Oui, il y a eu de magnifiques moments: ces danseurs aux gants encrés traçant des dessins par leurs fluides mouvements. Ces enfants mignons comme des poupées. Ces feux d'artifice tombant comme les branches de cerisiers trop pleines de fleurs.

Oui, il y en a eu de l'élégance, de la précision, une maîtrise impeccable. Des lignes très droites. Des courbes parfaites. Et des flashs d'une grande poésie, comme ces personnages volants façon Tigre et dragon d'Ang Lee, dont l'olympien Li Ning, parti allumer une vasque olympique qui avait l'air, d'ici, absolument surdimensionnée.

Mais la première image qui m'est venue à l'esprit, hier, en regardant la cérémonie d'ouverture des Jeux de Pékin, venait de Corée-du-Nord.

En regardant la télé, je me suis dit que tout cela ressemblait à un célèbre festival nord-coréen appelé Arirang, un autre spectacle sportif à grand déploiement, gigantesque, rempli de milliers de figurants où, rigoureusement encadrés et placés et alignés, les individus disparaissent pour se transformer en points avec lesquels on dessine de grands tableaux.

Hier, à Pékin, des milliers de Chinois figurant à la cérémonie d'ouverture jouaient le rôle de pixels, déboulant les chiffres du compte à rebours vers les 8h08 le 8 du 8.

Des humains qui deviennent des pixels.

Que dire de plus...

Oui, c'était beau, mais c'était long et c'était carré, et quand les athlètes des différents pays ont commencé à défiler, on aurait dit que ces invités venaient soudainement d'avoir la permission d'entrer dans un spectacle qui n'était pas le leur. Détonnant avec leurs adorables boubous, leurs mises en plis décoiffées, ce sont eux qui ont ramené l'événement sur Terre... Dans ce contexte presque trop léché, trop bien réglé, même l'étrange costume de l'équipe canadienne, qui donne aux athlètes des airs de commis de Petro-Canada, s'est soudainement révélé sous un jour sympathiquement décalé.

Les Chinois ont demandé au cinéaste Zhang Yimou de réaliser leur cérémonie d'ouverture. Nous, on dirait qu'on a demandé à l'ancien costumier d'Elvis, époque Vegas, de nous aider avec nos habits blanc et rouge. Rien de mal à ça.

Comme je vous dis, c'était rafraîchissant dans ce grand tableau trop parfait.