L'agence de notation de crédit Standard & Poor's choisit d'accorder une perspective positive à la note de crédit A+ attribuée à la dette québécoise.

Cela signifie qu'il existe environ une chance sur trois que la note soit haussée dans un horizon de 12 à 24 mois. Si tel devait être le cas, la dette du Québec serait alors mieux notée que celle de l'Ontario par l'agence new-yorkaise qui a choisi de reconduire sa perspective stable pour notre voisine.

Cette bonne note de l'agence envers le Québec est plutôt exceptionnelle cette année.

Deux autres provinces seulement dégagent aussi des surplus, bien que beaucoup moins élevés que ceux du Québec ; la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse.

Une réévaluation de la note de la province pacifique est impossible puisqu'elle jouit déjà d'un AAA, la note maximale. Quant à la province atlantique, le léger excédent prévu fera toutefois suite, s'il se matérialise, à un modeste déficit en 2015-2016.

Cette situation est fort différence de celle du Québec qui a dégagé un surplus d'au moins 1,4 milliard l'an dernier et en prévoit un de 2,0 milliards environ pour 2016-2017. Ces montants seront dédiés à la réduction de la dette par l'entremise de dépôts au Fonds des générations.

D'autres provinces ne jouissent pas des bonnes grâces de l'agence S&P.

Ainsi, l'Alberta, qui avait la note AA+ jusqu'à l'an dernier, a vu sa note réduite de deux crans à AA-. La province semble avoir perdu la maîtrise de ses finances publiques, qui dépendent trop lourdement des royautés sur les hydrocarbures. Vieil esprit créditiste oblige, elle persiste à ne pas avoir de taxe de vente. Cela l'a forcée à augmenter l'an dernier l'impôt sur les revenus des particuliers et des sociétés.

Le coussin de 700 millions lui permettra d'absorber les pertes de revenus causées par les incendies dans la région de Fort McMurray.

Le budget présenté jeudi par la Saskatchewan n'aura sans doute pas l'heur de plaire non plus aux agences de notation. La province aux cieux infinis avait été la première à retrouver l'équilibre en 2012-2013, avant de replonger dans le rouge l'an dernier. Un retour à l'équilibre dès l'an prochain représente un défi : Regina mise sur une deuxième année d'affilée de décroissance de la taille de son économie exprimée en dollars courants (le PIB nominal). Ses revenus autonomes vont d'ailleurs encore diminuer, mais la province compte sur un accroissement des transferts fédéraux pour absorber en partie la hausse de ses dépenses de programmes, limitée à 1,1 % (contre 2,4 % au Québec et 7,4 % à Ottawa).

Le nouveau gouvernement conservateur du Manitoba adopte l'approche retenue par Ottawa : plus question de fixer une date de retour à l'équilibre, l'accent est mis sur la stabilisation du poids de la dette qui est sensiblement le même que celui d'Ottawa à 33,8 % du PIB nominal.

Si l'économie ontarienne carbure autant cette année que l'an dernier, la province flirtera peut-être avec l'équilibre cette année. Le déficit projeté de 4,3 milliards inclut un coussin de 1,0 milliard. Lors des trois années précédentes, il s'est révélé plus modeste que les projections de Queen's Park. Si tel n'est pas le cas, l'an prochain paraît une cible bien réaliste.

Les provinces maritimes paraissent maîtriser leur plan budgétaire. Seul le Nouveau-Brunswick a un objectif plus lointain de retour à l'équilibre, mais ses déficits projetés sont faibles et ils incluent tous un coussin.

Reste Terre-Neuve-et-Labrador. La province est vraiment dans de beaux draps, au point où Ottawa a dû lui venir en aide le mois dernier en reportant de cinq ans le remboursement de trop perçus en péréquation avant 2008. Depuis, la province n'en touche plus. La croissance prévue de 13,8 % des revenus autonomes ne doit pas faire illusion. Elle fait suite à une chute de 14,8 % en 2015-2016 et est assortie d'un bouquet de hausses du fardeau fiscal. L'an prochain, l'accent sera mis sur une diminution de 2,6 % des dépenses de programmes.

Bref, quand le Québec se compare, il tire plutôt bien son épingle du jeu, même si sa dette reste la plus lourde de toutes les provinces. Toutefois, T.-N.-L. peut faire pire au tournant de la décennie.

Pour passer à la note de AA-, Québec devra remplir quatre conditions : concrétiser le faible taux de croissance de ses dépenses de programmes projetées ; abaisser le poids de la dette ; éviter une décroissance économique soudaine ; et maintenir sa solide capacité à générer des liquidités.

Moody's, DBRS et Fitch n'ont pas encore émis leur note de crédit cette année. En 2013, Fitch a accordé une perspective négative à sa note AA-. Cette année-là, Québec avait dû reporter de deux ans sa cible de retour à l'équilibre.

Le ministre des Finances Carlos Leitao satisfait

« Ce que je trouve intéressant de remarquer, c'est les raisons pour lesquelles l'agence de notation a amélioré notre perspective à positive. Trois facteurs sont mentionnés : d'abord, une performance budgétaire forte, deuxièmement, un management fiscal et financier qui est aussi très fort, et surtout, le troisième, ils considèrent que le Québec a une économie très forte.

« On nous met maintenant dans une coche plus élevée que l'Ontario puisqu'en Ontario, la perspective est toujours stable à négative.

« Puisque nous avons un niveau d'endettement très élevé, il est absolument nécessaire pour nous de maintenir et même d'améliorer nos cotes de crédit. C'est de cette façon-là que nous allons maintenir ce que nous avons qui est un accès privilégié aux marchés financiers qui nous permet de financer notre dette assez facilement.

« Puisqu'on a maintenant une perspective positive, cela a aussi un effet d'entraînement sur les entreprises privées, sur les intentions d'investissement, ça mène à une augmentation, une amélioration de l'investissement privé. »

- Propos recueillis par Denis Lessard