Vu la bonne performance de la Bourse au cours des deux premiers mois de l'année, est-ce que les régimes de retraite à prestations déterminées ont amélioré leur sort? Oui... mais de façon tellement peu significative, que le problème de solvabilité reste malheureusement entier.

Pourtant, les marchés boursiers ont connu un départ en lion en cette année 2012. Après à peine deux mois d'activité, la Bourse canadienne affichait déjà un gain de 6,1%, la Bourse américaine une progression de 5,4%; les actions internationales engrangeaient une plus-value de 7,8% et les marchés émergents, rien de moins qu'une hausse de 14,2%.

Par contre, on ne peut pas en dire autant du marché obligataire (obligations négociables et autres titres à revenu fixe) qui, lui, a connu un départ plutôt moche en 2012. Les indices obligataires affichent un minable rendement de 0% ou presque. Cela a donc eu pour effet de ramener finalement le rendement moyen des caisses de retraite à 3,5%.

C'est bien... mais nettement insuffisant pour permettre aux régimes de retraite d'améliorer sérieusement leur sort.

Selon la firme AON Hewitt, le degré médian de solvabilité s'est légèrement amélioré, passant de 68% au 31 décembre 2011 à 70% au 29 février 2012. Deux petits points de pourcentage, c'est mieux que rien. Par contre, AON soulève que 97% des régimes se retrouvent actuellement en déficit de solvabilité, soit un point de pourcentage de plus qu'en décembre dernier. Donc, une détérioration à ce chapitre, et ce malgré une performance positive des portefeuilles.

Je vous rappelle que le «degré de solvabilité» mesure la santé financière d'un régime de retraite à prestations déterminées en supposant que celui-ci se termine. Quand le degré médian est à 70%, comme le cas présentement, cela signifie qu'au moins la moitié des régimes ne pourraient faire face qu'à 70% ou moins de leurs obligations financières par rapport aux rentes de retraite promises aux employés.

Quant aux «97%» des régimes en déficit, cela veut dire que, dans l'hypothèse où les entreprises fermaient leurs portes, la presque totalité des régimes en question n'ont pas les actifs nécessaires pour défrayer les coûts des engagements de retraite contractés envers les employés.

On évalue à un tiers le nombre d'employés qui bénéficient au Canada de ces généreux régimes de retraite d'employeurs qui offrent des rentes de retraite.

Loin de la belle époque

Il faut remonter à décembre 2001 pour retrouver un degré de solvabilité médian positif. Il y a 10 ans, ledit degré atteignait les 102%, les actifs dépassant ainsi le passif, c'est-à-dire les engagements financiers envers futurs retraités et les retraités couverts par les régimes. À cette époque, toujours selon les données compilées par AON Hewitt, à peine 45% des régimes se retrouvaient en situation de déficit de solvabilité.

La situation a commencé à sérieusement se dégrader à partir de la crise financière de 2008, alors que 94% des régimes à prestations déterminées se sont retrouvés dans le rouge par suite de la baisse des taux d'intérêt à long terme. Remarquez qu'à l'époque, le degré de solvabilité s'élevait à 76%.

Les marchés boursiers ont eu beau se redresser entre le creux de mars 2009 et le haut du printemps 2011, la grande majorité des régimes sont quand même restés dans le rouge.

Mais la situation s'est de nouveau détériorée d'aplomb, cette fois au cours de la dernière crise financière amorcée à partir de juillet 2011.

Comment explique-t-on le phénomène? Claude Lockhead, expert de la firme AON, montre du doigt la faiblesse chronique des taux d'intérêt sur les obligations de long terme. Les «30 ans» rapportent aujourd'hui 2,55%. Il y a un an, compare-t-il, ces obligations affichaient un rendement de 3,75%. C'est donc cette diminution du rendement de ces obligations de 30 ans, plus évidemment la baisse enregistrée au niveau des obligations des termes de 7 à 10 ans, qui marquent au fer rouge les régimes de retraite à prestations déterminées.

Le calcul du passif de ces régimes est basé sur les obligations à long terme. Plus le taux de rendement de ces obligations baisse, plus cela a un effet négatif sur le calcul du passif des régimes.

Il va sans dire qu'une bonne performance des marchés boursiers aura pour effet de réduire le déficit de solvabilité. Mais ça prend plus que cela...

Quelle serait donc la meilleure nouvelle pour voir une nette amélioration des régimes de retraite à prestations déterminées?

Selon M. Lockhead, il faudrait que le taux d'intérêt des obligations de 30 ans grimpent d'au moins 100 à 125 points de base, soit de 2,55% à 3,80%. Comme c'était le cas il y a à peine un an. Et si les taux de long terme devaient grimper davantage... ça soulagerait tellement les employeurs aux prises avec les gros déficits de solvabilité des régimes de retraite.