Tous les voyants rouges sont allumés. Non seulement le gouvernement Couillard ne peut les ignorer, mais il doit résister à la fièvre qui monte en faveur du retour d'une équipe de baseball majeur à Montréal.

Le fiasco du Centre Vidéotron, dans la capitale, devrait suffire pour le convaincre de ne pas répéter les mêmes erreurs.

Une petite phrase évasive du premier ministre Philippe Couillard a pourtant relancé l'espoir de voir le gouvernement provincial investir dans la construction d'un nouveau stade de baseball.

Québec pourrait éventuellement venir « en appui » au secteur privé s'il avait sa part de bénéfices, a déclaré M. Couillard la semaine dernière.

À pareille date l'an dernier, il était pourtant catégorique : « Il n'y a pas d'argent pour ça », affirmait-il.

Dans les faits, rien n'a changé. La casquette bleu-blanc-rouge des Expos fait peut-être un retour en force dans les milieux branchés, le projet est toujours aussi risqué pour le gouvernement et inacceptable dans le contexte budgétaire actuel.

Les estimations, chiffrées alors que les dollars canadiens et américains étaient au pair, montrent que le retour d'une équipe de baseball majeur coûterait plus de 1 milliard, dont 467 millions pour la construction d'un stade à ciel ouvert.

Le scénario sur la table prévoit que Québec financerait les deux tiers de la construction du nouveau stade. C'est au minimum 335 millions ! Sans compter le reste. Qui paiera pour l'acquisition d'un terrain, sa décontamination, l'aménagement des infrastructures, etc. ?

La seule étude documentant la faisabilité du projet, dévoilée en décembre 2013, a été financée par le milieu des affaires, celui-là même qui pousse pour la construction d'un stade au centre-ville, à distance de marche des grandes entreprises.

Les prévisions sont très optimistes. On prévoit presque deux fois plus de spectateurs par match qu'à l'époque des Expos, un écart notable expliqué notamment par l'attrait du centre-ville pour les gens d'affaires. L'explication est un peu courte.

La question du toit est également importante. La tendance au baseball est un stade à ciel ouvert, c'est vrai. L'étude dresse un parallèle avec Minneapolis, estimant que le climat estival y est similaire, pour conclure qu'un toit n'est pas indispensable.

Il suffit toutefois de jeter un oeil à Toronto - juste à côté - pour se convaincre du contraire. Cette saison, les Blue Jays ont déjà disputé le quart de leurs matchs à domicile sous un stade couvert ; ils ont dû attendre la fin mai pour jouer en plein air.

Or, l'ajout d'un toit rétractable à Montréal gonflerait encore la facture de 150 à 180 millions.

Les données très préliminaires prévoient qu'il faudrait plusieurs années avant que le gouvernement récupère sa mise, entre autres grâce aux impôts payés par les joueurs. Dans l'état actuel des finances publiques, alors que le gouvernement vient d'atteindre le déficit zéro au prix de dures compressions en santé et en éducation, ce n'est certainement pas le financement d'une équipe professionnelle qui vient en tête des priorités.

Le gouvernement Trudeau a déjà fermé la porte à l'ajout d'un volet sportif à son programme d'infrastructures. Le gouvernement Couillard doit en faire autant.

Le retour du baseball majeur à Montréal ? Certainement ! Mais il serait irresponsable de le financer à même les deniers publics.