En cette période où la plupart des régimes de retraite des entreprises sont aux prises avec de lourds déficits actuariels, bien des participants et des bénéficiaires se demandent s'ils sont bien protégés en cas de faillite de leur employeur.

Non! Sauf en Ontario.

Ainsi, la faillite (ou l'insolvabilité ) d'un employeur, m'explique le porte-parole de la Régie des rentes (RRQ), Pierre Turgeon, constitue le pire scénario pour un travailleur, bénéficiaire ou retraité d'un régime complémentaire de retraite.

À la question: Qu'arrive-t-il à la caisse de retraite lors de la faillite de l'employeur? Voici les autres précisions que le porte-parole de la RRQ nous a transmises.

Premièrement, il faut se rappeler que la caisse de retraite est distincte de l'employeur. Ouf!

Lorsqu'un employeur déclare faillite, le régime de retraite ne fait pas faillite, lui. «Bref, l'argent reste dans la Caisse et ne peut en aucun moment servir à payer des créanciers», précise M. Turgeon. On a au moins cela de protéger!

Quand survient la faillite d'un employeur, cela provoque la terminaison du régime de retraite. Conséquence? «Les participants, les bénéficiaires et les retraités se partagent alors ce qui reste dans la caisse. Si le régime est déficitaire, il y aura perte de droits.»

Comme prix de consolation, sachez toutefois que les cotisations impayées du service courant (par l'employeur) font partie des créances garanties.

En effet, et ce depuis 2008, la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies ont été modifiées dans le dessein de mieux protéger les cotisations salariales prélevées et non versées; les cotisations patronales dues et non versées dans un régime à cotisations déterminées; et les cotisations patronales d'exercice dues et non versées dans un régime à prestations déterminées.

Ces cotisations font donc partie des créances garanties, à être réglées après les autres créances garanties suivantes: fournisseurs impayés, retenues d'impôts et de chômage non versées, salaires des employés.

Concernant les déficits non capitalisés et les paiements échus et non versés pour l'amortissement des déficits de solvabilité des régimes de retraite, la RRQ précise que ceux-ci sont considérés comme des créances ordinaires. Qui dit «ordinaires» signifie que ces créances seront traitées après le règlement des créances garanties et des créances privilégiées. Aussi bien faire une croix sur les créances ordinaires!

Par ailleurs, dans le cas de fermeture d'entreprise à la suite d'une faillite, de nouvelles dispositions de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite donne à la RRQ le pouvoir de verser une rente aux bénéficiaires, tout en tenant compte des droits réduits à la suite de l'insolvabilité de l'employeur XYZ. C'est en vertu de l'article 230 de la Loi sur les régimes complémentaires de retraite que la RRQ peut prendre la relève d'un régime de retraite dont l'employeur est en faillite ou sous l'effet d'une ordonnance ou d'un jugement en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, la Loi sur la faillite et l'insolvabilité ou de la Loi sur les liquidations et les restructurations.

On fait référence ici à un régime dont l'actif est insuffisant pour acquitter intégralement les droits des participants et bénéficiaires visés par le retrait ou la terminaison du régime de retraite. Dans un tel cas, un participant ou un bénéficiaire peut demander une rente servie sur l'actif administré par la Régie.«Au Québec, récemment, les travailleurs bénéficiaires et participants des régimes de retraite des compagnies Aléris, Papiers Fraser, Lab Chrysotile et quelques autres plus petites ont pu se prévaloir des nouvelles dispositions qui permettent une rente servie par la Régie», précise M. Turgeon.

Selon un sondage du Réseau FADOQ réalisé par Léger Marketing, quelque 71% des Québécois veulent une législation provinciale pour inclure le régime de retraite des travailleurs parmi les créances prioritaires en cas de faillite d'une entreprise.

Dans le cas de faillite d'une entreprise, les retraités voient souvent leur pension amputée. Le regroupement des 50 ans et plus sous le Réseau FADOQ «croit qu'il est primordial de protéger» les régimes complémentaires de retraite par des lois claires et incontournables.

Lors de la récente campagne électorale, aucun parti politique québécois ne s'est engagé à améliorer la protection des participants et bénéficiaires de ces régimes de retraite privés. Pourtant, ils auraient pu s'inspirer du modèle ontarien.

Au Canada, seule la province de l'Ontario protège les bénéficiaires des régimes de retraite privés à prestations déterminées en cas d'insolvabilité des employeurs. Cette protection est assurée par le Fonds de garantie des prestations de retraite (FGPR). Administré par le Surintendant des services financiers, pour le compte de la Commission des services financiers de l'Ontario, le FGPR garantit les prestations déterminées jusqu'à concurrence de 1 000$ par mois. Ce n'est pas beaucoup... Mais vaut mieux une telle protection que rien du tout! Ce Fonds s'autofinance au moyen de primes annuelles perçues à même les cotisations effectuées dans les régimes.