Les vacances sont terminées, et plusieurs d'entre vous pestent encore contre la météo. "Un été pluvieux, pourri", disent certains. "Pas du tout! Il a fait tellement beau", rétorquent d'autres. Mais dans quel pays vivons-nous? Un pays divisé par les perceptions régionales. Et si c'est vrai pour la météo, c'est aussi le cas en politique. Commençons par la météo, LE sujet de discussion de l'été, entre deux phrases olympiques et une montée de lait sur le prix de l'essence.

Est-ce qu'il fait beau par chez vous? La réponse à cette question varie. Comme en politique d'ailleurs. Le ciel est bleu pour certains, alors que d'autres n'y voient que du rouge. Pourtant, tout n'est peut-être qu'impression. La perception que nous avons de la météo dépend bien souvent de plusieurs facteurs. En politique aussi. Les variations régionales sont importantes et faussent souvent la donne. Même chose en politique. Mais laissez-moi terminer mon analyse de l'été avant de me jeter dans les sujets de la rentrée.

La météo, donc. Il est vrai que certains y ont goûté. Les Sherbrookois et les Québécois (ceux du 400e) se souviendront de juin 2008, le plus important en matière de pluie depuis 1962 et 1943 respectivement. Pendant ce même mois, les Montréalais ont enregistré un record de température (31 C) durant la fin de semaine des 7 et 8 juin quand la chaleur et l'humidité accablantes ont provoqué beaucoup d'air instable, ce qui a lancé le bal des orages violents dans cette région. Mais méfiez-vous de votre mémoire, amis Montréalais. Juin 2008 se classe en 17e position pour le mois de juin le plus sec des 67 dernières années et au neuvième rang des mois de juin les plus chauds depuis 1941. "Ah oui, mais en juillet, il a plu tous les jours", direz-vous. Bon, on relaxe un peu. Si l'on s'en tient aux précipitations, il est vrai qu'il est tombé environ 30% plus de pluie en juillet que la moyenne mensuelle, ce qui classe ce mois au 18e rang du palmarès des mois de juillet les plus pluvieux des 67 dernières années. Pas de quoi noyer un chat. Et puis, consolez-vous, les Sherbrookois n'avaient pas encore fini d'éponger leur record du mois précédent qu'ils voyaient leur bilan pluviométrique de juillet surpasser de 100 mm leur moyenne mensuelle, soit 84% plus de pluie que la normale. Malgré la réalité, on interprète pour se complaire dans nos perceptions. Comme en politique.

On n'a pas eu d'été? Pourtant, les moyennes de température pour les mois d'été sont encore supérieures aux moyennes historiques. Et l'été s'est bel et bien présenté en plusieurs régions, particulièrement dans l'est de la province. Heureux soient les Gaspésiens, car juillet a été sec et chaud. En matière de précipitations, Gaspé n'a connu que cinq mois de juillet plus secs depuis 1968. Mais, surtout, les Gaspésiens ont vu juillet battre presque tous les records de chaleur: le deuxième pour la chaleur depuis 40 ans! Les Madelinots aussi l'ont eu chaud et sec. Je vous vois déjà planifier vos vacances de l'été prochain en Gaspésie ou aux Îles. Méfiez-vous pourtant des aléas de la météo, de ses humeurs et de ses variations annuelles. Si vous voulez une valeur sûre selon les statistiques, optez plutôt pour le Grand Nord, qui voit ses températures augmenter d'année en année. Kuujjuaq a connu son mois de juin le plus chaud depuis 1947 et il a vu le mercure franchir la barre des 20 C à 13 reprises au cours de ce mois, alors que la normale n'est que de 3,6 jours. Et ce n'est rien, juillet a aussi battu le record de 1947, en plus d'enregistrer deux journées au-dessus de 30 C. En fait, pour vous montrer à quel point Kuujjuaq représente une valeur sûre pour vos prochaines vacances, lisez bien ceci: "La température moyenne mensuelle de la localité de Kuujjuaq est au-dessus de la normale depuis maintenant 11 mois de juillet consécutifs, soit de juillet 1998 à juillet 2008", a conclu Environnement Canada. Chérie, on s'en va à Kuujjuaq l'an prochain!

