Ces temps-ci, il y a plus de bonnes nouvelles économiques que de mauvaises. Même les données sur le PIB pour le premier trimestre, une baisse de 5,4% à un rythme annuel, la plus forte chute depuis 1991, ont provoqué un soupir de soulagement, parce que cette baisse est nettement moins mauvaise que ce à quoi on s'attendait.

Les multiples signes - un recul de l'économie moins sévère en février et en mars, une reprise des ventes au détail, une hausse de l'indice de confiance des consommateurs, une hausse de l'emploi en avril, une remontée du prix des matières premières - font croire que le pire est derrière nous et que le scénario d'une reprise au quatrième trimestre, ou même au troisième, est très plausible. Le troisième trimestre, rappelons-le, a commencé lundi.

 

Mais ce n'est pas pour autant le temps de fêter. D'abord, parce ce ne sera pas une partie de plaisir, mais un processus lent, laborieux et parsemé d'embûches. Ensuite, parce que la fin de la récession n'annonce pas la fin des problèmes. Le choc de la crise mondiale est puissant, il provoquera des transformations profondes qu'il faudra des années à digérer.

Il y a encore des gens qui doutent de la proximité de cette reprise, même si la plupart des organismes de prévision l'annoncent avec un consensus assez solide. On peut comprendre cette méfiance. Peut-on croire les prévisionnistes, quand on se souvient de leurs erreurs, eux qui n'ont pas vu la crise venir, qui n'en ont pas prévu l'ampleur, et qui ont dû revoir leurs pronostics mois après mois? Mais on peut davantage leur faire confiance parce que leurs pronostics sont de plus en plus confirmés par les faits, les statistiques économiques ou l'observation de l'activité économique et commerciale.

Il y a cependant beaucoup de confusion sur la signification du concept de reprise. Cela décrit un revirement de l'économie qui cesse de reculer pour recommencer à croître. C'est déjà quelque chose. Mais ce n'est pas pour autant un retour à la normale. Avec une reprise tiède, comme celle que l'on prévoit, un taux de croissance anémique de 1,5% à 2% en 2010, il faudra deux bonnes années pour que l'activité économique retrouve le niveau qu'elle avait avant la récession.

Le concept de reprise ne décrit donc pas un retour à la prospérité, mais plutôt un lent processus de rattrapage. C'est pour cette raison que j'utilise souvent l'analogie de la pneumonie. Une maladie potentiellement mortelle, que l'on peut vaincre avec des antibiotiques. Lorsque les médicaments ont fait leur oeuvre et éliminé la bactérie, le malade est peut-être officiellement guéri, mais il lui faudra des semaines ou des mois avant de retrouver son énergie.

La reprise est d'autant moins un signe de retour à la normale que ses effets seront très inégaux; des régions, des industries, seront encore en récession même quand l'économie sera en croissance. En outre, les effets secondaires d'une récession, comme les faillites ou les mises à pied, continueront à se manifester même quand la récession sera officiellement terminée. Enfin, une récession laisse des cicatrices qu'une reprise, même vigoureuse, ne peut pas effacer, par exemple dans l'automobile ou la forêt.

Surtout, ce qui définit cette récession, ce n'est pas sa puissance, puisqu'elle semble moins profonde que celles de 1981 et de 1991, mais plutôt le fait qu'elle s'inscrit dans une crise mondiale. Et quand nous en serons sortis, il faudra s'ajuster aux changements majeurs que cette crise apportera à la façon dont on investit, on emprunte, on consomme, on gouverne. Il n'y aura pas de retour à la normale, parce que le monde aura changé. J'y reviendrai vendredi.