Ne partons pas en peur avec les nouvelles exigences financières de Bernie Ecclestone. Ne voulant pas passer pour un gros méchant loup, il serait prêt à prolonger de dix ans le contrat du Grand Prix du Canada, moyennant une légère augmentation de l'actuelle subvention annuelle. Dans le cadre de la présente entente qui prendra fin en 2014, on lui verse une subvention annuelle de 15 millions de dollars. L'argent provient des quatre bailleurs de fonds suivants: Ottawa (5 millions), Québec (4 millions), Tourisme-Montréal (5 millions) et Ville de Montréal (1 million).

Pour renouveler l'entente de 2015 à 2024, le grand manitou de la F1 se contenterait d'une hausse annuelle de quelques points de pourcentage. Par exemple, pour la première année du nouveau contrat de 10 ans, La Presse Affaires a appris qu'on parle d'un supplément nettement sous le million de dollars. Montréal demeurerait ainsi l'un des rares Grand Prix «abordables» en terme de subventions. Des promoteurs versent actuellement jusqu'à 40 millions par année de subvention pour obtenir le droit d'organiser une telle prestigieuse course.

Comme seconde condition pour boucler une nouvelle entente de dix années, Ecclestone exigerait la rénovation des infrastructures actuelles du Circuit Gilles-Villeneuve: les garages, le centre médical du Grand Prix, l'asphalte du circuit, etc. Simple question de moderniser des installations vieillottes, que lui-même avait payées de sa poche lorsqu'il avait repris en 1988 le Grand Prix à titre de promoteur.

Ces travaux de restauration des installations du circuit s'élèveraient autour de 20 millions de dollars. Ecclestone accepterait que lesdits travaux s'échelonnent sur quelques années, de sorte à ne pas mettre trop de pression financière sur les partenaires-bailleurs de fonds du Grand Prix.

Précisons ici que ces travaux de 20 millions ont déjà reçu la bénédiction de principe du ministre des Finances Raymond Bachand.

«La mise à niveau des infrastructures (du circuit Gilles-Villeneuve), ça pourrait être une bonne chose d'y investir si ça nous assure le Grand Prix à Montréal pour un dix ans supplémentaire», laisse entendre son bureau.

Bien entendu, on s'attend à ce que le fédéral collabore financièrement s'il veut que le Grand Prix maintienne son identification au... Canada.

Les travaux de restauration des installations du Grand Prix pourraient être défrayés en vertu des programmes d'aide financière existants et justement prévus à des fins de construction ou de rénovation d'infrastructures. Il ne faut pas oublier que le Circuit Gilles-Villeneuve fait partie intégrante du Parc Jean-Drapeau, propriété de la Ville de Montréal.

Par ailleurs, il est important de souligner que dans les faits, l'actuelle subvention annuelle est nettement inférieure aux 15 millions. En effet, les quatre bailleurs de fonds se partagent à la fin de chaque Grand Prix une ristourne de 30% sur la vente des billets. Le partage se fait au prorata de la mise de chacun. Pour le Grand Prix de 2010, Ecclestone leur a versé une ristourne de 4,7 millions. En ce qui concerne l'édition du Grand Prix de 2011, la ristourne sur la billetterie s'avérait légèrement inférieure, soit 4 millions de dollars.

Revenons aux nouvelles exigences d'Ecclestone pour renouveler l'entente sur 10 ans.

Selon certains calculs, le Grand Prix du Canada rapporte bon an mal an des retombées économiques évaluées à 90 millions de dollars. Il est reconnu comme étant le plus important et le plus lucratif événement touristique annuel à se tenir au Canada. C'est le seul événement touristique qui réussit à remplir à pleine capacité les chambres d'hôtel du Grand Montréal.

En termes de recettes fiscales (impôts, taxes de vente, etc.), le Grand Prix rapporte des revenus annuels de 10,2 millions pour le gouvernement du Québec et de 7,8 millions pour Ottawa. On parle donc de 18 millions de dollars de recettes fiscales, soit deux fois plus que le montant des subventions (9 millions) que versent présentement les deux paliers de gouvernement. Quand on tient compte de la ristourne de billetterie que reçoivent les deux gouvernements (autour de 2,5 millions), on constate que le Grand Prix demeure un événement certes subventionné mais fort rentable pour les gouvernements.

Si l'entente avec Ecclestone se renouvelle bel et bien avec une raisonnable augmentation de la subvention annuelle de 15 millions, il ne fait pas de doute que l'événement restera fiscalement payant pour nos gouvernements.

Et fort rentable pour l'industrie touristique montréalaise... sauf peut-être cette année.

En effet, si la crise étudiante n'est pas résolue d'ici la tenue prochaine du Grand Prix de F1 (du 8 au 10 juin), il y a fort à parier qu'il y aura bien des embûches à franchir pour atteindre les estrades du Circuit Gilles-Villeneuve.

Quoi de plus «efficace» que la diffusion aux quatre coins du monde d'un Grand Prix de F1 pour dénoncer un gouvernement qui se bat sur la place publique avec une partie de sa jeunesse.

Message au premier ministre Jean Charest: le «carton rouge» fera vite le tour de la planète quand les Ferrari de la F1 débarqueront en ville!

S'il veut éviter cela, qu'il négocie à vitesse grand V avec les leaders étudiants. Il est temps de STOPPER les immenses dommages éco-socio-touristiques occasionnés par la fameuse crise étudiante.