On connaît la cassette. Les écoles privées, en partie subventionnées, drainent les meilleurs étudiants. Cet écrémage permet au privé d'afficher d'excellents résultats scolaires. En outre, il affaiblit l'école publique en le privant de ses meilleurs éléments. Voilà pourquoi le gouvernement doit cesser de subventionner les écoles privées, pour que les enfants reviennent dans le giron du réseau public et contribuent ainsi à le redynamiser.

On connaît la cassette. Les écoles privées, en partie subventionnées, drainent les meilleurs étudiants. Cet écrémage permet au privé d'afficher d'excellents résultats scolaires. En outre, il affaiblit l'école publique en le privant de ses meilleurs éléments. Voilà pourquoi le gouvernement doit cesser de subventionner les écoles privées, pour que les enfants reviennent dans le giron du réseau public et contribuent ainsi à le redynamiser.

Ce discours, au coeur du débat, est simpliste. La réalité, elle, est pas mal plus complexe. Une intéressante étude économique, publiée l'an dernier, démontre par exemple que l'écrémage n'est pas le principal facteur de succès des écoles privées. Elle montre aussi que l'appauvrissement du public est moins sérieux qu'on le dit. Une étude comme celle-là ne clôt évidemment pas la discussion, justement parce que les choses sont compliquées. Mais elle rappelle que les dogmes sur lesquels repose tout ce débat sont fragiles. Et qu'un peu plus de subtilité et de nuances ne feraient pas de tort.

Les écoles privées, au secondaire, sont plus populaires qu'ailleurs au Canada. Elles attirent un élève sur cinq, parce que le financement couvre 60% des coûts, ce qui permet d'exiger des frais de scolarité abordables pour les classes moyennes. Leurs résultats scolaires sont nettement meilleurs que ceux du public - notes, taux de passage, incidence du décrochage.

La thèse voulant que cette performance repose sur un succès facile, la capacité des écoles privées d'aller chercher les meilleurs étudiants grâce à la sélection, est contredite par les économistes Pierre Lefebvre et Phillip Merrigan, de l'UQAM, dans un cahier de recherche du CIRPÉE. Je résume grossièrement cette étude savante.

Avec les données d'une enquête longitudinale de Statistique Canada, qui permet de suivre des cohortes d'enfants, les auteurs constatent que les jeunes qui passent du primaire public au secondaire privé voient leur performance académique s'améliorer. Leurs résultats en mathématiques augmentent de cinq à 10 points. Le score des écoles privées tient donc largement au fait qu'elles améliorent le rendement scolaire de leurs élèves. On ne se contente pas de recruter de bons élèves, on les rend meilleurs.

Bien sûr, l'écrémage existe, avec la et à cause de la motivation des familles qui choisissent le privé. Mais d'autres facteurs entrent en jeu, comme l'environnement pédagogique du privé, sa valorisation de la performance académique et le fait que les enfants y travaillent beaucoup plus fort que dans le public.

Il est vrai que la performance du privé est remarquable. Avec le PISA de 2006, le Programme international pour le suivi des acquis des élèves, de l'OCDE, qui mesure les connaissances des élèves de 65 pays, dont le Canada, les étudiants québécois du privé ont des résultats exceptionnels. En mathématiques, leur note est de 594, largement devant les pays qui dominent le classement mondial, Taiwan, avec 549 et la Finlande, avec 548.

Ce qu'on sait moins c'est que les étudiants du secteur public québécois ont aussi une excellente note, 530, ce qui les place au premier rang canadien, aux côtés de l'Alberta, et au sixième rang mondial, devant la Suisse, le Japon, l'Allemagne! Autrement dit, notre secteur public, au plan académique, ne semble pas mal en point. Ce succès du public s'explique sans doute en partie par la qualité de nos programmes en maths. Mais il tient aussi à la concurrence qu'impose un secteur privé fort, qui a forcé le public à réagir et à se dépasser.

Que peut-on en conclure? Si on force le retour des jeunes dans le réseau public, on met fin à ce climat d'émulation. On les prive aussi de l'environnement académique du privé qui leur permettait d'obtenir de meilleurs résultats. Une solution mécanique colorée par de la pensée magique.