Après le débat à quatre de dimanche soir à Radio-Canada, les chefs de partis amorçaient hier soir leur série des débats un contre un sur les ondes du réseau TVA. Le premier de ces face à face opposait Jean Charest et Pauline Marois.

C'était très différent du débat à quatre. Beaucoup plus dynamique, beaucoup plus intense. Avec, toutefois, un degré d'agressivité, qui a mené les deux protagonistes, dans un climat d'animosité palpable, à multiplier les interruptions.

Mais surtout, la formule à deux a permis à Jean Charest et à Pauline Marois de mieux développer leurs positions et de mieux pourfendre celles de leur adversaire, que ce soit sur l'économie, la crise étudiante ou la langue. Les débats classiques, comme celui de dimanche, en réunissant tous les chefs, vont dans toutes les directions et vont moins loin.

Cette différence dans la dynamique montre l'utilité de l'exercice. Le débat des chefs est certes un moment fort de la campagne électorale. Mais on pouvait se demander s'il est possible de multiplier ces rencontres sans sombrer dans la répétition. Et surtout, les électeurs auront-ils le niveau d'intérêt suffisant pour se retrouver quatre fois devant leur téléviseur? Si les deux prochains débats sont aussi intenses que celui d'hier soir, la réponse sera oui.

Qui a gagné? On ne pouvait pas s'attendre à un K.-O. entre deux adversaires expérimentés que l'on connaît, qui se connaissent, qui croisent le fer depuis des années. Le jugement sur l'issue du combat sera en outre subjectif, comme on l'a vu avec le débat de dimanche où il y a eu autant de gagnants qu'il y avait d'analystes.

Sur la gouvernance et la corruption, où les libéraux sont pourtant vulnérables, Jean Charest, très combatif, a beaucoup mieux résisté que l'on aurait pu croire, notamment en exploitant les vulnérabilités du PQ en la matière. Sur la crise étudiante, les deux politiciens ont bien défendu leurs positions, diamétralement opposées, un match nul qui, par définition, favorise Jean Charest, puisqu'une majorité de Québécois penche de son côté. Sur l'économie, Mme Marois a vivement critiqué les politiques libérales, comme sur la dette, mais n'a pu préciser sa propre stratégie de croissance. Quant à la question nationale, le flou de Mme Marois sur la tenue d'un référendum reste toujours un boulet pour elle, sauf auprès de ses partisans les plus fidèles.

Mais n'oublions pas à quoi servent ces débats. Dans un contexte politique comme celui que connaît actuellement le Québec, où le taux d'indécision est très élevé, où un nombre important d'électeurs pourraient changer d'idée, les débats télévisés jouent probablement un rôle plus important qu'en temps normal.

Ce que les électeurs cherchent, ce sont des indices qui les aideront à choisir le premier ministre, à répondre aux questions qu'ils sont très nombreux à se poser. Jean Charest a-t-il quelque chose à offrir de plus que ses adversaires pour mériter de rester malgré l'usure? Pauline Marois, une politicienne connue comme ministre, a-t-elle l'étoffe pour devenir premier ministre? Qui est François Legault, que pense-t-il, est-il prêt à prendre le pouvoir?

Qu'ont vu les électeurs dans ce débat? Que Mme Marois a réussi à être ferme et solide dans les débats sans perdre son calme. Que Jean Charest a de remarquables capacités pour rebondir dans l'adversité.

Mais n'oublions pas que le débat d'hier soir avait une particularité, celle de mettre en présence les chefs des deux vieux partis, le PLQ et le PQ, comme au bon vieux temps du bipartisme. Les deux chefs qui, selon les sondages, ont le plus de chances de former le prochain gouvernement. Mais qui, pour un intermède d'une heure, pouvaient faire comme si celui qui modifie les règles du jeu, François Legault, n'existait pas.