Depuis le début de la saison des primaires américaines, le candidat à l'investiture démocrate Bernie Sanders a réussi à prouver qu'il peut rejoindre une majorité de jeunes et de femmes, et qu'il peut percer chez les ouvriers et les cols bleus.

Mais son vrai test aura lieu samedi, en Caroline-du-Sud, où les Noirs forment la majorité des électeurs démocrates. Or, de sondage en sondage, Hillary Clinton confirme son avance chez les Afro-Américains. Un sondage national datant de la fin de l'été lui accorde 80 % des intentions de vote chez les électeurs noirs - contre 23 % pour le sénateur socialiste du Vermont. En Caroline-du-Sud, l'écart est de 57 % à 33 %. A priori, une avance insurmontable...

Mais Anoa Changa, engagée dans le groupe « les Afro-Américains pour Bernie Sanders », préfère ne pas penser aux sondages. Cette avocate de 34 ans vit à Atlanta, en Géorgie, où le sénateur du Vermont traîne aussi largement la patte derrière Hillary Clinton.

Mais Anoa Changa n'en démord pas : à ses yeux, c'est ce politicien socialiste qui tient le discours le plus prometteur à la fois pour les femmes et pour les Noirs.

Pas tant parce qu'il se consacre spécifiquement aux problèmes raciaux, mais parce qu'il propose de corriger les fléaux sociaux qui affectent en premier lieu les communautés noires, tels le chômage, le sous-emploi et l'extrême pauvreté.

Ainsi, souligne Anoa Changa, de tous les candidats aux primaires américaines, le sénateur Sanders est le seul à proposer de hausser le salaire moyen jusqu'à 15 $US l'heure - soit deux fois son taux actuel. Une telle mesure profiterait à tous les travailleurs coincés au bas de l'échelle salariale. Où on trouve un nombre disproportionné de Noirs...

De la même façon, souligne Anoa Changa, en proposant de mettre sur pied une assurance médicale universelle, ou encore en favorisant la syndicalisation, Bernie Sanders répond aux préoccupations des plus démunis - parmi lesquels les Noirs sont malheureusement surreprésentés.

En fait, dit Anoa Changa, il est difficile de séparer les problèmes économiques des problèmes raciaux aux États-Unis : ces deux réalités se superposent. Et sur les questions plus spécifiques aux minorités, le sénateur Sanders a fait ses classes, et depuis longtemps. Une récente vidéo qui a circulé sur les réseaux sociaux montre les images de son arrestation à Chicago, dans les années 60, alors qu'il participait à une manifestation en faveur des droits civiques des Noirs.

Aux yeux d'Anoa Changa, ça lui donne une immense crédibilité, bien plus grande que celle de Hillary Clinton qui « s'intéresse à la question raciale uniquement pour être élue ».

Oui, mais alors pourquoi les électeurs noirs sont-ils si impénétrables au message de Bernie Sanders ?

« Le principal problème du sénateur Sanders parmi les électeurs noirs, c'est que son nom est beaucoup moins connu que celui de Hillary Clinton », constate Anoa Changa. Un sondage Gallup réalisé à la fin de l'été montre que les deux tiers des électeurs noirs ne savent pas trop qui est Bernie Sanders. Il a sûrement gagné en notoriété depuis, mais il avait une pente abrupte à remonter.

Bernie Sanders se heurte aussi à un deuxième mur, constate Anoa Changa. Beaucoup de gens se demandent s'il pourrait gagner la présidentielle. Et craignent qu'en votant pour Bernie Sanders ils ne contribuent, en réalité, à faire élire un président républicain.

Bernie Sanders a bien reçu l'appui de quelques figures de proue chez les Afro-Américains. Le cinéaste Spike Lee, le chanteur Harry Belafonte, le comédien Danny Glover, le rappeur Killer Mike ou encore le philosophe Cornel West.

Mais est-ce assez pour lui permettre de faire sa marque dans l'électorat noir, sans lequel sa campagne à l'investiture démocrate ne peut que piquer du nez ? Début de réponse samedi, en Caroline-du-Sud.