de se boucher le nez et d'accepter les mines parce qu'on n'a pas le choix. Mais de reconnaître que le développement minier peut être une activité de haute valeur ajoutée, comme avec ces diamants dont on ne soupçonnait même pas la présence il n'y a pas si longtemps. Cette industrie repose maintenant elle aussi sur le savoir, comme la géologie, qui a permis d'établir l'existence de ressources diamantaires.

Une société ne peut pas seulement vivre des industries de services. Il faut aussi produire des biens, fabriquer des objets et les exporter pour que l'économie repose sur des activités tangibles. En se rappelant que l'économie du savoir se développe dans les grandes villes et qu'il ne faut pas oublier les régions; que les ouvriers ne peuvent pas tous devenir concepteurs de jeux vidéos.

Cette conception du développement des ressources naturelles, qui se doublait d'une conception du territoire québécois où l'on cessait de bouder le nord, était l'un des beaux projets du gouvernement Charest. Il a été lourdement compromis par l'hostilité palpable du gouvernement Marois envers le secteur minier.

En ce sens, même si les choses sont en fait un peu plus compliquées, le lancement du projet de mine de Diamant marque aussi, au plan symbolique, la volonté du gouvernement Couillard de remettre le Plan Nord sur les rails. Voilà une excellente nouvelle.