Ceux et celles qui persistent à croire que la Réserve fédérale américaine n'augmentera pas son taux directeur cette année seront bien avisés de lire le procès-verbal de la dernière réunion de son Comité de politique monétaire, les 20 et 21 septembre.

On y découvre que l'argument peut-être le plus convaincant pour ne pas donner un tour de vis dès cette séance avait été la crainte de ne pas l'avoir assez télégraphié. Ce faisant, cela aurait pu susciter des réactions désordonnées sur les marchés.

Voilà pourquoi le communiqué faisant part du statu quo monétaire contenait cet avertissement : « Le Comité juge que la justification d'une augmentation du taux des Fed Funds s'est renforcée, mais il a décidé pour l'instant d'attendre davantage d'indications des progrès constants vers ses objectifs. »

Depuis, le marché du travail a continué de créer des emplois, et les indices des décideurs d'achat manufacturiers et non manufacturiers se sont logés au-dessus de la barre de 50 qui marque le point de bascule entre la contraction et l'expansion économique.

Chez les partisans du statu quo, plusieurs ont soutenu que la décision à prendre au cours de cette séance était « serrée » (close call), note le procès-verbal.

Cela met certainement la table pour un relèvement de la fourchette d'évolution du taux des Fed Funds. Depuis décembre, elle est fixée à un taux de 0,25 % à 0,50 %.

Il reste deux réunions du Comité cette année. Celle des 1er et 2 novembre tombe à une semaine de l'élection présidentielle, un accident calendaire qui dicte la prudence.

La seconde, les 13 et 14 décembre, se prête mieux à un relèvement du taux directeur. C'est la dernière de l'année, la même qu'avait choisie la Fed en 2015 pour mettre fin à un statu quo de huit ans.

En décembre, les marchés financiers auront eu tout le temps pour se préparer, même si, en cours d'année, la Fed a montré sa grande réticente à normaliser son taux directeur.

En décembre dernier, en annonçant la hausse, la majorité des membres du Comité s'attendaient à quatre autres majorations en 2016. En mai, alors que la Fed n'avait pas encore bougé, on penchait pour deux ; en juillet, pour une seule.

Voilà pourquoi, les parieurs estiment encore à 70 % seulement la probabilité d'une hausse cette année.

À trop attendre, la Fed joue sa crédibilité. Les indicateurs économiques présentent un tableau de la situation économique largement conforme à l'atteinte de ses deux objectifs : maximiser l'emploi et stabiliser les prix.

À 5,1 %, le taux de chômage est légèrement au-dessus de 4,8 %, jugé comme le taux équivalent au plein emploi. Beaucoup d'Américains recommencent à se chercher du travail, gonflant du coup les rangs de la population active. Cela est conforme à la lecture du Comité selon qui il est possible d'observer encore une légère amélioration du marché du travail. Cela n'est pas incompatible avec une augmentation du taux directeur.

Si l'indice des dépenses personnelles de consommation donne encore une lecture de l'inflation inférieure à la cible de 2 %, l'Indice des prix à la consommation de base (qui exclut les aliments et l'énergie selon la définition américaine) s'en rapproche. L'écart entre les deux indices provient des poids différents attribués au logement et aux soins de santé dans leur composition.

Parmi les arguments des trois membres votants qui ont manifesté leur désaccord sur le statu quo de septembre, il y a la crainte d'une baisse trop prononcée du taux de chômage, susceptible d'attiser les pressions inflationnistes. En pareil cas, la Fed serait contrainte de serrer la vis trop rapidement, au risque de provoquer une récession.

Les partisans du statu quo insistent d'ailleurs sur le fait que la normalisation du taux directeur doit se faire petit à petit.

La plupart des membres sont enfin d'accord que les risques entourant les perspectives économiques sont désormais équilibrés. En pareilles circonstances, le faible niveau du taux directeur réduit la marge de manoeuvre des autorités monétaires en cas de choc économique ou financier.

Cela milite pour des augmentations prudentes du taux directeur.