D'un point de vue météorologique, le Grand Nord constitue une valeur sûre. En politique aussi. Bon, nous y revoilà! Non, mais vous avez vu la série d'annonces politiques concernant l'Arctique? Payant, politiquement. Après tout, difficile d'être contre la vertu.

Puisque les vacances sont terminées, que l'été est bientôt chose du passé, que les Jeux olympiques ont couronné leurs athlètes et que le prix du baril de brut s'est temporairement stabilisé, il faudra bien trouver d'autres sujets de discussion pour la rentrée. J'aurais aimé quelque chose de plutôt insignifiant. Je me suis même surpris à espérer le retour médiatique de Julie Couillard. Mais non, ce sera malheureusement une rentrée toute politique. La politique, c'est comme la météo. Beaucoup de chiffres qui peuvent faire dire bien des choses. Beaucoup de promesses aussi. Souvenez-vous des prédictions d'Environnement Canada pour cet été: on nous annonçait un été chaud et sec. La météo, c'est comme la politique. Beaucoup de promesses non tenues.

Ce sera donc un automne chaud, puisqu'il sera électoral, avec ses impressions, ses perceptions et ses variations régionales. Et surtout ses promesses, trop souvent non tenues. Cet automne, si la tendance se maintient, je nous prédis de sombres nuages au-dessus de certaines régions du Québec...

LA SCIENCE EN BREF

En septembre 2007, je faisais état de chiffres alarmants sur la fonte de la banquise dans l'Arctique. Ce fut une année record pour la fonte de la calotte polaire depuis que les scientifiques utilisent les images satellitaires pour suivre les variations de la banquise dans l'Arctique (30 ans). En comparant la superficie moyenne de la glace de mer arctique, basée sur les données enregistrées entre 1979 et 2000, la banquise a perdu 2,61 millions de kilomètres carrés - soit un million de milles carrés - ou l'équivalent en superficie de l'Alaska et du Texas combinés, ou encore 10 fois la taille de l'Angleterre!

L'hiver dernier a été plutôt froid dans certains secteurs de l'Arctique, et la glace de mer s'est reformée comme chaque hiver, dépassant même les superficies moyennes. Certains ont cru à une bonne nouvelle, mais cette glace, jeune et mince, offre peu de résistance à la chaleur estivale. Les derniers relevés scientifiques sur l'étendue de la glace de mer arctique confirment l'inquiétante disparition estivale de la banquise: si la tendance se maintient, nous pourrions bien battre le record de tous les temps encore cette année. Il reste encore un long mois de fonte dans l'Arctique, et les récentes données n'annoncent rien de bon. L'hémorragie se poursuit, et la perte de la "vieille" glace, plus dure et résistante, se confirme d'année en année. Pas étonnant que le gouvernement canadien veuille mieux protéger le trafic maritime dans le Nord. Le légendaire passage du Nord-Ouest est de nouveau libre de glace cette année, et de plus en plus de navires s'aventurent dans les eaux arctiques. Les risques de catastrophes écologiques sont réels, puisque les cartes bathymétriques demeurent encore imprécises dans plusieurs secteurs de l'Arctique.

TRUCS ET AGENDA

Cette section vous appartient! Écrivez-moi pour partager vos trucs de la semaine avec les lecteurs de La Presse. Vous organisez une activité populaire qui mérite d'être soulignée? Faites-le savoir en m'écrivant: jlemire@lapresse.ca. Et puisqu'il est question de rentrée, commençons l'année scolaire du bon pied! Cette année, offrez à vos enfants la boîte à lunch écolo. Rien de bien compliqué. Investissez dans des contenants réutilisables et dites adieu aux produits jetables. Fini les petites boîtes de jus, les emballages superflus et tout ce qui se retrouvera inutilement à la poubelle. Rien de plus simple que d'utiliser une gourde à jus lavable, des contenants hermétiques pour le sandwich, la salade ou les restes du repas du soir. Une bonne habitude qui ne se limite pas seulement aux enfants... Allez, bonne rentrée!

L'auteur est biologiste, photographe et cinéaste. Il a été chef de trois missions à bord du voilier Sedna IV, dont la plus récente en Antarctique. Il signe tous les dimanches une chronique dans nos pages.