Le problème le plus grave dont souffre notre système de santé, celui dont les conséquences sont les plus dramatiques, c'est la pénurie d'omnipraticiens. Ce problème, au lieu de se résorber, va en s'empirant. Il manquait 1000 médecins de famille au Québec il y a deux ans. C'est 1100 maintenant, et ce sera probablement 1200 dans deux ans.

Le problème le plus grave dont souffre notre système de santé, celui dont les conséquences sont les plus dramatiques, c'est la pénurie d'omnipraticiens. Ce problème, au lieu de se résorber, va en s'empirant. Il manquait 1000 médecins de famille au Québec il y a deux ans. C'est 1100 maintenant, et ce sera probablement 1200 dans deux ans.

Pourquoi est-ce si grave? Parce que les généralistes sont les piliers de la fameuse première ligne que l'on tente de bâtir, ce projet qui consiste à garantir à chaque citoyen l'accès à un médecin de famille. C'est incontournable si on veut une médecine de qualité, qui permet le suivi les patients. C'est également essentiel pour offrir une porte d'entrée au réseau qui réduirait la pression sur les hôpitaux et sur les urgences.

Mais on est loin du compte. Deux millions de Québécois n'ont toujours pas de médecin de famille. Les listes d'attente sont interminables, à moins d'avoir un contact. Les rendez-vous sont difficiles à obtenir. Ce qui pousse les gens vers les urgences ou vers l'expéditive médecine sans rendez-vous.

Cette pénurie est plus grave que celles des infirmières, parce qu'il existe un bassin d'infirmières que l'on peut essayer de ramener dans le réseau. Dans le cas des médecins, on ne voit pas d'issue. Les besoins augmentent avec le vieillissement de la population, le départ des médecins plus âgés va s'accélérer, et la relève n'est pas au rendez-vous. Pour combattre la pénurie, on a certes ouvert les portes des facultés de médecine. Mais ces jeunes diplômés préfèrent devenir spécialistes plutôt que médecins de famille; 184 places disponibles pour une résidence en médecine familiale sont vacantes.

Que fait le gouvernement? En toute logique, ce devrait être au coeur des priorités. Mais on ne perçoit ni le sentiment d'urgence ni la cohérence dams l'action chez un ministre qui agit essentiellement en mode réactif.

Ce silence s'explique peut-être parce que cette question revient à la surface dans le cadre des négociations avec la Fédération des médecins omnipraticiens. Ceux-ci en ont fait un enjeu, notamment en lançant un vidéo sur YouTube, intitulé «Diagnostic», qui vise évidemment à défendre leur cause, mais qui a l'élégance d'inscrire la démarche dans une perspective de bien commun.

Il est clair qu'une partie du problème est lié à la rémunération. Les spécialistes ont obtenu un rattrapage mérité. Résultat, l'écart de rémunération entre spécialistes et généralistes atteint maintenant 55%. Cet écart démesuré, qui peut détourner les jeunes de la médecine familiale, doit être réduit.

Mais il n'y a pas que l'argent. Une des pistes de solution, c'est la revalorisation de la médecine familiale, qui fait figure de parent pauvre face aux spécialistes. Une image que le gouvernement, les facultés de médecine, la profession médicale doivent combattre, parce que la fonction de généraliste est essentielle.

Il faut aussi multiplier les efforts pour alléger la tâche des omnis, trop peu nombreux et surchargés, en poussant bien plus loin la pratique collaborative avec les infirmières, les autres professionnels de la santé. On a beaucoup de progrès à faire de ce côté. On pourrait également les épauler en comblant nos retards gênants dans le développement de dossiers médicaux informatisés et dans l'utilisation de l'internet en santé.

On pourrait aussi compter sur l'importation, en allant chercher ailleurs les médecins dont on a besoin, notamment là où on est certains que la formation est équivalente à la nôtre, et en éliminant les obstacles à leur intégration.

Le problème est majeur, il est concret, il est urgent. Il y a des solutions concrètes, quoiqu'elles sont coûteuses, complexes, et que leur impact ne sera pas immédiat. Qu'est-ce qui manque alors? La volonté, la cohérence et le sens des priorités.