Même avec leur système de pilotage automatique, les Tesla ne sont pas des voitures sans conducteur puisque le chauffeur, justement, est censé garder les mains sur le volant.

L'annonce d'un premier accident mortel survenu à bord d'une Tesla dont les fonctions de pilotage automatique étaient activées a néanmoins relancé le débat sur les véhicules autonomes. Les attentes sont grandes, mais la transition s'annonce complexe.

La collision mortelle est survenue le 7 mai dernier. La National Highway Traffic Safety Administration américaine (NHTSA) enquête aussi sur une sortie de route plus récente, impliquant une autre Tesla, pour savoir si le pilotage automatique était activé.

Tesla a fait valoir que son système de pilotage automatique demande au chauffeur de garder les mains sur le volant en tout temps. S'il ne les détecte pas, il émet des alertes visuelles et sonores puis ralentit progressivement le véhicule.

« Lorsqu'utilisé sous surveillance du conducteur, le pilotage automatique diminue sa charge de travail et améliore la sécurité de façon significative », souligne toutefois le constructeur. Il ne faut donc pas s'étonner que cet accident mortel ait alimenté la discussion sur les voitures sans conducteur. Ces véhicules réellement automobiles (c'est-à-dire capables de se mouvoir eux-mêmes) suscitent à la fois de grands espoirs et de grandes interrogations.

Comme environ 90 % des collisions sont dues à des erreurs humaines, les véhicules sans conducteur réduiraient les accidents d'autant, estiment des chercheurs. Ainsi, les routes du Québec n'auraient pas fait 361 morts l'an dernier, mais seulement 36. Et c'est sans compter tous les autres accidents. Les gains potentiels font rêver, mais on est encore loin du compte. Il faudra d'abord passer par une période de transition durant laquelle les véhicules avec et sans conducteurs se côtoieront dans le trafic, avec des résultats imprévisibles.

Ainsi, la voiture sans conducteur de Google a été impliquée dans près de 20 collisions avant d'être responsable d'un premier accident, le 14 février dernier. Les précédentes avaient été causées par des facteurs extérieurs, dont la distraction des autres conducteurs.

La programmation des véhicules sans conducteur va aussi poser des dilemmes éthiques considérables : faut-il prioriser la sécurité des passagers ou celles des autres usagers de la route ? Le public a des attentes contradictoires, montre une étude publiée le mois dernier dans le magazine Science.

Imaginez une situation où la seule manoeuvre permettant d'épargner 10 piétons tuerait l'occupant du véhicule. Que faire ? Il serait plus moral que la voiture sacrifie son passager, ont indiqué les trois quarts des répondants américains sondés en ligne. Et s'ils achetaient une voiture autonome ? Ils voudraient qu'elle priorise la sécurité de ses occupants. Une réglementation exigeant que les passagers soient sacrifiés pour le bien commun pourrait donc retarder de beaucoup l'adoption des voitures sans conducteurs, et les gains espérés de cette technologie, notent les chercheurs.

Il faut résister à la tentation de légiférer prématurément dans le seul but de se rassurer. Cela ne réussirait qu'à freiner le développement de cette nouvelle génération d'automobiles sans nous protéger de leurs véritables dangers, qu'on découvrira seulement à l'usage.