Bon, O.K., là, ça va, j'ai compris. Paul McCartney est une idole, une icône, une légende, un morceau du patrimoine musical mondial. Pas touche.

Le pire, c'est que je croyais que cette chronique-là passerait inaperçue. Sérieux! Mais non, des dizaines de courriels fielleux et de messages rugueux sur mon blogue ont accueilli ce papier. Crétin, stupide, en**lé, tout y est passé.

Ce qui surprend, c'est la violence du propos. Je vous jure, si je m'étais assis à côté de certains lecteurs, jeudi matin, au restaurant, ils m'auraient balancé leurs oeufs brouillés dans la face.

C'est comme ça quand on égratigne une idole. Les fans prennent la chose comme si vous aviez craché au visage de leur maman.

C'est pour ça que je n'ai pas d'idoles, remarquez. Premièrement, elles vous déçoivent, c'est inévitable. Dope, divorce, fraude fiscale: on finit toujours cocu, contemplant le poster de l'idole, les dents serrées. Deuxièmement, je peux concevoir quelques raisons de lancer mes oeufs brouillés dans la face de quelqu'un, mais pas pour cause de bobo à une de mes idoles. C'est une mauvaise raison de se retrouver avec un casier judiciaire.

Éliane m'a culpabilisé: «Pour une génération, c'est le musicien qui se rapproche le plus de ce qu'on pourrait appeler le grand rêve, la grande nostalgie, la jeunesse. Bref, une pluie de bonheur...»

Lee Abbott: «Et Mozart? Son dernier hit date de plus longtemps encore que McCartney et on ne boude pas notre plaisir à l'écouter encore et encore...»

Robert Simeone, bien crinqué: «Dans 400 ans, tes descendants et les miens se rappelleront le passage de Sir Paul à Québec...»

Robert, vous ne seriez pas le gars qui a dit, en 1984, qu'il y aurait tellement de monde à Québec pour voir les grands voiliers qu'on allait devoir se garer à Drummondville?

Frédéric Michaud a vu dans la chronique de jeudi dernier une attaque sur Québec: «Ton texte pue une forme de jalousie, de futiles guerres de clocher Québec-Montréal.»

Rosaire Nault: «Pourquoi vomir sur Québec?»

Sur mon blogue, un gars a (encore) sorti Mozart: «Tu professes ton mépris pour les choix de Québec, tu t'attaques au Mozart des temps modernes...»

Wô, les moteurs! La chronique ne lançait aucun boulet sur Québec. J'ai aussi mentionné le réflexe montréalais de s'insurger quand un artiste ose ne pas venir donner un show ici.

Alors ne faites pas du Paris Match à l'envers, de grâce: j'évoquais cette folle envie de reconnaissance du Québec, pas DE Québec, envers l'étranger. Rien à voir avec Québec, la ville. Tout à voir avec nous, Québécois.

Un Québécois refuse de venir jouer avec le Canadien? Syncope collective, on sort les gros mots (traître, chicken)!

Un animateur de radio de Miami se moque des Québécois en Speedo? Le Royal 22e se tient prêt à débarquer en Floride!

Un humoriste américain, Conan O'Brien, se pointe à Québec. Sa marionnette, un chien, fait des commentaires déplaisants sur les francophones? Nos politiciens, portés par l'indignation populaire, ont quasiment menacé de rompre les relations diplomatiques avec les États-Unis d'Amérique.

C'est de ça que je parlais. De ce besoin que nous avons, Québécois, d'exister dans les yeux de l'étranger. Rien à voir avec Québec, la ville. C'est pareil pendant le Grand Prix de F1, en juin, à Montréal. Collectivement, nous sommes alors de sympathiques caniches heureux de recevoir des miettes de jet-set que le Grand Cirque nous tend avec commisération.

Être sûrs de nous, on se ficherait du regard des autres...

Je sais que vous seriez contents si je faisais acte de contrition. Si je me repentais un peu, si j'avais un bon mot pour Sir Paul. Si je disais que j'aime bien Live and Let Die (la version de Guns N'Roses, surtout). Mais vos oeufs m'ont rendu de mauvaise humeur.

Donc...

Donc, le 20 juillet, j'espère qu'il pleuvra, bon.