Chose certaine, l'acquisition d'Astral Media par Bell (filiale de BCE) permet aux actionnaires d'Astral de réaliser un sacré bon coup d'argent alors qu'ils se font offrir une prime de 39% sur le cours moyen des dernières séances. Bell leur offre 50,00$ l'action, soit 13,75$ de plus que la fermeture de jeudi.

Du côté des actionnaires de BCE, ça devrait prendre plusieurs jours avant de voir s'ils perçoivent positivement ou négativement cette méga acquisition de 3,38 milliards de dollars. À voir hier le comportement du titre, on ne peut pas dire qu'il y avait enthousiasme. À vrai dire, le titre faisait du surplace, avec une légère tendance à la baisse par rapport à la fermeture de jeudi.

Une acquisition d'entreprise dans un secteur que l'on croit complémentaire n'est jamais mauvais en soi, si le prix à payer est relativement raisonnable. La grande question que les investisseurs et les analystes se posent: est-ce que BCE paye trop cher ou pas pour mettre le grappin sur Astral Media et son grand réseau de canaux de télévision spécialisée et payante, de stations de radio, de propriétés de médias numériques et de plateformes d'affichage extérieur?

Ils se souviennent tous de la folle période (1999-2000) où on a vu une vague d'OPA dans le secteur des «télécoms-médias-technologie» et ce, à des prix de fou. Après tout, la prime que verse BCE pour acquérir Astral ne ressemble-t-elle pas étrangement à la prime de 36% que le tandem Quebecor / Caisse de dépôt et placement du Québec avait acceptée de payer en 2000 pour acquérir Vidéotron et ainsi créer Quebecor Média? Et on connaît la suite: après 11 années d'existence et de rentabilité, la valeur de Quebecor Média reste encore sous son coût de création.

Voici quelques données susceptibles de nous éclairer sur l'offre de BCE. Le cours de l'action d'Astral Média (ACM.A) a atteint son sommet historique en avril 2002 alors que le titre réussissait à dépasser la barre des 52,00$, pour un bref moment. L'actuelle OPA se fait à 50,00$.

Elle a beau inclure une prime de 39%, cela laisse quand même le titre légèrement sous son prix record. Mais ça n'en fait pas pour autant une aubaine, loin de là.

Regardons maintenant les «vrais» chiffres. Astral Media est une entreprise fort rentable. Les prévisions du chiffre d'affaires pour l'exercice financier en cours laissent entrevoir des revenus bruts de 1,04 milliard de dollars et un BAIIA (bénéfices avant impôts, intérêts et amortissement) de 329 millions.

Lors de la fermeture jeudi, à un cours de 36,25$, le titre d'Astral se négociait à un cours/bénéfice pour l'année 2012 de quelque 10. Ce qui était relativement pas cher. Au prix offert, soit 50,00$ l'action, BCE va se trouver à payer pour Astral un prix équivalent à 13,8 fois les bénéfices anticipés pour l'année.

L'achat d'Astral ne se fait certes pas à prix d'aubaine, mais tout de même pas à prix grandement surévalué. Dans le cadre évidemment d'une OPA. Autre donnée comparative intéressante, sachez que l'action de BCE (à près de 40,00$) se négocie, elle, à un ratio d'environ 13 fois les bénéfices anticipés pour l'année 2012.

C'est donc dire que l'acquisition d'Astral ne viendra pas alourdir de façon significative la rentabilité actuelle de BCE. En supposant bien entendu que les revenus et bénéfices anticipés pour cette année et les années suivantes deviennent réalité. Il est en outre important de rappeler que BCE est le mastodonte des télécoms au Canada, avec des revenus annuels dépassant les 18 milliards de dollars et une capitalisation boursière de 31 milliards.

Est-ce les actionnaires d'Astral peuvent s'attendre à ce que l'offre de BCE soit bonifiée? Je ne miserais pas une grosse somme là-dessus, vu la quasi improbabilité d'assister à une surenchère de la part des rivaux de BCE, que ce soit Quebecor, Cogeco, Telus, Rogers, etc.

Le seul «bonbon» que pourraient obtenir les actionnaires d'Astral, c'est de se faire offrir les 50,00$ en argent comptant, au lieu de recevoir le tout à raison de 75% en espèces et 25% en actions de BCE. Sur les 23 analystes des firmes de courtage qui suivent de près BCE, à peine cinq en recommandaient l'achat, du moins avant l'OPA sur Astral. Quinze analystes présentaient la sempiternelle recommandation «à conserver» et trois proposaient de le liquider.

Au moment d'aller sous presse, on ne savait pas encore si les analystes allaient réviser ou pas leurs recommandations à la suite de l'achat d'Astral Media.

Une note négative... Bien des actionnaires d'Astral trouvent injuste de voir BCE offrir 54,83$ aux actionnaires de contrôle pour leurs actions multivotantes, soit près de 10% de plus que les actions détenues par l'ensemble des actionnaires. J'ai demandé l'avis de l'Autorité des marchés financiers (AMF) sur cet écart de prix.

À suivre...