Les Jeux olympiques de Pékin débutent cette semaine. Le monde entier débarque en Chine. Et les Chinois sont prêts. Ils ont pensé à tout. Ils ont rasé les quartiers malfamés, expulsé les sans-abri, endetté la population.

Bref, ils ont fait exactement la même chose que nous en 1976! Mais c'est pire parce que c'est en Chine et que, là-bas, on ne peut pas se plaindre. Tandis qu'ici, on peut gueuler. Et Dieu sait qu'on a gueulé. On gueule même encore. On braille encore sur le Stade olympique. Ça ne change rien. Il demeure un éléphant blanc. Mais au moins ça fait du bien. Bref, tous les régimes font mal.

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Au fond, la démocratie, c'est le droit de se plaindre. C'est peut-être Confucius qui a raison: mieux vaut accepter ce que l'on ne peut changer. Au moins, on avance. Les Chinois avancent. De force, mais ils avancent.

Faut dire qu'ils sont une grosse gang. Imaginez, on est 7 millions et on a de la misère à s'entendre. Se séparer ou ne pas se séparer? Accommoder ou ne pas accommoder? Paul ou pas Paul? Eux, ils sont 1 321 851 888! Ils sont tellement nombreux qu'on a tendance à arrondir, à juste mentionner qu'il y a un milliard de Chinois. Ce faisant, on laisse tomber l'équivalent de la population des États-Unis au complet. Quantité négligeable!

Un milliard de personnes qui vivent ensemble, ça ne doit pas être toujours évident. Pour la première fois, le nombre d'habitants du pays qui reçoit dépasse la cote d'écoute planétaire des Jeux. Ça va être beau quand ils auront tous une antenne parabolique!

Les Jeux de Pékin seront spéciaux - ça, on le sait déjà. Ne serait-ce que parce que, pour la première fois aussi, tous les souvenirs ramenés auront été faits dans le pays hôte. Les souvenirs d'Athènes, de Sydney, d'Atlanta étaient made in China.

Histoire de calmer les critiques, à la cérémonie d'ouverture des Jeux de Pékin, la flamme olympique sera allumée par un moine tibétain. Ce qui est un peu inquiétant, c'est qu'il y a un moine tibétain prévu pour la répétition, et un autre moine tibétain prévu pour le grand soir...

Le gouvernement de Hu Jintao, soucieux de donner une image triomphante de la Chine, n'a laissé aucun détail au hasard. Le président et sa garde ont écrit eux-mêmes chacun des messages des biscuits chinois qui seront remis aux athlètes, aux journalistes et aux touristes à la fin des repas. Vous savez, ces petits biscuits secs twistés qui contiennent un bout de papier sur lequel on peut lire soit son avenir, soit une phrase pleine de sagesse.

Voici, en primeur, les pensées écrites sur les biscuits chinois officiels des Jeux olympiques de Pékin:

Vous allez adorer votre voyage en Chine et le dire à tout le monde.

Vous reviendrez ici dans un proche avenir pour investir.

L'important n'est pas de gagner, c'est de regarder les Chinois gagner.

Mieux vaut manger un chien savant qu'une vache folle.

La vérité sort de la bouche de l'interprète chinois.

Confucius a dit qu'il faut toujours être positif, à moins d'être un test d'urine.

L'habit ne fait pas le moine, alors fouillez-le bien avant de le laisser entrer dans le stade.

Le silence étant la plus belle marque de respect, respectons les droits de l'homme en n'en parlant pas.

Après la pluie, vient le smog.

Les murs ont des oreilles, alors imaginez les oreilles de la muraille de Chine! C'est comme un milliard de prince Charles et de Garou.

Si la foi peut déplacer des montagnes, le gouvernement peut bien déplacer des quartiers.

Dans les petits pots, les meilleurs anabolisants.

Il ne faut pas vendre la peau de l'ours avant de l'avoir tué, il faut vendre le panda au complet à un zoo américain.

Les derniers seront les premiers... oubliés.

Chat échaudé craint les restaurants chinois.

Une femme médaillée vaut autant qu'un homme... sans médaille.

Comme disait Confucius: Celui qui est respectueux sans mesure est fatigant. Celui qui est franc sans mesure est insolent. Celui qui écrira contre la Chine ira en dedans!

Comme disait Lao Tseu: Ceux qui font des phrases ne sont pas d'honnêtes gens. Ceux qui font des messages textes, encore moins.

Comme disait Li Po: La beauté est comme le clair de lune, un bol de lait qui inonde tout le paysage (je sais que ça n'a pas rapport, mais c'est beau).

Bon, assez de biscuits aux pensées difficiles à digérer.

J'adore les Jeux olympiques. Je serai donc incapable de les boycotter. Comme la plupart d'entre vous, je vais passer les prochains jours à regarder athlétiquement la télé. Question d'avoir la conscience en paix, je lirai Tintin au Tibet durant les pauses.

J'espère que les athlètes québécois reviendront couverts de médailles. J'imagine déjà Alexandre Despatie en conférence de presse à Dorval, l'or au cou, répondant avec enthousiasme à la première question d'un journaliste: «Alexandre, dis-nous, qu'as-tu préféré, Pékin ou Beijing?»

Bons Jeux, tout le monde!