Que l'on aime ou non le gouvernement Charest, que l'on soit ou non d'accord avec sa philosophie budgétaire, il y a une chose qu'on ne pourra pas lui reprocher, et c'est de manquer de cohérence.

Que l'on aime ou non le gouvernement Charest, que l'on soit ou non d'accord avec sa philosophie budgétaire, il y a une chose qu'on ne pourra pas lui reprocher, et c'est de manquer de cohérence.

Le budget présenté hier par le ministre québécois des Finances Raymond n'est pas à proprement parler un nouveau budget. C'est le troisième chapitre d'un seul et même exercice budgétaire amorcé en 2009, le prolongement d'un même plan de match dont le gouvernement, chose extrêmement rare dans le monde politique, n'a pas dévié. Cela, en soi, est remarquable. Surtout pour un gouvernement malmené qui aurait pu être tenté de faire marche arrière sur ce qui peut irriter l'électorat.

En 2009, la ministre des Finances d'alors, Monique Jérôme-Forget, a défini le cadre général. À cause de la récession, le Québec verrait son déficit augmenter en 2008-2009 et 2009-2010, mais on amorcerait ensuite un processus de redressement pour le ramener à zéro en 2013-2014. Dans son premier budget, en mars dernier, Raymond Bachand a mis de la chair sur ce cadre général et a précisé le train de mesures qui permettrait d'atteindre cet objectif: taxe sur l'essence, TVQ, taxe sur la santé, hausse à venir des tarifs d'électricité, contrôle très serré des dépenses.

Ce second budget Bachand constitue le troisième élément de ce cycle budgétaire dont le message essentiel est que le gouvernement garde le cap, qu'il ne recule pas sur ses mesures, même impopulaires, et que le déficit, à 4,2 milliards en 2010-2011 passera à 3,8 milliards en 2011-2012 à 1,5 milliard en 2012-2013 et à zéro en 2013-2014.

C'est essentiellement un budget de «fine tuning», qui contient très peu de surprises et à peine 170 millions de mesures nouvelles, austérité oblige. Ses quelques interventions sont très ciblées, le Plan Nord, un nouveau mécanisme d'épargne-retraite, des mesures pour favoriser les exportations, un soutien aux universités, une politique de redevance gazière. Des mesures peu nombreuses, mais bien regroupées autour de l'idée de la création de richesse. On n'a pas craint non plus d'augmenter de 325$ les droits de scolarité ou de majorer les cotisations à la Régie des rentes.

Mais le principal débat que suscitera ce budget portera bien davantage sur l'avenir. Peut-on croire ses promesses de déficit zéro? Le gouvernement libéral réussira-t-il, oui ou non, à bien contrôler ses dépenses? C'est là dessus que le PQ et l'ADQ, à peu près dans les mêmes termes, font porter leurs critiques.

Il est vrai que les documents n'en font pas la démonstration formelle. Cela tient en bonne partie à la stratégie du gouvernement libéral qui cherche à contrôler ses dépenses sans toucher aux services aux citoyens et en ne s'attaquant donc qu'aux dépenses de nature administrative - gel salarial, dépenses informatiques, projets administratifs. Ces dépenses qui n'affectent pas les gens sont, par définition, invisibles.

Mais les données du Conseil du Trésor indiquent des succès dans le contrôle des dépenses qui augurent bien pour l'avenir, et qui permettent de croire que le gouvernement libéral sera capable de ramener son déficit à zéro en resserrant la gestion. Le problème, c'est que ce succès ne sera pas durable. On ne pourra pas véritablement contrôler les dépenses publiques sans une réforme beaucoup plus profonde des deux grands postes budgétaires qui grugent l'essentiel des fonds publics, la santé et l'éducation. Manifestement, les libéraux ne semblent pas prêts à s'engager dans cette voie.

Mais dans l'ensemble, le budget de Raymond Bachand est un bon budget, en ce sens qu'il garde le cap, qu'il contribue comme il le doit à sortir le Québec d'une crise financière majeure, et qu'il réussit à le faire sans poser de gestes sauvages.