Maman! C'est spontané. Viscéral. Animal même. Quand tu as faim. Mal. Peur. Quand tu te retrouves au bout du monde, perdue. Quand la toilette du voisin du haut te coule sur la tête. Ou simplement quand tu tentes de cuire ton premier poulet. Même à 28 ans, il n'y a rien qui remplace une mère.

C'est cliché, soit. Un peu - beaucoup! - fleur bleue, c'est vrai. Mais les deux plus belles et plus grandes femmes de ma vie, ce sont ma mère et ma soeur. Parce qu'elles ont donné la vie. Elles ont donné leur vie.

Ma mère, Liliane, a perdu sa mère trop jeune. Mi-vingtaine. De bien triste façon. Si la logique veut que les enfants doivent voir leurs parents mourir, on ne devrait pas les perdre si jeunes. C'est bien trop cruel. Maman se sera occupée de sa propre mère. Puis elle aura dû affronter les difficultés de la vie adulte seule. Elle aura donné naissance à ses enfants sans qu'ils puissent espérer un jour connaître leur grand-mère. C'est peut-être pour ça que je porte son nom: Émilie Françoise. Et c'est assurément pour compenser ce manque qu'elle aura été aussi présente pour ses filles.

Maman aura tout laissé pour nous. Elle aura élevé quatre enfants: deux filles qu'elle aura portées et les deux filles de mon père. Une mère et une belle-mère. Quoiqu'elle n'ait jamais fait de différence entre nous. Nous étions toutes ses enfants. Et nous lui en avons fait voir de toutes les couleurs. Pourtant, elle a toujours été d'une infinie patience. D'une infinie tendresse.

Liliane est une vraie mère-poule: «Mets ton foulard, tu vas prendre froid!» «Sois prudente sur la route.» «Appelle quand tu seras arrivée chez ton amie.» «Manges-tu?» «Tiens, je t'ai fait un pain aux bananes.» «J'ai acheté un filet de porc en trop; tu le veux?» Il y a des moments où ça me rend folle! Adolescente, je ne comprenais pas qu'on puisse s'en faire autant. Maintenant, je comprends. Maman est ce que sa mère n'aura pas pu être: présente... Omniprésente! Mais combien réconfortante!

Ma soeur, Marie-Christine, a 10 ans de plus que moi. C'est la plus belle femme que je connaisse. Et, au risque d'être quétaine, elle est belle dehors comme dedans! À mon âge, elle avait déjà un enfant... Presque deux. Deux petits garçons. Deux petits monstres aux cheveux blonds: Lucas et Noah. Si différents l'un de l'autre. Mais tellement attachants.

Je ne sais pas si ma soeur s'est couchée un soir et a dit à son chum: «Bon, bien, c'est le temps, on se fait un petit.» La connaissant, je crois plutôt qu'elle s'est levée enceinte un matin! Marie-Christine est spontanée, un peu tête folle. Une artiste dans l'âme, dans le coeur. La seule personne qui sait faire des sushis de A à Z, mais qui peine à cuisiner un vulgaire pâté chinois. Trop banal! Trop beige! Ses enfants adorent les restos chinois, les vrais, presque autant que le McDo...

Comme notre mère, ma soeur a sacrifié beaucoup de choses pour ses enfants. Sa carrière bien sûr. Sa santé physique et mentale aussi parfois. C'est une femme brillante. Et elle se retrouve, comme bien des mères de famille à la maison, sous-estimée dans notre société où l'intelligence et la réussite se calculent en dollars. Pourtant, en connaissez-vous beaucoup des emplois où on vous demande d'être cuisinière, gestionnaire, psychologue, enseignante, comptable et infirmière? 7 jours sur 7. 24 heures par jour. Je lui lève mon chapeau.

J'habite à plus de huit heures de route de ma soeur et de ma mère. Et ça, c'est quand il fait beau! Je n'ai pas toujours été là pour ma soeur. Pas comme je l'aurais voulu. Notamment à la naissance du deuxième, qui a bien failli partir aussi vite qu'il est arrivé. Je ne vois pas mes neveux assez souvent. Maman me manque aussi. On s'appelle presque tous les jours. Et elle me demande encore si j'ai de l'argent pour l'épicerie. Elle s'inquiète quand j'ai un rhume. Ces femmes sont des anges. Des vrais. Ce sont mes héroïnes à moi.

Et si un jour j'ai des enfants, j'espère que je serai une aussi bonne maman qu'elles.