N'aura-ce été qu'une embellie estivale, ou plutôt le début de l'éclaircie attendue depuis maintenant deux ans ? Trop tôt pour le dire, mais l'estimation préliminaire de la croissance américaine représente un grand soulagement des deux côtés de la frontière.

À 2,9 % en rythme annualisé (ou 0,7 %), la première des trois estimations du Bureau of Economic Analysis (BEA) est nettement plus élevée que le pronostic consensuel des prévisionnistes, qui jugeaient déjà encourageante la perspective d'une accélération à 2,5 %.

Cette performance trimestrielle signifie que le rythme d'expansion de l'économie américaine entre l'été 2015 et celui de 2016 atteint 1,5 %, contre 1,3 % entre les deuxièmes trimestres de 2015 et 2016. C'est la première fois depuis le printemps 2015 qu'on observe une légère accélération de la croissance annuelle. Ce rythme était de 3,3 % au premier trimestre de 2015. Cette décélération inquiétante a motivé les hésitations au sein de la Réserve fédérale américaine.

Les données publiées hier préparent évidemment la voie à une première hausse du taux directeur cette année. Selon toute vraisemblance, elle ne sera pas annoncée mercredi, à sept jours seulement de l'élection présidentielle.

La mi-décembre devient en revanche une date hautement probable. Le Comité de politique monétaire aura alors eu une autre estimation du BEA, moment où les résultats des élections américaines, qui mettent en jeu aussi la composition des deux Chambres du Congrès, auront été digérés.

Quand on fouille dans les données du troisième trimestre, on trouve des éléments qui suggèrent qu'un tel rythme ne sera pas maintenu au cours du trimestre en cours. Ainsi, à eux seuls, le restockage des entreprises contribue à 0,6 point de pourcentage et le commerce extérieur à 0,8 point.

Pour soutenir un tel rythme, il faudrait une augmentation de la consommation des ménages et une stabilité du dollar américain. Si la première hypothèse est plausible, la seconde est beaucoup moins probable avec la perspective du resserrement monétaire.

Une autre ombre au tableau est le quatrième recul d'affilée d'achats d'équipements par les entreprises. En revanche, elles ont accru leurs dépenses en propriété intellectuelle et en structures.

Pour le Canada, ce sont de bonnes nouvelles, dans l'ensemble. L'accélération de l'activité économique américaine va soutenir la lente remontée des exportations canadiennes observée en juillet et août.

On devrait d'ailleurs apprendre mardi que la production canadienne a continué d'augmenter après les fortes hausses de 0,5 % en juillet et de 0,6 % en juin.

Il paraît de plus en plus clair que la croissance annualisée du Canada aura plus que rattrapé le recul printanier de 1,6 %, causé surtout par les incendies de forêt dans la région des sables bitumineux albertains, mais aussi par une activité économique anémique hors ressources.

Selon l'Indice de momentum économique provincial (MÉP) mis au point par la Banque Nationale, huit des dix provinces canadiennes étaient en expansion en septembre. Les exceptions sont Terre-Neuve-et-Labrador et le Manitoba, dont le poids respectif correspond à 1,7 et 3,2 % de l'économie canadienne seulement.

Fait notable, l'économie albertaine (poids de 19 %) se serait enfin stabilisée.

L'effet de rattrapage après les incendies albertains étant complété, le rythme de croissance de l'automne va ralentir, peut-être davantage qu'aux États-Unis, où l'activité économique semble avoir plus de tonus.

Voilà pourquoi le ministre des Finances Bill Morneau annoncera sans doute mardi quelques initiatives visant à accélérer les investissements fédéraux dans les infrastructures.

Cette voie est fortement encouragée par des organismes internationaux tels le Fonds monétaire international et l'Organisation de coopération et de développement économiques pour des pays comme le Canada. Son niveau d'endettement est relativement peu élevé et ses coûts d'emprunts sont parmi les plus avantageux.

Hier, le ministère des Finances a indiqué que, d'avril à août, le déficit budgétaire atteignait 5,4 milliards. Pour la même période l'an dernier, on avait enregistré un excédent de 2,8 milliards. C'était toutefois avant la baisse d'impôt et la nouvelle prestation pour enfants.

Infographie La Presse