L'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis a attisé la nervosité des marchés financiers depuis 10 jours. Les indices boursiers ont grimpé, tout comme les taux obligataires, tandis que s'opérait sur le marché des changes un réalignement des monnaies en faveur du dollar américain.

Il y a eu aussi beaucoup d'activité sur les prix des produits de base : le cuivre, en particulier, a bondi de 18 % la semaine dernière, mais le pétrole a moins bougé. La perspective d'une demande accrue ouvre la porte à une rapide augmentation de l'offre, assurée par la fracturation hydraulique des roches schisteuses, qui abondent dans le Dakota du Nord, en Pennsylvanie et au Texas.

Selon certains, c'est peut-être la fin de la tendance baissière des cours des produits de base amorcée en 2011, après une quinzaine d'années de hausse quasi continue.

C'est un peu l'analyse publiée en début de semaine par l'Institut de la statistique du Québec, qui voit une certaine atténuation de la tendance baissière des investissements miniers après la dégringolade amorcée en 2013.

Rien n'est moins sûr, toutefois, si on se fie à l'étude publiée hier dans la Revue de la Banque du Canada.

Ses auteurs dégagent quelques tendances à partir de l'évolution des quatre supercycles des produits de base depuis le début du siècle dernier. Leur durée moyenne est de 32 ans.

Le cycle actuel aurait commencé en 1996 ; sa phase haussière s'est prolongée jusqu'en 2011. Il en serait donc à sa cinquième année de déclin des prix.

Par rapport aux trois cycles précédents, c'est bien peu. La durée moyenne de leur phase descendante est de 19,7 ans et s'étend sur une période plus longue que leur phase ascendante.

Le rythme d'expansion de l'économie mondiale est estimé à 2,8 % seulement en 2016 par la Banque. En 2010, la croissance a été de 5,1 % ; en 2011, de 3,8 %.

Les auteurs insistent toutefois sur le fait que chaque supercycle a sa dynamique propre.

Ils observent que c'est un choc tantôt de la demande, tantôt de l'offre qui déclenche un cycle ou brise sa tendance haussière.

Ainsi, le cycle qui a couru de 1962 à 1995 a été lancé par la réindustrialisation de l'Europe et du Japon. Il a connu un second souffle jusqu'en 1978 grâce à l'embargo sur le pétrole décrété par l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, en 1973. L'exploitation des gisements en mer du Nord a signalé son déclin à compter de 1978.

Le présent cycle a été porté par la rapide transformation de la Chine qui s'est même accélérée avec son entrée dans l'Organisation mondiale du commerce, en 2001.

Elle consomme désormais plus de 10 % de la production mondiale de pétrole, plus de la moitié de celle d'aluminium et de fer, plus de 40 % de celle de charbon, de nickel, de cuivre et de zinc.

La Chine ralentit désormais sa croissance, freinant du coup celle du monde et la demande de produits de base. La taille de son économie est toutefois six fois plus grande qu'en 1999.

Il a fallu un certain temps aux prévisionnistes pour réaliser que le ralentissement présent de la croissance mondiale n'était pas attribuable à des chocs passagers mais à des tendances lourdes et durables, comme le vieillissement de la population et la mutation de la Chine vers une économie de services.

Selon les auteurs, la variation d'un point de pourcentage de la croissance mondiale entraîne une variation de 14 % des cours du pétrole, de 9,2 % des métaux communs (cuivre, fer, nickel, plomb, zinc) et de 7,2 % des produits agricoles).

En ce qui concerne le pétrole, la production américaine permet des ajustements très rapides de l'offre, encore impossibles en 2010. Avec les techniques classiques, il faut plusieurs années avant de commencer l'exploitation d'un gisement.

Pour exploiter un nouveau gisement minier, il faut encore compter plusieurs années. Ce n'est que lorsque la demande se raffermira que s'accéléreront les investissements. En revanche, il faut moins d'une année pour ajuster l'offre de céréales, quelques mois de plus pour celle des bestiaux.

Parmi les éléments susceptibles de stimuler la demande, les auteurs misent surtout sur l'urbanisation de l'Inde, dont 30 % seulement de la population vit dans les villes, contre 55 % en Chine et plus de 80 % en Occident. Cela exigera des réformes structurelles difficiles à mettre en place.

Dans une moindre mesure, la modernisation des infrastructures nord-américaines pourra soutenir la croissance de la demande de biens. Les innovations, notamment dans le recyclage, ne permettent pas d'espérer le même engouement qu'au début du siècle.