Les marchés boursiers, vendredi, ont glissé à leur plus bas niveau depuis six ans. L'indice Dow Jones des valeurs industrielles a clôturé à 7365. Cette dernière baisse s'expliquait par les mauvais résultats trimestriels de certaines entreprises. Mais la descente aux enfers a commencé il y a deux semaines. Et ce qui a provoqué la dégringolade, ce sont les deux initiatives de relance économique de l'administration Obama.

Sur le plan strictement moral, on peut difficilement ne pas être scandalisés. Le monde financier, responsable de la crise financière, après nous avoir mis dans le trou, choisit de bouder quand l'État, avec des fonds publics, fait des efforts considérables pour nettoyer les dégâts.

Les marchés se sont effondrés lorsque le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, il y a 10 jours, a rendu publiques les grandes lignes de son plan de sauvetage du système bancaire où il décrit comment il utiliserait les 350 milliards qui restaient dans l'enveloppe mise de côté par l'administration Bush. Ce plan pourrait dégager des fonds de 2000 milliards avec l'aide du secteur privé.

Les marchés boursiers n'ont pas du tout aimé: trop imprécis, trop compliqué, a-t-on dit, pas de détails sur la nature de la participation du secteur privé. Le Dow Jones a donc plongé de 4,6% pour passer sous la barre des 8000 points, une énorme débandade, qui s'expliquait surtout par la chute des actions du secteur financier.

Mais en fait, par définition, un tel plan doit être compliqué. Il ne peut pas non plus être précis, parce que le gouvernement peut difficilement tout décider en vase clos. La vérité, c'est que les marchés ont découvert que ce n'était pas une solution miracle et que ce plan ne ferait pas de cadeaux aux banques, qu'il les forcerait à des sacrifices, qu'il serait contraignant pour le secteur financier. Et donc, qu'à court terme, ce plan ne ferait rien pour aider le cours des titres bancaires à remonter. Les actionnaires ont vendu, en fonction de leurs intérêts immédiats.

La première erreur qu'on a faite, comme d'habitude, c'est de voir les marchés boursiers comme un porte-parole de l'entreprise et du monde financier, quand ce sont essentiellement un ensemble de détenteurs d'actions. L'autre erreur, c'est d'interpréter leur geste, qui procède d'un calcul, comme une analyse fine et un jugement éclairé sur le plan de sauvetage. Les marchés ont également boudé le plan de relance de 787 milliards de Barack Obama. Son adoption par les deux chambres et sa signature par le président n'ont pas réussi à redonner un quelconque élan aux bourses, essentiellement parce que les marchés ont réalisé que les résultats ne seraient pas immédiats. L'indice Dow Jones a terminé la séance de mardi en baisse de 3,79%, à 7552 points. C'était son niveau le plus bas depuis le 20 novembre.

C'était une réaction parfaitement incohérente parce que, peu importe ce que l'on pense de ces mesures proposées par le président, il est évident que les États-Unis se retrouvent dans une meilleure position après la promulgation de ce plan de relance. Mais pourquoi la panique? «La récession est là et personne ne peut prédire sa durée, d'où l'inquiétude des marchés», a finement résumé un analyste. Faut-il rappeler que la récession était là le mois dernier, et même le trimestre dernier?

Bref, les investisseurs sont déçus de découvrir qu'il n'y aura pas de recette magique ni de guérison immédiate. Il y a là quelque chose de profondément immature. Cette réaction illustre certes une nervosité des marchés dont il faut prendre acte. Mais il faudrait éviter d'y voir une lecture lucide et rationnelle de la situation.